Bataille de Grand-Champ
| Date | |
|---|---|
| Lieu | Grand-Champ |
| Issue | Victoire des républicains |
| République française | Chouans |
| • Jean-Louis Gaspard Josnet de Laviolais | • Sébastien de La Haye de Silz † |
| 500 à 800 hommes[1],[2] | 250 à 800 hommes[2],[3] |
| Inconnues | 14 morts[4] |
Batailles
- Groix
- 1er Pont-Sal
- Tumulus Saint-Michel
- 2e Pont-Sal
- Auray
- Landévant
- Landévant et Mendon
- Fort Sans-Culotte
- Carnac
- Sainte-Barbe
- Elven
- Josselin
- Plouharnel
- Pont-Aven
- Coëtlogon
- Quintin
- Quiberon
Pont de Bovrel - Elven
- Camezon
- Colpo
- Remungol
- Muzillac
- Lemboh
- Maigrit
- Pluvigner
- 1re Locminé
| Coordonnées | 47° 45′ 33″ nord, 2° 50′ 36″ ouest | |
|---|---|---|
La bataille de Grand-Champ se déroule le , lors de la Chouannerie. Elle s'achève par la victoire des républicains qui s'emparent du bourg de Grand-Champ.
Prélude
Le 30 mars 1795, des négociations de paix entre les républicains et les chouans débutent au château de la Prévalaye, à Rennes[4],[5]. Elles aboutissent à la signature d'un traité de paix le 19 avril au manoir de la Mabilais[4],[5]. Cependant, seuls 21 des 125 chefs royalistes venus à Rennes acceptent de signer le traité[4],[6]. Le général en chef des chouans du Morbihan, Sébastien de La Haye de Silz, fait partie des signataires, mais il n'est pas imité par la majorité de ses subordonnés, notamment Georges Cadoudal[7].
Le Conseil du Morbihan décide alors d'envoyer deux de ses officiers, La Bourdonnaye et d'Allègre de Saint-Tronc, pour avertir Joseph de Puisaye à Londres de la tournure des événements[4],[6],[8]. La Bourdonnaye est arrêté par les républicains, mais Allègre parvient à s'acquitter de sa mission[4],[8]. Puisaye, alors en pleins préparatifs de l'expédition de Quiberon, condamne aussitôt le traité et Allègre retourne au Morbihan pour annoncer le débarquement imminent des troupes émigrées avec l'aide des Anglais[4],[8].
Malgré la paix, de nombreux incidents éclatent entre royalistes et républicains[7]. Dans ses mémoires, l'officier chouan Jean Rohu rapporte notamment qu'il capture 13 soldats républicains venus saisir du sel entre Carnac et Locmariaquer[7],[Note 1]. Selon le journal de l'abbé Richard, six républicains sont tués lors d'une attaque à Saint-Jean-du-Poteau, en Plumelin, et neuf autres sont faits prisonniers et emmenés à Grand-Champ[1]
Le Conseil du Morbihan se réunit le 20 mai à Grand-Champ[4],[10],[8],[1]. Sébastien de La Haye de Silz est présent, ainsi que Georges Cadoudal, Pierre Guillemot, Jean Jan, Auguste de La Haye de Silz, Bonfils de Saint-Loup, de Troussier, du Chélas, Eonnet, Lantivy de Kerveno, Berthelot, Lemercier, Bellec, du Bois-Berthelot, l'abbé Boutouillic et l'abbé Guillo[10],[8]. Le Conseil prévoit alors de reprendre les hostilités au moment du débarquement anglo-émigré et décide d'avertir les Vendéens pour qu'ils organisent une opération de diversion[4],[8].
Cependant le 21 mai, une nouvelle escarmouche oppose les républicains aux chouans de Cadoudal au village de Loperhet, près du bourg de Grand-Champ[10]. Le 23 mai, Ballé, émissaire envoyé par Cormatin auprès du Conseil du Morbihan, est arrêté par les républicains près de Ploërmel et trois lettres compromettantes sont trouvées sur lui[10]. Le 25 mai, le général Lazare Hoche fait arrêter Cormatin et son état-major à Rennes[10]. Le 27 mai, les représentants en mission Jacques Guermeur et Louis Bruë sont informés à Quimperlé des réunions suspectes tenues par les chefs chouans du Morbihan[4],[10],[3],[8]. Ils donnent alors l'ordre de les arrêter et d'envoyer des troupes fouiller les communes de Grand-Champ et Pluvigner[4],[3],[8],[11]. Le soir du 27 mai, des colonnes républicaines sortent de Vannes et se portent sur Grand-Champ[1],[4].
Forces en présence
Les effectifs des deux camps varient selon les sources. Selon une lettre écrite au lendemain du combat par quatre officiers chouans — Le Mercier, Berthelot, Du Boisberthelot fils et Du Chemin — et adressée à Jean Jan[Note 2], l'affrontement oppose 250 chouans à 800 républicains[2]. Le journal d'un prêtre réfractaire, l'abbé Richard, évoque quant à lui 500 républicains divisés en trois détachements[1].
