Plotosaurus
Plotosaurus bennisoni
- Kolposaurus Camp, 1942 (préoccupé)
- Garzasaurus Anderson, 1943 (nomen nudum)
- Kolposaurus tuckeri Camp, 1942
- Plotosaurus tuckeri (Camp, 1942)
Plotosaurus (littéralement « lézard nageur ») est un genre fossile de grands mosasaures ayant vécu durant l'étage Maastrichtien de la fin du Crétacé supérieur dans ce qui est aujourd'hui l'Amérique du Nord. Le taxon fut initialement décrit par Charles Lewis Camp en 1942 sur la base de plusieurs spécimens fossiles plus ou moins complets ayant été découverts en Californie, aux États-Unis. Originellement baptisé Kolposaurus, ce nom est changé en 1951 par Camp lorsque celui-ci découvre que le terme avait déjà été utilisé pour un nothosaure. Deux espèces furent historiquement attribuées au genre, mais depuis 2008 seul Plotosaurus bennisoni est reconnu comme valide.
Contrairement aux autres mosasauridés, Plotosaurus possède une morphologie convergente avec celle des ichthyosaures, suggérant une adaptation à la nage beaucoup plus avancée que certains de ses proches parents. C'est d'ailleurs ces mêmes adaptations qui font qu'il est classé dans une position assez dérivée chez ce groupe de reptiles marins. Bien qu'uniquement connu d'Amérique du Nord, des spécimens fragmentaires connus du Japon pouvant possiblement appartenir au genrent laisse suggérer qu'il aurait eu une répartition plus large.
Historique des recherches
Les premiers spécimens connus de Plotosaurus sont découverts au début du XXe siècle dans les gisements de la formation de Moreno (en), le long de la vallée de San Joaquin, dans l'État américain de Californie. Le premier spécimen concerné consiste en une paire de vertèbres caudales recueillies entre 1918 en 1920 par un résident d'Oakland, nommé Herman G. Walker, lors d'une exploration menée dans les collines de Panoche (en). Les fossiles sont par la suite donnés au musée de l'université de Californie à Berkeley, où ils sont catalogués UCMP 36050. En , un lycéen de Gustine nommé Allan Bennison trouve trois vertèbres à côté d'un fossile d'hadrosaure dans des collines de schiste près de Patterson, dont deux qu'il donne à l'université, depuis catalogués UCMP 32943. Bennison devient passionné par la géologie de par son professeur de sciences M. Merrill Thompson et continue à étudier la stratigraphie des collines environnantes. Cela en devient fructueux, car en 1937, il découvre un squelette partiel dans une colline de grès gris près du col Pacheco, lors d'une étude des lits du Crétacé supérieur menée dans la chaîne Diablo. Bennison informe Thompson, et les deux amènent les paléontologues de l'université que sont Samuel Paul Welles, Curtis J. Hesse, Owen J. Poe et les étudiants de Thompson pour exhumer la découverte. Le spécimen, depuis catalogué UCMP 32778, préserve un crâne complet, dix-huit vertèbres articulées, une interclavicule, quatre côtes ainsi que des fragments associés. En août de la même année, un deuxième squelette est collecté par une équipe conjointe de l'université de Californie à Berkeley et de l'université d'État de Californie à Fresno lors de la fouille d'un fossile d'un élasmosauridé découvert dans les collines de Panoche à environ 64 km au sud-est du premier squelette trouvé par Bennison. Ce squelette, découvert par le professeur William M. Tucker de la ville de Fresno, est beaucoup plus grand que le squelette trouvé par Bennison et se compose d'une série articulée de cinquante-quatre vertèbres dorsales, pygales et caudales. Il est par la suite envoyé à l'université de Californie à Berkeley, où il est depuis catalogué UCMP 33913. Des expéditions menées entre 1938 et 1940 sur le terrain du California Institute of Technology, situé dans les affleurements de la formation de Moreno au nord de Coalinga, mettent au jour trois squelettes partiels supplémentaires. Le plus complet, catalogué CIT 2750, se compose d'un grand crâne, de trente-neuf vertèbres antérieures, d'une ceinture scapulaire et de palettes natatoires antérieures, tandis que les deux autres, catalogués CIT 2751 et CIT 2755, préservent même les queues[4].
