Yajima Kajiko
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矢嶋 楫子 |
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Yajima Kajiko (矢嶋 楫子, 1833 – June 16, 1925) est la fondatrice du la Société réformatrice féminine et la présidente du chapitre japonaise de la Woman's Christian Temperance Union. Enseignante, pacifiste et militante chrétienne, elle participe activement l'avancement de l'éducation des femmes au Japon. Elle est aussi appelé Kaji Yajima par la presse américaine de l'époque.
Yajima travaille avec Sasaki Toyoju, secrétaire de la WCTU japonaise. Ensemble, elles tentent de promouvoir la réforme des coutumes féodales qui soumettent le Japon à l'Occident et les femmes aux hommes. Yajima, en particulier, prône la tempérance en raison de son bref mariage avec un alcoolique. Toutes deux œuvrent pour l'élimination de la prostitution, ainsi que de la culture des geishas et du concubinage. Tard dans sa vie, Yajima participe à des réunions internationales sur la paix et la tempérance, et rencontre des suffragistes américaines.
Jeunesse
Yajima est née en 1833 à Kumamoto, au Japon. Elle est la sixième enfant et la cinquième fille d'une famille d'agriculteurs influents. Étant une fille plutôt qu'un garçon, ses parents ne s'intéressent guère à elle. Elizabeth Dorn Lublin écrit : « L'idéologie du danson johi (respecter les hommes et mépriser les femmes) qui a influencé cet accueil est restée la force dominante dans les premières années de Yajima. »[1]. Elle reçoit une éducation féminine traditionnelle et ce n'est qu'à l'âge de vingt-cinq ans qu'elle épouse un samouraï nommé Hayashi Shichiro. Hayashi apprécie le saké et devient violent lorsqu'il est ivre. Yajima quitte ensuite son mari et retourne dans sa famille, refusant de revenir et se coupant les cheveux. Elle déménage finalement à Tokyo pour s'occuper de son frère. L'enseignement étant l'un des rares emplois rémunérés accessibles aux femmes de son époque, elle devient enseignante dans le nouveau système scolaire public de Tokyo après son divorce. Elle est ensuite transférée à l'école de la mission presbytérienne, car elle lui procure un revenu deux fois supérieur à celui de son poste dans le système scolaire public. C'est à cette époque qu'elle est attirée par le christianisme et commence finalement à travailler avec une missionnaire presbytérienne du nom de Maria True[2].
Carrière
Enseignement
Kaji Yajima est directrice d'une école missionnaire presbytérienne pour filles à Tokyo, pendant quarante ans[3],[4].
Women’s Christian Temperance Movement
En juin 1886, la missionnaire Mary Clement Leavitt arrive au Japon. Ses conférences, qui font salle comble, incitent Yajima à fonder un syndicat. Fin 1886, Yajima contribue à la création du Tokyo Woman's Christian Temperance Movement (WCTU) avec vingt-huit autres femmes et en est nommée présidente, aux côtés de Sasaki Toyoju, secrétaire[5].
Les violences infligées par son mari et le fait d'être témoin des difficultés des étudiantes dont le père est alcoolique inculquent à Yajima une profonde aversion pour l'alcool et un intérêt pour la tempérance. Elle insiste pour que le mot « tempérance » (kinshu) figure dans le nom de la WCTU de Tokyo, en raison de son passé. Les parcours différents de la secrétaire et de Yajima sont une source de conflit entre les deux. Yajima, plus traditionnelle, estime que la tempérance est le problème le plus important que la WCTU doit résoudre. Elle soutient que les membres doivent « aider leurs maris au foyer [et] aider les hommes en société »[6]. Sasaki, quant à elle, pense que la prostitution doit être au cœur du syndicat, ce qui conduit les deux syndicats à se battre pour le contrôle plutôt que pour la collaboration.
