Nome du Lièvre

Le nome du Lièvre (wnt) est l'un des quarante-deux nomes (division administrative) de l'Égypte antique. C'est l'un des vingt-deux nomes de la Haute-Égypte et il porte le numéro quinze.

Géographie

Ce nome faisait près de 31 km de long selon la liste des nomes de Sésostris Ier[note 1]. Ce nome était situé entre le nome de l'Oryx (16e) au nord et, au sud, soit, selon Pierre Montet, le nome inférieur du Sycomore (14e) côté rive occidentale du Nil et le nome de la Vipère de montagne (12e) côté rive oridentale du Nil[1], soit, selon la carte de Michel Dessoudeix, uniquement le nome inférieur du Sycomore (14e) pour les deux rives du Nil[2].

Il semble qu'une piste désertique depuis l'oasis d'Al-Bahariya menait directement au nome du Lièvre, là où une piste depuis l'oasis d'Al-Farafra menait au 14e nome et deux pistes depuis les oasis méridionales (Al-Kharga et Ad-Dakhla) menaient au 13e nome[3].

Histoire

Le nome du Lièvre était déjà connu au cours de la IVe dynastie de l'Ancien Empire, comme le montre la statue en forme de triade du pharaon Mykérinos, d'Hathor et d'une représentation déifiée du nome[note 2]. On sait que pendant la VIe dynastie, ses nomarques étaient enterrés dans la nécropole de Cheikh Saïd[4].

Le nome conserva son importance durant la Première Période intermédiaire et le Moyen Empire qui suivit ; ses gouverneurs étaient également responsables de l'extraction de l'albâtre égyptien[note 3] à Hatnoub dans le désert oriental, ils possédaient des fonctions exclusives telles que « directeur du double trône » et « grand des cinq », et étaient également grands prêtres de Thot[5]. Lors de la Première Période intermédiaire, ils déplacèrent légèrement vers le nord leur nécropole à Deir el-Bersha, où leurs tombes taillées dans la roche, bien que mal conservées, furent mises au jour. Au cours du Moyen Empire, le nome du Lièvre était dirigé par une dynastie assez ramifiée de nomarques ; le dernier connu d'entre eux, Djéhoutyhotep, était également le propriétaire de la tombe la plus élaborée et la mieux conservée de la nécropole de Deir el-Bersha ; il a régné jusqu'au début du règne de Sésostris III qui est connu pour avoir pris des mesures pour minimiser le pouvoir détenu par tous les nomarques[5],[6].

Au Nouvel Empire, le site de Tounah el-Gebel se développa, avec un temple datant d'Amenhotep III et dédié à lui-même ainsi qu'à Thot et à d'autres dieux locaux. Il y a également un petit nombre de tombes du Nouvel Empire[7]. Pendant le règne d'Akhenaton, le roi fit construire une capitale du nom d'Akhetaton sur le site d'Amarna ; cette capitale fut cependant abandonnée peu après la mort du roi[8].

Aux alentours de la conquête de l'Égypte par les rois nubiens pendant la Troisième Période intermédiaire (fin XXIIe/XXIIIe dynasties, début XXVe dynastie), le nome du Lièvre acquit une certaine importance, étant le siège d'une petit royaume dirigé par Djéhoutyemhat puis Nimlot depuis Hermopolis Magna[9]. Sous le règne de Nimlot, le roi prit part à la coalition égyptienne menée par Tefnakht de Saïs en lutt contre le roi nubien Piânkhy ; ce dernier prit cepandant la ville d'Hermopolis avant de conquérir le reste du pays[10].

La nécropole Tounah el-Gebel se développa par la suite avec des tombes d'animaux (ibis et babouins) à la Basse Époque, puis, à la toute fin de cette période avec les tombes de Pétosiris et de son frère Djed-Thot-iou-ef-ankh qui construisirent les premières grandes tombes. Le site continua d'être utilisa comme nécropole aux périodes ptolémaïque et romaine[11].

Divinités locales

Les divinités principales à l'origine semblent être un babouin et une divinité hase nommée Ounout[12] (bien qu'à l'origine, elle ait pu être représentée par un serpent[13]). Par la suite, le culte du dieu ibis Thot s'imposa (bien que les inscriptions sur la chapelle blanche de Sésostris Ier relient ce nome au culte du génie Aha[note 4]) et, d'une part, Thot adopta la forme du babouin en plus de celle d'ibis et, d'autre part, la hase fut conservée dans le nom et l'enseigne du nome[12].

