hussard noir de la République

Français

Étymologie

(1913)[1] Expression inventée par le poète Charles Péguy (1873-1914) pour évoquer les instituteurs de son enfance dans les années 1880[1][2].
De hussard (en référence aux Hussards Noirs, le 10e régiment de soldats révolutionnaires constitué en 1793 par la jeune République française), de noir (en référence à l'uniforme sombre et austère porté par les enseignants du XIXe siècle en comparaison avec l'uniforme des Hussards Noirs) et de République (en référence à la défense des lois Jules Ferry de 1881 et 1882[1][2].

Locution nominale

SingulierPluriel
hussard noir de la République hussards noirs de la République
(h aspiré)\y.saʁ nwaʁ də la ʁe.py.blik\

hussard noir de la République \y.saʁ nwaʁ də la ʁe.py.blik\ masculin (h aspiré)

  1. (Populaire) (France) Surnom donné a posteriori aux instituteurs de l’instruction publique de la IIIe République française, défendant l’école publique, gratuite, obligatoire et laïque face au clergé et aux monarchistes.
    • Ce sont pourtant ces jeunes normaliens du début des années 1880 qui ont été traités de « hussards noirs de la République » par Charles Péguy (1873-1914) dans les Cahiers de la Quinzaine du 16 février 1913. Il s’agissait des élèves-maîtres qu’il avait vus dans la classe de l’école annexe alors qu’il en était l’un des élèves en 1880. « Nos jeunes maîtres étaient beaux comme des hussards noirs de la République (…) : un long pantalon noir ; un gilet noir ; une longue redingote noire (…). Un bel uniforme porté par ces gamins qui étaient vraiment les enfants de la République. Par ces jeunes hussards de la République (…). Toutes les semaines, il en remontait un de l’École normale vers l’école annexe. »  (Claude Lelièvre, « Au XIXe, il s’agissait avant tout de “faire aimer la République” plutôt que de décliner les “valeurs républicaines” à respecter », Le Monde, 24 octobre 2022)
    • Un normalien vint un jour voir M. Guillaume. Sa redingote bien ajustée, sa casquette à visière, ornée de deux palmes et sa canne lui donnaient fière allure. Il ressemblait vraiment à « ces hussards noirs de la République » dont parle Péguy. Je l’enviai…  (Édouard Bled, Mes écoles, Robert Laffont, 1977, page 66.)
    • Fin août, lors d'un déplacement dans un lycée à Orange, dans le Vaucluse, le président Macron affirmait vouloir « réinventer nos bonnes vieilles écoles normales ». Une déclaration toute politique, convoquant un imaginaire où résonnent à la fois l'excellence de la formation des « hussards noirs » de la IIIe République et la méritocratie. Les instituteurs d'alors étaient des éducateurs du peuple, issus du peuple. Sélectionnés parmi les meilleurs de la classe populaire, ils étaient formés dès le lycée au sein d' « écoles normales » entièrement dédiées et faisaient des stages dans les « écoles d'application » , sous la houlette d'instituteurs aguerris.  (Beyer, Caroline, Bariéty, Aude, Concours et formation des enseignants : le gouvernement veut revoir sa copie, Le Figaro, 20 novembre 2023)
    • Le terrible drame de Conflans-Sainte-Honorine et la passion que mettait Samuel Paty dans l'exercice de son métier ont remis en lumière une expression qui semblait surannée, « les hussards noirs de la République ». On a vite comparé le professeur assassiné, à une version « moderne » de ces hussards.  (Les hussards noirs de la République, Libération Champagne, 24 octobre 2020)
  2. (France) (Par analogie) Surnom donné aux professeurs de l'enseignement public défendant les valeurs de la République française dans les contextes ultérieurs des XXe et XXIe siècle, notamment la qualité de l'enseignement pour tous, la méritocratie et la laïcité.
    • Les écoles normales d’instituteurs ont formé, de 1808 à 1989, ce que l’on appela les hussards noirs de la République. Lorsqu’on sortait de l’école avec le certificat d’études, on écrivait avec une orthographe ciselée, parfois à coups de règle, mais sans faute. On savait lire, écrire et compter. D’abord admirés avant d’être honnis, les hussards noirs de la République ont disparu avec la suppression des écoles normales. Depuis, c’est le grand bazar.  (Marie-France Quenouille, Enseignant. « Voilà qu’on redécouvre les écoles normales », Ouest-France, 4 mai 2024)
    • Enfant, j'ai eu, comme instituteurs, les fameux « hussards noirs » de la République. Ils expliquaient qu'il n'y avait pas de différences de couleur entre les individus. Seul comptait le mérite.  (Bonavita, Marie-Laetitia, Frédéric Hermel : « Français, regardez les joyaux dont vous disposez », Le Figaro, 3 avril 2021)
    • Les enseignants, hussards noirs de la République ou moutons noirs de la laïcité ? Jean-Michel Blanquer tente d'instrumentaliser la défense de la laïcité et la transmission des valeurs de la République au profit d'un combat politique, estime l'ex-ministre de l'Education.  (Najat Vallaud-Belkacem, Tribune. Vallaud-Belkacem répond à Blanquer, Libération, 22 octobre 2021)

Références

  1. 1 2 3 Claude Lelièvre, « Au XIXe, il s’agissait avant tout de “faire aimer la République” plutôt que de décliner les “valeurs républicaines” à respecter », Le Monde, 24 octobre 2022
  2. 1 2 Christophe Migeon, La charge des hussards noirs de la République, Les Cahiers de Science et Vie, 16 octobre 2024

Voir aussi