Dans ses mémoires, Joseph de Puisaye porte le nombre des républicains à 1 500 contre quelques centaines d'hommes du côté des chouans[12]. Selon Louis Georges de Cadoudal, neveu de Georges Cadoudal, les chouans sont entre 700 et 800[8],[3].
Les forces républicaines sont commandées par le général Jean-Louis Gaspard Josnet de Laviolais[3],[13],[10], tandis que les chefs royalistes encore présents à Grand-Champ au moment de l'attaque sont Sébastien de La Haye de Silz et Berthelot[1],[2].
Déroulement
À trois heures du matin, le bourg de Grand-Champ est cerné par les troupes de Josnet de Laviolais[3]. Les chouans, dispersés dans les maisons du bourg, sont pris par surprise[10],[1],[12]. Selon les mémoires de Puisaye, ils ont « à peine le temps de saisir leurs armes, et de se mettre ensemble »[12].
Le combat dure une heure et demie[2] ou deux heures[14]. De Silz se met à la tête de ses hommes, mais il est grièvement blessé et expire sur le chemin du Loc'h[1], peut-être au village de Kervihen[15]. Les chouans prennent la fuite et se réfugient dans les bois de Kerret, au nord du bourg[1].
Selon les mémoires de Julien Guillemot, Georges Cadoudal, à la tête de la division d'Auray, rejoint ensuite les troupes de de Silz dans les bois de Kerret[2]. Ils y sont attaqués dans la journée par les troupes de Josnet, et après une « belle défense », il se retirent sur l'abbaye de Lanvaux[2],[Note 3].
Les républicains ne poussent pas la poursuite très loin et livrent le bourg de Grand-Champ au pillage[1],[15].
Pertes
Le lendemain du combat, le représentant Bruë écrit un rapport au Comité de salut public dans lequel il annonce qu'une centaine de chouans ont été tués, dont deux chefs[14],[Note 4].
Selon la lettre des quatre officiers chouans, les pertes des royalistes ne sont que de trois hommes tués, dont un sans arme, et de cinq blessés[2]. Ils estiment également les pertes des assaillants à une vingtaine de tués et ajoutent que deux femmes et deux enfants ont été assassinés par les républicains[2].
Dans ses mémoires, Joseph de Puisaye fait quant à lui état de la mort de de Silz et de 13 de ses hommes[12]. Ce bilan est repris par l'historien Roger Dupuy[4].
Selon le procureur général syndic du Morbihan, 44 prisonniers républicains, détenus dans les caves du château de Penhouët, sont délivrés au terme des combats[3],[10],[13].
Conséquences
Au moment de l'attaque de Grand-Champ, une autre troupe de chouans, forte de 500 hommes et commandée par Pierre Mercier et Jean Rohu, campe à l'abbaye de Lanvaux, à six kilomètres à l'ouest[1],[Note 5]. Alertée, celle-ci se met en marche au matin sur Grand-Champ, mais elle arrive trop tard pour prendre part au combat[1]. Mercier et Rohu se contentent de rallier les fuyards cachés dans les bois de Kerret, puis ils font retraite sur Bignan afin de rejoindre les troupes de Pierre Guillemot[1].
D'après le journal de l'abbé Richard, les insurgés sont alors animés par un vif mouvement de colère contre les chefs, en particulier contre Berthelot : « ils leur tinrent des propos très durs et les accusèrent d'être de connivence avec la Nation »[1].
Notes et références
Notes
- ↑
« Dès le matin du jour suivant, on vint nous prévenir que des soldats de Locmaria-Kaer, au nombre de treize, étaient venus prendre du sel par les marais de Beaumer. Aussitôt j'envoyai enlever le bateau du passage de Kerisper, situé entre Carnac et Locmaria-Kaer et, avec les hommes que je pus réunir, je me portai vers les enleveurs de sel qui ne voulurent pas se défendre, qui me remirent leurs armes, et je les fis conduire au bourg de Grandchamp, où M. le comte de Silz, notre général, avait son quartier[9]. »
— Mémoires de Jean Rohu
- ↑
« Monsieur,
Vous avez sans doute appris avec quel courage 250 des nôtres se sont battus pendant une heure et demie contre 800 Républicains. Forcés de céder au nombre, nous avons été obligés d'évacuer le bourg de Grand-Champ. Les Bleus y ont commis des horreurs. Nous avons perdu deux hommes armés et un sans armes; nous avons cinq blessés. Les nationaux ont assassiné deux femmes et deux enfants. Ils ont eu une vingtaine de tués dans le combat, et on en a tué sept aujourd'hui sans perdre un seul homme. Hier, on en prit deux qui prirent la fuite dès le commencement de l'action.
Nous allons maintenant intercepter toutes les grandes routes, arrêter tous les convois, nous défaire des dénonciateurs qui restent encore. Vous voudrez bien en faire autant de suite et faire passer à MM. Du Chélas, Bonfils, Eonnet, et autres chefs de vos environs, copie de la présente pour qu'ils se comportent de la même manière que ceux auxquels vous écrirez, en donnant connaissance à leurs voisins, et ainsi de suite, de canton en canton.