Yajima conserve la présidence jusqu'à ce qu'un accident la force à démissionner en 1889. Trois ans plus tard, elle est réélue et reprend ses fonctions jusqu'en 1903, où elle est à nouveau contrainte de quitter son poste, cette fois faute de voix suffisantes auprès des syndicalistes. Cette situation ne dure que quelques mois, la femme qui la remplace décédant et Yajima prenant sa place. Ce n'est qu'en 1921 que Yajima quitte définitivement la présidence[1]. Elle rédige le journal japonais de tempérance, donne des conférences, mène des manifestations, collecte des fonds et représente le Japon lors de conférences internationales[7],[8].
Profil international
Sa position de leader l'emmène à l'étranger dans ses soixante-dix et quatre-vingts ans[9],[10]. En 1906, elle prend la parole à la convention mondiale de la WCTU à Boston ; lors de ce voyage, elle visite également New York, Philadelphie, Pittsburgh, Chicago et San Francisco[11], et se rend à la Maison Blanche avec d'autres militants de la tempérance pour rencontrer le président Theodore Roosevelt[12]. En 1920, avec ses compatriotes Tsuneko Gauntlett et Michiko Kawai, elle se rend à Londres et à Genève pour des conférences internationales sur la tempérance et le suffrage, respectivement. En 1921, Kaji Yajima se rend à ses propres frais[13] à Washington, DC pour la Conférence pour la limitation des armements, avec son assistant Azuma Moriya. Elle rencontre des suffragistes américaines[14], et le président Warren G. Harding, à qui elle remet une pétition de paix de 300 pieds de long signée par des femmes japonaises[15]. Le prince Tokugawa organise une réception en son honneur lors de la conférence[16]. Lors du même voyage, elle se rend à New York pour s'adresser à la Friends' Foreign Missionary Association[17], au conseil de mission presbytérien et à la Young Women's Christian Association[18].
Sa visite aux États-Unis en 1921 est couverte par de nombreux journaux et magazines américains ; elle en profite pour exprimer ses espoirs de paix mondiale : « Quand je serai partie, souvenez-vous que je me tenais ici, vous regardant droit dans les yeux, exprimant l’espoir que vous ferez tout ce qui est en votre pouvoir, comme le fera ce vieux corps, afin que le monde puisse désormais connaître la paix. Nous sommes arrivés au moment où non seulement nous désirons la paix, mais nous savons que nous devons l’avoir. »[19]. Dans son message aux « femmes chrétiennes d’Amérique », Kaji Yajima assure son auditoire : « Les femmes japonaises veulent l’éducation, pas des cuirassés ni des armées. Elles veulent que le gouvernement dépense de l’argent, non pas pour des établissements militaires, mais pour des écoles. »[9].
Vie personnelle et héritage
Yajima est mariée sans succès et a trois enfants ; elle quitte son mari alcoolique à l'âge de 40 ans et se convertie au christianisme à la quarantaine ; elle est baptisée presbytérienne à l'âge de 45 ans[2]. Elle survit au grand tremblement de terre de Kantō de 1923 et décède en 1925, à l'âge de 93 ans[20],[19].
Après sa mort, le bâtiment abritant les bureaux de la WCTU japonaise est nommé en son honneur[21]. Dans les années 1950, sa biographie est présentée dans la littérature chrétienne américaine comme un récit de second départ et de triomphe sur les obstacles. Son arrière-petit-fils, Yo Yuasa, est un médecin éminent dans le traitement de la lèpre[22]. Sa petite-nièce, la suffragiste Kubushiro Ochimi, est également présidente de la WCTU japonaise[23].
Références
- (en) Elizabeth Dorn Lublin, « Wearing the White Ribbon of Reform and the Banner of Civic Duty: Yajima Kajiko and the Japan Woman's Christian Temperance Union in the Meiji Period », U.S.-Japan Women's Journal 2006, No. 30/31, nos 30/31, , p. 60–79 (JSTOR 42771944)
- (en) « A Little Great Woman: Madam Yajima of Japan », Continent, , p. 1327
- ↑ (en) « Personal Glimpses », Literary Digest,
- ↑ (en) Roberta M. McKinney, « Christian Schools and the New Internationalism in Japan », The Baptist, , p. 45 (lire en ligne).
