Dearc
Dearc sgiathanach
Jagielska et al., 2022
Jagielska et al., 2022
Dearc (prononcé en gaélique écossais [tʲɛrxk], "dearc") est un genre fossile de ptérosaure rhamphorhynchiné de grande taille, provenant de la formation de Lealt Shale (en) du Jurassique moyen en Écosse. Son holotype, un juvénile ou subadulte encore en croissance active, a une envergure estimée entre 2,5 et 3 mètres, ce qui en fait le plus grand animal volant de son époque. Cette découverte repousse considérablement l’origine des grands ptérosaures, puisqu’on pensait auparavant que ces reptiles n’atteignaient de grandes tailles corporelles qu’à partir des lignées ptérodactyloïdes à queue courte du Crétacé. Le genre contient une seule espèce : Dearc sgiathanach (prononcé [ˈtʲɛɾxk ˈs̪kʲiəhanəx]).
Découverte et dénomination
L’holotype de Dearc, désigné NMS G.2021.6.1-4, a été découvert en 2017 par Amelia Penny dans la formation de Lealt Shale (en). Il consiste en un squelette tridimensionnellement préservé, encore articulé dans une dalle de calcaire (coupée en quatre morceaux pour sa préparation). Le spécimen conserve la majeure partie du corps, à l’exception de l’extrémité de la queue, de la plupart des membres postérieurs, de certaines parties de l’aile et du bout du bec. Il a été trouvé sur la côte est de la péninsule de Trotternish, qui fait partie de l’île de Skye, dans le nord-ouest de l’Écosse. La dalle rocheuse a été transportée à l’Université d’Édimbourg[1]. Le fossile a été préparé par Nigel Larkin. Il sera exposé par les Musées nationaux d’Écosse (en)[1],[2].
En 2022, l’espèce type Dearc sgiathanach a été nommée et décrite par Natalia Jagielska, Michael O’Sullivan, Gregory F. Funston, Ian B. Butler, Thomas J. Challands, Neil D.L. Clark, Nicholas C. Fraser, Amelia Penny, Dugald A. Ross, Mark Wilkinson et Stephen Louis Brusatte.
Étymologie
Le nom est dérivé du gaélique écossais et possède une double signification : il peut se traduire à la fois par « reptile ailé » et par « reptile de Skye », dearc signifiant « reptile » et sgiathanach (issu de sgiathan, « petite aile ») signifiant « ailé ». Ce mot entre également dans le nom gaélique de l’île de Skye (An t-Eilean Sgiathanach), souvent interprété comme signifiant « l’île ailée »[3].
Description
Taille
L’envergure de Dearc ne pouvait pas être mesurée directement, car plusieurs phalanges du doigt alaire étaient manquantes, en particulier la pointe et une partie centrale de l’aile. Une estimation a toutefois été possible par comparaison avec des taxons mieux échantillonnés, notamment Rhamphorhynchus et Dorygnathus. Avec les proportions de Rhamphorhynchus, l’estimation d’envergure varie entre 2,2 mètres (basée sur la longueur du crâne) et 3,8 mètres (basée sur l’humérus). Les estimations fondées sur la longueur de l’humérus de Dorygnathus donnent une envergure estimée de 1,9 mètre. Ces résultats font déjà de Dearc l’un des plus grands ptérosaures connus du Jurassique, plus grand que le plus grand Dorygnathus (1,69 mètre d’envergure), et surpassé parmi les non-ptérodactyloïdes uniquement par un grand spécimen de rhamphorhynchidé d’Ettlingen (Allemagne), probablement un Rhamphorhynchus[3],[4]. Les auteurs privilégient l’interprétation de la plus grande taille en raison, entre autres, de la bonne connaissance des stades de croissance de Rhamphorhynchus et de leur proximité phylogénétique[3].
Dearc présente plusieurs caractéristiques associées aux adultes chez Rhamphorhynchus, notamment de grandes dents recourbées au niveau du prémaxillaire, une crête bien développée sur l’humérus, la fusion entre la scapula et la coracoïde, une texture osseuse lisse, entre autres. Toutefois, d’autres zones du fossile révèlent des signes d’immaturité, comme des os du crâne non fusionnés et des vertèbres sacrées non fusionnées. L’analyse histologique confirme ce dernier point, indiquant que, bien qu’il ait eu au moins deux ans à sa mort, l’animal était encore en croissance active. L’os de l’aile montre deux lignes de croissance bien marquées, suggérant qu’il est mort peu après une période d’arrêt temporaire de croissance. Le fait que l’holotype de Dearc était encore en croissance rend possible une envergure atteignant trois mètres[3].