À Hermopolis était également vénéré l'Ogdoade, Hermopolis se disant d'ailleurs en ancien égyptien Khemenou, c'est-à-dire la « ville de l'Ogdoade »[14].

Un temple d'Amon se trouvait également à Hermopolis, construit par Séthi II[15].

Nomarques notables

Nomarques de l'Ancien Empire enterrés dans la nécropole de Cheikh Saïd :

Nomarques du Moyen Empire enterrés dans la nécropole de Deir el-Bersha :

Lieux principaux

Principaux lieux[16] :

Notes et références

Notes

  1. Selon cette liste des nomes de Sésostris Ier, le nome mesurait trois iterou, un iterou faisant environ 10,5 km.
  2. Le roi Mykérinos, la déesse Hathor, et le nome du Lièvre déifié, au Museum of Fine Arts, Boston.
  3. Aussi nommé « travertin égyptien », notamment par les auteurs anglo-saxons (de Putter & Karlshausen 2022, p. 22-24).
  4. Upper Egypt nome 15, Digital Egypt for Universities ; voir Liste des nomes de Sésostris Ier.

Références

  1. Montet 1961, p. 145.
  2. Dessoudeix 2008, p. 772.
  3. Aufrère et Golvin 1997, p. 257.
  4. Grimal 1994, p. 181.
  5. Grajetzki 2006, p. 109-111.
  6. Grimal 1994, p. 222.
  7. Ikram 2012.
  8. Aufrère et Golvin 1997, p. 236.
  9. Payraudeau 2020, p. 556.
  10. Payraudeau 2020, p. 177-180.
  11. Lembke 2010, p. 232-250.
  12. Lalouette 1995, p. 57.
  13. Hornung 1992, p. 300.
  14. Aufrère et Golvin 1997, p. 211.
  15. Aufrère et Golvin 1997, p. 212-213.
  16. Dessoudeix 2008, p. 757.

Bibliographie

  • Pierre Montet, Géographie de l'Égypte ancienne : La Haute-Égypte, t. 2, Paris, Librairie C. Klincksieck,  ;
  • Claire Lalouette, Histoire de la civilisation pharaonique, vol. 1 : Au royaume d'Égypte. Au temps des rois dieux, Paris, Flammarion, coll. « Champs », (1re éd. 1991), 384 p. (ISBN 978-2081272187) ;
  • Nicolas Grimal, Histoire de l'Égypte ancienne, Paris, Le Livre de Poche, (1re éd. 1988), 668 p. (ISBN 978-2253065470) ;
  • Erik Hornung, Les dieux de l'Égypte. L'un et le multiple [« Der Eine und die Vielen »], Paris, Flammarion, coll. « Champs », (1re éd. 1971), 310 p. (ISBN 978-2080812575) ;
  • (en) Wolfram Grajetzki, The Middle Kingdom of ancient Egypt: history, archaeology and society, Londres, Bristol Classical Press, , 232 p. (ISBN 978-0715634356) ;
  • Salima Ikram, « Hermopolis Magna, Tuna el-Gebel (Pharaonic) », The Encyclopedia of Ancient History, Hoboken, NJ, John Wiley & Sons, Inc.,‎ (ISBN 9781444338386, DOI 10.1002/9781444338386.wbeah15404, lire en ligne, consulté le ) ;
  • Katja Lembke, Tradition and Transformation. Egypt Under Roman Rule, (ISBN 978-9004189591, DOI doi:10.1163/ej.9789004183353.i-508.54), « 11. The Petosiris-Necropolis Of Tuna El-Gebel » ;
  • Michel Dessoudeix, Chronique de l'Égypte ancienne : Les pharaons, leur règne, leurs contemporains, Arles, Actes Sud, , 780 p. (ISBN 978-2-7427-7612-2) ;
  • Thierry de Putter et Christina Karlshausen, Pierres de l'Égypte ancienne, Bruxelles, Éditions Safran, coll. « Connaissance de l'Égypte Ancienne » (no 20), , 319 p. (ISBN 978-2874571336) ;
  • Sydney Aufrère et Jean-Claude Golvin, L'Égypte restituée : Sites, temples et pyramides de Moyenne et Basse-Égypte, t. 3, Paris, Éditions Errance, , 363 p. (ISBN 978-2-87772-148-6) ;
  • Frédéric Payraudeau, L'Égypte et la vallée du Nil : Les époques tardives, t. 3, Paris, PUF, coll. « Nouvelle Clio », , 624 p. (ISBN 978-2130591368).
  • Portail de l’Égypte antique