Nous sommes, etc.[2]. »
— Lettre des officiers Le Mercier, Berthelot, Du Boisberthelot fils et Du Chemin à Jean Jan.
- ↑ Selon Louis Georges de Cadoudal, son oncle se trouve à l'abbaye de Lanvaux au moment de l'attaque de Grand-Champ[8]. En revanche, Jean Rohu écrit dans ses mémoires que le détachement de Lanvaux était commandé par Mercier et ne fait pas état de la présence de Cadoudal[10],[9].
- ↑
« Le rassemblement de Grand-Champ a été attaqué hier matin à trois heures: le feu a duré deux heures. Les Chouans ont été battus, avec perte d'une centaine d'hommes, au nombre desquels se trouvent, dit-on, deux chefs. Ils ont été poursuivis jusque dans les forêts de Camor et Lanvaux[14]. »
— Lettre du représentant en mission Louis Urbain Bruë au Comité de Salut public, rédigée le 29 mai 1795 à Vannes.
- ↑
« À cette époque, les conférences de la Mabilais étant rompues, les Républicains nous faisaient la guerre à outrance. Le général de Silz fut attaqué dans sa position de Grand-Champ. Sa troupe fut battue, lui tué, et les prisonniers qu'il tenait, délivrés. Le même jour nous nous trouvions au nombre de cinq cents, sous les ordres de La Vendée, à une lieue et demi du bourg de Grandchamp. Nous avions passé la nuit à l'abbaye de Lanvaux, et quand le matin arriva nous nous dirigeâmes vers le champ de bataille, mais nous ne vîmes que ceux des nôtres qui se sauvaient en déroute vers les taillis de Kerret; on nous fit prendre la même direction et nous ne nous arrêtâmes qu'au bourg de Bignan. Chose extraordinaire! étant couché la nuit sur le plancher en tuile d'une chambre de l'abbaye, la veille du combat dont je viens de parler, nous avions allumé du feu au milieu de l'appartement et nous étions étendus autour; quelques-uns commençaient à sommeiller, quand tout à coup trois fusils, placés contre la longère, furent jetés au feu sans que personne eût bougé, et un cri: Aux armes! fut entendu dans toute la maison, sans que nous ayons jamais pu savoir, ni alors, ni depuis, comment ces fusils avaient été jetés au feu et qui avait poussé le cri d'alarme, qui nous fit descendre à la hâte dans la cour où nous restâmes jusqu'au jour[9],[10]. »
— Mémoires de Jean Rohu
Références
- Cadic, t. I, 2003, p. 543-545.
- Guillemot 1859, p. 59-61.
- Chassin, t. I, 1896, p. 385-386.
- Dupuy 2004, p. 171-173.
- Huchet 1998, p. 197-198.
- Huchet 1998, p. 201-202.
- Cadic, t. I, 2003, p. 532-535.
- Cadoudal 1887, p. 68-72.
- Rohu 1999, p. 24-27.
- Huchet 1998, p. 209-211.
- ↑ Savary, t. V, 1827, p. 103-104.
- Puisaye, t. VI, 1808, p. 112-113.
- Savary, t. V, 1827, p. 109.
- Savary, t. V, 1827, p. 106.
- Lécuyer 185, p. 145.
Bibliographie
- François Cadic, Histoire populaire de la chouannerie, t. I, Terre de brume et Presses universitaires de Rennes, coll. « Les Œuvres de François Cadic », , 588 p. (ISBN 978-2843622069).
- Georges de Cadoudal, Georges Cadoudal et la Chouannerie, Plon, , 476 p. (lire en ligne).
- Charles-Louis Chassin, Les pacifications de l'Ouest : 1794-1801, t. I, Paris, Paul Dupont, , 607 p. (lire en ligne).
- Roger Dupuy, La Bretagne sous la Révolution et l’Empire, 1789-1815, éditions Ouest-France université, Rennes, , 350 p. (ISBN 978-2-737-33502-0).
- Patrick Huchet, Georges Cadoudal et les chouans, Éditions Ouest-France, , 367 p. (ISBN 978-2-7373-2283-9).
- Julien Guillemot, Lettres à mes neveux sur la Chouannerie, Imprimerie Félix Masseaux, , 299 p. (lire en ligne).
- Pierre Lécuyer, Jean Jan : lieutenant de Cadoudal, Yves Salmon, , 316 p. (ISBN 978-2307092742).
- Joseph de Puisaye, Mémoires du comte Joseph de Puisaye, qui pourront servir à l'histoire du parti royaliste français durant la dernière révolution, t. VI, Londres, Imprimerie Harper et Co., 1807 et 1808, 684 p. (lire en ligne).
- Jean Rohu, Mémoires autographes, La Découvrance, coll. « Les Inédits de l'Histoire », , 80 p. (ISBN 978-2842650964).
- Jean Julien Michel Savary, Guerres des Vendéens et des Chouans contre la République, t. V, Paris, Baudoin Frères, Libraires-éditeurs, , 419 p. (lire en ligne).
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