Cotisation sur la valeur ajoutée
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Cotisations sociales patronales | 
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La cotisation sur la valeur ajoutée (CVA) est une proposition de réforme du financement de la protection sociale en France. Elle consiste à remplacer une partie ou la totalité des cotisations sociales patronales assises sur les salaires par une cotisation basée sur la valeur ajoutée des entreprises.
L’idée a été formulée pour la première fois en 1997 par Jean-François Chadelat dans un rapport au Premier ministre consacré à la réforme des cotisations patronales,[1] puis reprise en 2006 par le président Jacques Chirac et par l’économiste Jacques Bichot.[2]
La CVA ne doit pas être confondue avec la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), taxe locale créée en 2010 et supprimée en 2023.
Historique
À la demande des syndicats, le gouvernement Juppé puis le gouvernement Jospin engagent dans les années 1990 une réflexion sur la modification de l’assiette des cotisations employeurs. La **CFDT** défend alors un élargissement à l’ensemble de la valeur ajoutée, tandis que la **CGT** privilégie une modulation du taux en fonction du ratio masse salariale/valeur ajoutée.[3] Deux rapports sont successivement commandés : le rapport **Chadelat** (1997), puis le rapport **Malinvaud** (1998).
En 1997, Jean-François Chadelat, dans son rapport au Premier ministre, propose de substituer à une partie des cotisations patronales une cotisation sur la valeur ajoutée (CVA), en cohérence avec le transfert des cotisations maladie salariales vers la CSG et l’ambition d’une assurance maladie universelle.[4]
L’idée refait surface en janvier 2006, lorsque le président Jacques Chirac relance le débat en évoquant l’élargissement de l’assiette des cotisations patronales à l’ensemble de la valeur ajoutée des entreprises, afin de réduire le coût du travail et de favoriser l’emploi.[5]
Dans la foulée, l’économiste Jacques Bichot reprend cette piste dans une note publiée par l’Institut Montaigne.[6] Il identifie alors trois modalités possibles :
- une hausse de la TVA (« TVA sociale ») ;
- une cotisation directement assise sur la valeur ajoutée (CVA) ;
- une modulation des cotisations selon la part de la valeur ajoutée revenant au capital, une forme de « CVA modulée ».
Le Conseil d’analyse économique (CAE), saisi en 2006, conclut toutefois que la formule de CVA poserait des difficultés pratiques de gestion et n’apporterait que des avantages incertains, ce qui conduit à son abandon.[7]
Objectifs économiques et sociaux
Selon ses partisans, la CVA permettrait :
- de réduire le coût du travail dans les secteurs à forte intensité de main-d’œuvre ;
- de rendre la contribution des entreprises à la sécurité sociale plus proportionnelle à leur capacité contributive globale[8].
Des analyses comme celle du Conseil des prélèvements obligatoires soulignent cependant la complexité de l’outil, notamment pour les entreprises multi-activités ou les PME[9].
Débats et critiques
La CVA a été critiquée par l'IFRAP, qui la qualifie de "fausse bonne idée" en raison de sa complexité et de son impact incertain sur l’emploi[10].
Des auteurs comme Liêm Hoang-Ngoc voient dans ces propositions une tentative de transformation silencieuse du modèle social français[11], tandis que des études sociologiques ont souligné la réticence des représentants patronaux à tout élargissement de l’assiette sociale[12].
Voir aussi
- Protection sociale en France
- Cotisation sociale
- Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises(CVAE)
- TVA sociale
- Jacques Bichot
Bibliographie
- OCDE (2021). Repenser la fiscalité de la valeur ajoutée.
- Conseil des prélèvements obligatoires (2017).
- Bezes, P. (2009). La genèse de l’État stratège. Le Lien Social.
- Daridan, M.-L. & Luneau, A. (2012). Lobbying. Vuibert.
- Lecherbonnier, B. (2016). Les lobbies à l’assaut de l’Europe. FYP.
- Rouilleault, H. (2010). Où va la démocratie sociale ? L’Harmattan.
Analyse de l’assiette
L’impact économique d’une cotisation sur la valeur ajoutée dépend du périmètre de l’assiette retenue. Certains rapports, comme celui du Conseil d’analyse économique (2006), évoquent des réserves sur les coûts de gestion et les effets sectoriels de la CVA, liés notamment à la difficulté d’uniformiser l’assiette selon les structures productives[13].
Le rapport sénatorial n°66 (2007) note également que la valeur ajoutée utilisée dans les simulations inclut les amortissements, ce qui peut majorer la charge sur les entreprises capitalistiques[14].
Notes et références
- ↑ « Jean-François Chadelat, La réforme des cotisations patronales » [archive], sur Sénat, (consulté le )
- ↑ « Jacques Chirac veut lancer la réforme sur la protection sociale avant fin 2006 », sur Le Monde, (consulté le )
- ↑ Sterdyniak, H., & Villa, P. (1999). « Pour une réforme du financement de la Sécurité sociale », Revue de l’OFCE, n°67, p.179. [1]
- ↑ « Jean-François Chadelat, La réforme des cotisations patronales » [archive], sur Sénat, (consulté le )
- ↑ « Jacques Chirac veut lancer la réforme sur la protection sociale avant fin 2006 », sur Le Monde, (consulté le )
- ↑ « Comment financer la protection sociale ? », sur Institut Montaigne (archive), (consulté le )
- ↑ « Réforme des cotisations patronales : le rapport qui fait hésiter le gouvernement », sur Les Échos, (consulté le )
- ↑ Roques, B. (2024). Simulations sectorielles sur l’impact de la CVA.
- ↑ Conseil des prélèvements obligatoires (2017).
- ↑ Fondation IFRAP, 2006.
- ↑ Hoang-Ngoc, L. (2008). Sarkonomics. Mille et Une Nuits.
- ↑ Roques, B. (2024). Pour une pragmatique sociologique… HAL.
- ↑ Conseil d’analyse économique, Une stratégie PME pour la France, rapport n°61, janvier 2006. [2]
- ↑ Sénat, Rapport n°66 (2007), [3]