Les squelettes fossiles sont étudiés par le directeur du musée de paléontologie de l'université de Californie à Berkeley, Charles Lewis Camp, dont les recherches sont publiées en 1942. Il reconnait que ces spécimens représentent un nouveau genre de mosasaure. Camp remarque particulièrement les adaptations aquatiques hautement dérivées qui sont beaucoup plus spécialisées que les autres représentants du groupe, le considérant comme « le genre le plus avancé jamais décrit dans la famille des Mosasauridae ». Il nomme ce genre Kolposaurus, un mot-valise des mots en grec ancien κόλπος / kólpos, « baie » et σαῦρος / saûros, « lézard », le tout voulant littéralement dire « lézard de la baie ». L'épithète spécifique de l'espèce type, bennisoni, est choisi en l'honneur de Bennison avec le spécimen UCMP 32778 désigné comme holotype. Camp identifie également une deuxième espèce qu'il nomme Kolposaurus tuckeri d'après Tucker. Son holotype est le squelette découvert par son homonyme (UCMP 33913), différencié de K. bennisoni par sa plus grande taille[N 1] et des vertèbres pygales plus nombreuses. Les squelettes de Caltech sont identifiés comme appartenant à K. tuckeri, quoique provisoirement pour le spécimen CIT 2750. Si son affectation était correcte, cela aurait fourni des informations supplémentaires pour différencier l'espèce de K. bennisoni, à savoir dans sa morphologie crânienne moins dérivée comme déduit par les narines, l'os frontal n'étant pas aussi étendu vers l'arrière, les dents des ptérygoïdes moins nombreuses, le carré étant plus haut que large, et un foramen pinéal plus petit, différents nombres de vertèbres portant certains processus et une interclavicule plus large proportionnellement au crâne[4]. En 1951, Camp note que le nom Kolposaurus est déjà préoccupé par un nothosaure, et renomma ainsi le genre Plotosaurus, un mot-valise formé du grec ancien πλωτώ / plôtô « nageur » et σαῦρος / saûros, « lézard », voulant dire « lézard nageur »[6]. En 2008, les paléontologues Johan Lindgren, Michael Caldwell et John Jagt redécrivent Plotosaurus sur la base d'un réexamen des spécimens décrits par Camp en 1942 et des nouveaux fossiles découverts après sa description. Ils découvrent qu'une grande partie des traits permettant de différencier les deux espèces sont en fait partagés, et que les caractéristiques distinctes restantes sont probablement le résultat d'une variation intraspécifique. Cela fait de P. tuckeri un synonyme junior de P. bennisoni, rendant ainsi le genre monotypique[2].
Comme vue précédemment, tout les fossiles formels de Plotosaurus sont connus de Californie. Néanmoins, des fossiles pouvant possiblement appartenir au genre ont été découverts ailleurs dans le monde. En 2016, une mâchoire inférieure fragmentaire découverte dans la formation de Quiriquina (en), près de Cocholgüe (es), au Chili, est identifiée par Eberhard Frey (de) et ses collègues comme provenant d'un mosasaure semblable à Plotosaurus[7]. Néanmoins, en 2019, Paulina Jiménez-Huidobro et ses collègues découvrent que cette attribution est erronée car le fossile ne correspond pas aux diagnoses établies chez le genre, les auteurs le réidentifiant comme provenant possiblement d'un Halisaurus[8]. En 2021, Taichi Kato et ses collègues décrivent deux vertèbres caudales provenant de deux localités distinctes de la préfecture d'Ibaraki, au Japon, l'une provenant de la formation d'Hiraiso et l'autre provenant de la formation inférieure d'Isoai. Les vertèbres concernées sont référées sous le nom de cf. Plotosaurus sp. en raison de leurs mensurations semblables à ceux des spécimens de Californie[3].
Description
Plotosaurus possède plusieurs adaptations à la vie marine non visibles chez d'autres mosasaures. En effet, comparé à ses proches parents, Plotosaurus a des palettes natatoires plus étroites, une grande nageoire caudale et une forme de corps fusiforme profilée[9]. Cette conception converge avec la morphologie et la structure hydrodynamique des ichthyosaures. Certaines des vertèbres de la queue sont fusionnées ; contrairement à la plupart des mosasaures, il ne s'agit pas d'une condition pathologique mais d'une autre adaptation aquatique qui permet à Plotosaurus d'obtenir une conception de nage plus efficace. Ainsi, Plotosaurus possédait le plus haut niveau d'adaptations aquatiques de tous les mosasaures[10]. Ces caractéristiques leur ont probablement permis d'être également l'un des mosasaures les plus rapides[11]. L'animal a également des yeux relativement grands pour une vue perçante, et les impressions trouvées avec leurs fossiles suggèrent qu'il avait une peau écailleuse[9].