Anatomie squelettique
Dearc présente généralement le plan corporel typique des ptérosaures non-monofénestrés. Le cou est court et la queue allongée, soutenue par des zygapophyses imbriquées des vertèbres caudales. La symphyse mandibulaire est allongée et le métacarpe est court. On retrouve toutefois certaines caractéristiques partagées avec les ptérodactyloïdes, comme un crâne plus long que les vertèbres dorsales et sacrées combinées, ainsi que la forme de l’os carré (quadrate). De plus, bien que courts proportionnellement aux ptérodactyloïdes, les vertèbres cervicales sont nettement plus allongées que chez les autres non-monofénestrés, évoquant celles de Wukongopterus. La dentition présente deux types distincts de dents : des crocs allongés près de l’extrémité du museau et des dents plus coniques en forme de piquet vers l’arrière[3].
Les auteurs de la description ont identifié plusieurs traits distinctifs. Quatre sont des autapomorphies, c’est-à-dire des caractères dérivés uniques. Dans le palais, les vomers contiennent trois tubes formant une structure en trident. La contribution du maxillaire au palais, en avant de la choane (la narine interne), présente une dépression. Le cerveau possède des lobes optiques élargis dans le sens de la longueur. Dans le pied, le quatrième métatarsien est plus robuste que les trois premiers, environ 2,5 fois plus épais. De plus, deux caractères non uniques, mais dont la combinaison est unique à Dearc, ont été relevés : la fenêtre infratemporale a une forme de poire avec la partie étroite en haut, et l’os ectoptérygoïde du palais présente une projection orientée vers le haut, traversant la choane et contactant perpendiculairement le vomer[3].
Dearc possède de grandes griffes manuelles très courbées avec des sésamoïdes bien développés et des tendons fléchisseurs robustes. Cela suggère que les griffes pouvaient être rétractées dans une certaine mesure, permettant à l’animal de relever leurs pointes au-dessus du sol lorsqu’il marchait, pour en conserver la fonctionnalité. La morphologie des griffes suggère une fonction dans la locomotion grimpante ou arboricole, et possiblement une aide à la prédation, bien qu’une analyse plus approfondie des griffes chez Dearc et chez d’autres ptérosaures non-monofénestrés soit nécessaire pour confirmer ces hypothèses[5].
Phylogénie
L’analyse phylogénétique conduite pour Dearc, en 2022 par Jagielska et al., a inclus des caractères issus de plusieurs publications indépendantes ainsi que des caractères nouveaux, tout en excluant ceux connus uniquement chez de très jeunes animaux ou ceux fortement variables selon l’âge. L’arbre obtenu place Dearc au sein des Rhamphorhynchidae, spécifiquement dans un clade aux côtés de Angustinaripterus et Sericipterus, formant le groupe des Angustinaripterini[3]. L'arbre original a été modifié en faisant apparaître les trois taxons des Pterosauromorpha, Pterosauria et les Rhamphorhynchoidea, Rhamphorhynchidae et Scaphognathidae, pour plus de clarté.
| Pterosauromorpha |
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Voir aussi
Notes et références
Notes
Références
- Victoria Gill, « Fossil of largest Jurassic pterosaur found on Skye », sur BBC News, (consulté le )
- ↑ Brian Ferguson, « World's biggest Jurassic-era pterodactyl discovered on Isle of Skye », sur The Scotsman, (consulté le )
- [2022] (en) Natalia Jagielska, Michael O’Sullivan, Gregory F. Funston, Ian B. Butler, Thomas J. Challands, Neil D.L. Clark, Nicholas C. Fraser, Amelia Penny, Dugald A. Ross, Mark Wilkinson et Stephen L. Brusatte, « A skeleton from the Middle Jurassic of Scotland illuminates an earlier origin of large pterosaurs », Current Biology, Royaume-Uni, Cell Press et Elsevier, vol. 32, , p. 1-8 (ISSN 0960-9822 et 1879-0445, OCLC 45113007, DOI 10.1016/J.CUB.2022.01.073)..
- ↑ Frederik Spindler et Christina Ifrim, « Die Spur einer Spur – ein möglicher erster Flugsaurier aus Ettling Trace of a trace – a putative first pterosaur from the Ettling locality », Archaeopteryx, vol. 37, , p. 75–83 (lire en ligne)
- ↑ N. Jagielska, M. O'Sullivan, I. B. Butler, T. J. Challands, G. F. Funston, D. Ross, A. Penny et S. L. Brusatte, « Osteology and functional morphology of a transitional pterosaur Dearc sgiathanach from the Middle Jurassic (Bathonian) of Scotland », BMC Ecology and Evolution, vol. 25, no 1, , p. 9 (PMID 39849380, PMCID 11761736, DOI 10.1186/s12862-024-02337-9 , Bibcode 2025BMCEE..25....9J)
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