- ↑ (en) World's Woman's Christian Temperance Union Convention, Minutes of the ... Biennial Convention and Executive Committee Meetings of the World's Woman's Christian Temperance Union, Woman's Temperance Publishing Association, (lire en ligne), p. 154-156
- ↑ (en) Elizabeth Dorn Lublin, Reforming Japan, Hawai'i, University of Hawai'i Press, , p. 52
- ↑ (en) « Anti-Alcohol Movement in the United States Watched Closely in Japan », The Union Signal, , p. 5 (lire en ligne).
- ↑ (en) « Madame Kaji Yajima; A Great Japanese Educator and Peace Worker », Journal of Education, , p. 96 (lire en ligne).
- (en) « A Message to Christian Women of America », Federal Council Bulletin, , p. 121 (lire en ligne).
- ↑ (en) « Some Japanese Letters », Bible Society Record, , p. 67 (lire en ligne).
- ↑ (en) « Praises Tokyo Missions », The Washington Post, , p. 2.
- ↑ (en) « An Honored Visitor from Japan », Woman's Work, , p. 9-11 (lire en ligne).
- ↑ (en) « Caroline Avis », A Messenger of Peace at Ninety, vol. The Woman's Journal, , p. 11 (lire en ligne).
- ↑ (en) Sandra Weber, The Woman Suffrage Statue: A History of Adelaide Johnson's Portrait Monument to Lucretia Mott, Elizabeth Cady Stanton and Susan B. Anthony at the United States Capitol, McFarland, (ISBN 978-1-4766-6346-3, lire en ligne), p. 129
- ↑ (en) « Japanese Women's Peace Plan Three Hundred Feet Long », Popular Mechanics, , p. 2 (lire en ligne).
- ↑ (en) Patricia Ward, Cross currents in the international women's movement, 1848-1948, Bowling Green, OH : Bowling Green State University Popular Press, (ISBN 978-0-87972-781-9 et 978-0-87972-782-6, lire en ligne), p. 144, 175
- ↑ (en) Grace Taintorsly, « An Outside Impression of the Annual Meeting of the Foreign Missionary Association », The Friend, , p. 316 (lire en ligne).
- ↑ (en) « Japanese Woman Delegate », Continent, , p. 1290 (lire en ligne).
- (en) Judy Yoneoka, « A Message from the Goddess of Peace': Analysis of News Articles on a Japanese Woman's Activities at the 1921 Washington Arms Limitation Conference », Intercultural Communication Studies, vol. 22, no 1, , p. 256 (lire en ligne).
- ↑ (en) Gesa Elsbeth Thiessen et Linda Hogan, Ecumenical Ecclesiology: Unity, Diversity and Otherness in a Fragmented World, A&C Black, (ISBN 978-0-567-00913-5, lire en ligne), p. 232
- ↑ (en) « Mrs. J. B. Cobb, Missionary to Japan, Addresses Fourth District WCTU », Atlanta Constitution, , p. 11M.
- ↑ (en) Yo Yuasa, My Family, My Life, and My Work, Sasakawa Memorial Health Foundation, , p. 12
- ↑ (en) Manako Ogawa, « Rescue Work for Japanese Women: The Birth and Development of the Jiaikan Rescue Home and the Missionaries of the Woman's Christian Temperance Union, Japan, 1886-1921 », U.S.-Japan Women's Journal, no 26, , p. 98–133 (ISSN 2330-5037, lire en ligne)
Autres sources
- (en) Yasutake, R., Transnational women's activism: the United States, Japan, and Japanese Immigrant Communities in California, 1859-1920, New York, NYU Press, .
Voir aussi
- Une photographie de Kaji Yajima de 1921, avec des suffragistes américaines ; dans la collection de la National Photo Company à la Bibliothèque du Congrès.
- Une autre photographie de Kaji Yajima de 1921, avec des suffragistes américaines ; dans la collection de la National Photo Company à la Bibliothèque du Congrès.
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