Classification
Sur la base des analyses cladistiques, Plotosaurus est considéré comme la branche la plus dérivée de l'évolution des mosasaures[2],[12]. Le cladogramme suivant est modifié à partir d'un arbre de crédibilité de clade maximum déduit par une analyse bayésienne dans la plus récente analyse phylogénétique majeure de la sous-famille des Mosasaurinae par Madzia & Cau (2017)[13], qui est auto-décrit comme un raffinement d'une étude plus large de Simões et al. (2017)[14] :
| ◄ Mosasaurinae |
| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Notes et références
Notes
Références
- ↑ (en) James G. Ogg et Linda A. Hinnov, « Chapter 27 - Cretaceous », dans Felix M. Gradstein, James G. Ogg, Mark D. Schmitz et Gabi M. Ogg, The Geologic Time Scale, Oxford, Elsevier, , 1144 p. (ISBN 978-0-444-59425-9, DOI 10.1016/B978-0-444-59425-9.00027-5, S2CID 127523816), p. 793-853
- (en) Johan Lindgren, Michael W. Caldwell et John W. M. Jagt, « New data on the postcranial anatomy of the California mosasaur Plotosaurus bennisoni (Camp, 1942) (Upper Cretaceous: Maastrichtian), and the taxonomic status of P. tuckeri (Camp, 1942) », Journal of Vertebrate Paleontology, vol. 28, no 4, , p. 1043–1054 (DOI 10.1671/0272-4634-28.4.1043, JSTOR 20491036, S2CID 84175195)
- (en) Taichi Kato, Yasuhisa Nakajima, Kohei Shiseki et Hisao Ando, « Advanced mosasaurs from the Upper Cretaceous Nakaminato Group in Japan », Island Arc, vol. 30, no 1, (ISSN 1038-4871, DOI 10.1111/iar.12431, Bibcode 2021IsArc..30E2431K, S2CID 240303333)
- (en) Charles L. Camp, « California mosasaurs », Memoirs of the University of California, vol. 13, , p. 1-68 (lire en ligne)
- ↑ (en) Henry F. Osborn, « A complete mosasaur skeleton, osseous and cartilaginous », Memoirs of the American Museum of Natural History, vol. 1, no 4, , p. 167-188 (PMID 17837338, DOI 10.1126/science.10.260.919, Bibcode 1899Sci....10..919O, hdl 2246/5737 , S2CID 12903028)
- ↑ (en) Charles L. Camp, « Plotosaurus, a new generic name for Kolposaurus Camp, preoccupied », Journal of Paleontology, vol. 25, no 6, , p. 822 (JSTOR 1299824)
- ↑ (en) Eberhard Frey, Eric W. A. Mulder, Wolfgang Stinnesbeck, Christian Salazar et Luis Arturo Héctor Quinzio-Sinn, « A mosasaur, cf. Plotosaurus, from the upper Maastrichtian Quiriquina Formation in Central Chile », Cretaceous Research, vol. 61, , p. 17-25 (ISSN 0195-6671, DOI 10.1016/j.cretres.2015.12.006, Bibcode 2016CrRes..61...17F, S2CID 131527524)
- ↑ (en) Paulina Jiménez-Huidobro, Rodrigo A. Otero, Sergio Soto-Acuña et Michael W. Caldwell, « Reassessment of cf. Plotosaurus from the upper Maastrichtian of Chile, with comments on the South American distribution of halisaurine mosasaurs », Cretaceous Research, vol. 103, , p. 104162 (ISSN 0195-6671, DOI 10.1016/j.cretres.2019.06.008, Bibcode 2019CrRes.10304162J, S2CID 198421491)
- (en) Douglas Palmer, The Marshall Illustrated Encyclopedia of Dinosaurs and Prehistoric Animals, Londres, Marshall Editions, , 312 p. (ISBN 1-84028-152-9, lire en ligne), p. 87
- ↑ (en) Johan Lindgren, John W. M. Jagt et Michael W. Caldwell, « A fishy mosasaur: the axial skeleton of Plotosaurus (Reptilia, Squamata) reassessed », Lethaia, vol. 40, no 2, , p. 153-160 (DOI 10.1111/j.1502-3931.2007.00009.x , S2CID 84110488)
- ↑ (en) Bruce Rothschild et Michael J. Everhart, « Co-Ossification of Vertebrae in Mosasaurs (Squamata, Mosasauridae); Evidence of Habitat Interactions and Susceptibility to Bone Disease », Transactions of the Kansas Academy of Science, vol. 118, nos 3-4, , p. 265-275 (DOI 10.1660/062.118.0309, S2CID 83690496, lire en ligne)
- ↑ (en) Aaron R. H. LeBlanc, Michael W. Caldwell et Johan Lindgren, « Aquatic adaptation, cranial kinesis, and the skull of the mosasaurine mosasaur Plotosaurus bennisoni », Journal of Vertebrate Paleontology, vol. 33, no 2, , p. 349-362 (DOI 10.1080/02724634.2013.726675, JSTOR 42568674, S2CID 86389664)
- ↑ (en) Daniel Madzia et Andrea Cau, « Inferring 'weak spots' in phylogenetic trees: application to mosasauroid nomenclature », PeerJ, vol. 5, , e3782 (PMID 28929018, PMCID 5602675, DOI 10.7717/peerj.3782 )
- ↑ (en) Tiago R. Simões, Oksana Vernygora, Ilaria Paparella, Paulina Jimenez-Huidobro et Michael W. Caldwell, « Mosasauroid phylogeny under multiple phylogenetic methods provides new insights on the evolution of aquatic adaptations in the group », PLOS ONE, vol. 12, no 5, , e0176773 (PMID 28467456, PMCID 5415187, DOI 10.1371/journal.pone.0176773 , Bibcode 2017PLoSO..1276773S)
Voir aussi
Articles connexes
Lectures complémentaires
- (en) Richard P. Hilton, Dinosaurs and Other Mesozoic Reptiles of California, Berkeley, University of California Press, , 318 p. (ISBN 0-520-23315-8, lire en ligne)
Liens externes
- Ressources relatives au vivant :
- Portail de la paléontologie
- Portail de l’herpétologie
- Portail de la Californie