Abdelhamid Benzine
Abdelhamid Benzine, né le à Beni Ourtilane en Algérie et mort le à Koléa, est un homme politique et syndicaliste algérien, qui a été un responsable important de la CGT avant la guerre d'Algérie puis après l'indépendance le directeur du du quotidien communiste Alger républicain, auquel avait collaboré Albert Camus.
Biographie
Abdelhamid Benzine, né le à Beni Ourtilane, en Petite Kabylie, a été élevé dans une éducation religieuse complétée par un passage à l’université musulmane de la Zitouna à Tunis en 1947-1948[1]. Son grand-père était cadi, juge musulman, salarié dans le cadre de l’administration coloniale et son père secrétaire de cadi, dans différents centres de la petite Kabylie[1].
En octobre 1939, il devient interne au collège colonial Albertini de Sétif, où, après le débarquement allié du 8 novembre 1942 en Afrique du Nord, les cours seront interrompus en 1943 car il est occupé par des troupes anglaises[1]. Dès octobre 1940, il participe à l’action clandestine dirigée par Ahmed Djelloul[1].
La répression de mai 1945 dans la région de Sétif, il est arrêté en juin 1945, en plein cours de français, menottes aux mains, mené au commissariat de la ville[1]. Sa scolarité secondaire s’arrête ainsi en seconde. Libéré en 1946 sur un non-lieu, il est néanmoins exclu de l’enseignement secondaire[1].
Face à cette répression, il distribue les secours en argent qu’octroie le PPA-MTLD, établissant les listes des victimes de la répression[1]. En 1947, il passe en Tunisie pour des études théologiques à la Zitouna où il se trouve en compagnie d’Abdelhamid Mehri et de Mouloud Kassim, futurs dirigeants du FLN et ministres[1].
En juillet 1950, Abdelhamid Benzine prend le bateau à Alger et vient travailler quelques semaines dans les mines de charbon du Gard, puis rejoint Paris et son frère Abderrahmane, y devenant militant CGT et réintègrant le MTLD[1], dont certains responsables politiques à Paris sont liés au Parti communiste internationaliste (trotskiste)[1]. Pour gagner sa vie, il travaille aussi sur Des chantiers de construction[2].
Avec M’Hamed Yazidi, futur ministre de l'information, encore étudiant, il est chargé de suivre les questions syndicales en région parisienne, tandis que dans la région lyonnaise c'est Bachir Boumaza, futur dirigeant FLN[1], ouvrier dans la chimie. Bachir Boumaza sera ensuite chargé du journal L'Ouvrier algérien en France, l’organe de l’AGTA[3],
Abdelhamid Benzine est propulsé au secrétariat de la Commission des travailleurs nord-africains de la CGT-Région parisienne, qui chapeaute en fait toute la France[1], revigorée depuis fin 1950 par une rencontre entre le dirigeant CGT, André Tollet, ex-président du Comité parisien de la Libération (CPL), chargé à la CGT de l’Afrique du Nord, et la direction du MTLD, à Alger au siège de ce parti[1]. Comme au Maroc notamment, André Tollet organise une parité entre responsables syndicaux nationalistes et communistes, via des accords, à l’intérieur de la Commission nord-africaine la CGT[2], devenue le "lieu de concertation et de décision des actions communes"[1], sous le contrôle du Comité central du MTLD depuis Alger, sans craindre les conflits avec les injonctions du fondateur du MTLD Messali Hadj, dont des partisans sont, eux, plus proches de trotskistes du Parti communiste internationaliste à Paris[1].
En tant que secrétaire de la Commission des travailleurs nord-africains de la CGT, Abdelhamid Benzine prend la parole au 28e congrès de la CGT en mai 1951[1]. C'est lui qui est chargé de représenter les travailleurs algériens immigrés au sein de la direction de la CGT[2]. Mais plus tard en 1951, André Tollet est mis à l'écart, assez brusquement de ses responsabilités confédérales et doit se concentrer sur la direction de l'Union Départementale CGT de la Seine, toujours en lien avec le MTLD, et va présider à la naissance de l'Amicale générale des travailleurs algériens.
Blessé en mai 1952, lors de la manifestation contre le général Ridgway[1] et handicapé à la CGT par son passé au MTLD[1], qui critique alors le syndicat, Abdelhamid Benzine quitte le MTLD pour adhérer en 1953 au Parti communiste algérien (PCA)[2]. Il est recruté, avec son frère Abderrahmane, par la rédaction algéroise du quotidien communiste Alger républicain, sous la direction d’Henri Alleg et sur la recommandation d'André Ruiz, leader de la Fédération CGT des dockers à Alger[1]. Il y rejoint Boualem Khalfa, premier rédacteur en chef algérien du journal[4]. Dès l’indépendance, il deviendra le rédacteur en chef du quotidien et en fera le premier journal d’Algérie, loin devant la presse du FLN en français comme en arabe[1].
Entre-temps, après l’interdiction en septembre 1955 de leur journal, les frères Benzine avaient du passer à la clandestinité[1]. Il rejoint les maquis de la région du Sebdou (Tlemcen), où de nombreux militants du PCA étaient dans l'ALN[2]. En novembre 1956, il est blessé et fait prisonnier à l’issue d’un accrochage avec l’armée française puis condamné par le tribunal militaire d’Oran à 20 ans de travaux forcés et envoyé dans différentes prisons à Tlemcen, Oran, Lambèse[2].
Ensuite, après le coup d’État militaire du colonel Boumédiènne du 19 juin 1965, les locaux d'Alger républicain sont occupés et les dirigeants de nouveau obligés à la clandestinité, le quotidien El Moudjahid devenant le quotidien officiel du FLN[1]. Abdelhamid Benzine rejoint ainsi l’Organisation de la Résistance populaire (ORP), puis participe à la reprise du Parti communiste algérien (PCA) sous le nom de (Parti de l'avant-garde socialiste) (PAGS).
Il a épousé en 1965 une enseignante française, agrégée de philosophie[5] puis sociologue, Monique Gadant[6], qui avait eu deux enfants d’un premier mariage, une fille de 14 ans et un fils de 16 ans, enlevé et torturé par les services de sécurité algériens en avril 1971[1], tandis que sa femme quitte l’Algérie en juin 1971 et devient une spécialiste du nationalisme algérien sous le nom de Monique Gadant[1].
Abdelhamid Benzine sort en 1975 de la semi-clandestinité[1]. Après les journées d’octobre 1988, l’ouverture au pluralisme lui permet de reprendre la direction d'Alger républicain (1989-1994)[1].
Postérité
La gestion du "Prix de journalisme Abdelhamid Benzine" et du colloque bi-annuel qui le complète est assurée par l' Association culturelle "Les Amis de Abdelhamid Benzine" fondée le 9 mai 2011.
Bibliographie
- Boualem Khalfa, Henri Alleg, Abdelhamid Benzine, La grande aventure d’« Alger républicain », éditions Messidor, Paris, 1987.
Notes et références
- Biographie d'Abdelhamid Benzine dans Le Maitron, Dictionnaire biographique, mouvement ouvrier, mouvement social, par les historiens Amar Benamrouche et René Gallissot [1]
- "Abdelhamid Benzine. Aperçu biographique" par Zoheir Bessa, pour Alger républicain, en mars 2013 [2]
- ↑ "Figure ouvrière et engagement dans la lutte de libération nationale. Les ouvriers algériens de Renault-Billancourt pendant la guerre d'Algérie", article par l'universitaire Laure Pitti, dans la revue L'Homme et la société en 1995 [3]
- ↑ Nécrologie dans L'Humanité [4]
- ↑ Catherine Simon, « Monique Gadant », sur Le Monde, (consulté le ).
- ↑ « Décès de la sociologue Monique Gadant », humanite.fr, 5 octobre 1995.
Liens externes
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