Trésor de Guelma

Trésor de Guelma
Type Monnaie
Inventaire 7 499 monnaies
Matériau Bronze
Période Antiquité romaine (Ier siècle av. J.-C. – IIIe siècle apr. J.-C.)
Culture Rome antique
Date de découverte 1953
Lieu de découverte Guelma (ancienne Calama), Algérie
Conservation Musée national des antiquités et des arts islamiques, Alger

Le trésor de Guelma est un trésor monétaire découvert en 1953 dans la ville de Guelma (ancienne Calama), dans le nord-est de l’Algérie. Il se compose de 7 499 monnaies en bronze datées de la période impériale romaine, et constitue un témoignage précieux de la circulation monétaire dans la région entre le règne d’Auguste et celui de l’impératrice Salonine.

Découverte

Le trésor a été découvert en 1953 à Guelma, lors de travaux de fondation. Des ouvriers mirent au jour un mur romain, des fragments de mosaïque, ainsi qu'un amas de 158 kg de monnaies en bronze, enfouies sans contenant. Considérant l’absence de tout récipient ou dispositif de stockage, Robert Turcan avance l'idée que les monnaies ont été versées en vrac et à la hâte dans une cavité du sol, probablement un ancien puits. De son côté, Raymond Bogaert pense que les monnaies avaient été déposées dans un sac de toile qui s'est entièrement décomposé avec le temps, ne laissant aucune trace visible lors de la découverte. Le site, peu étudié, fut identifié en première analyse comme une villa romaine, le mur ayant peut-être servi de repère pour le propriétaire du dépôt soucieux de le retrouver[1].

La fouille fut dirigée par le conservateur du musée de Guelma, qui en réalisa un premier inventaire. Les monnaies furent ensuite transportées à Musée Stéphane Gsell à Alger et confiées à l’archéologue Robert Turcan, qui en établi le catalogue en 1957. Finalisé en 1958, ce travail ne fut imprimé qu'en 1963, avec le soutien du ministre algérien de l'éducation, dirigé alors par Abderrahmane Benhamida, et publié en 1965[1].

Description

Le trésor comprend un ensemble homogène de monnaies romaines[2] en bronze, couvrant une période d'environ trois siècles, depuis le règne d’Auguste (27 av. J.-C. – 14 apr. J.-C.) jusqu'à celui de Salonine (254 – 268 apr. J.-C.).

Les monnaies sont majoritairement des sesterces (7 486 exemplaires), auxquels s'ajoutent deux dupondius et sept as, ainsi que quelques monnaies indéterminées. Cette composition indique une forte représentation des dénominations de grande taille, utilisées dans les transactions courantes au sein de l'empire romain[3],[4].

Classification des monnaies par valeur
Valeur faciale Nombre Pourcentage Valeur intrinsèque (en as)
Sesterces 7 486 99,8 % 4
Dupondius 2 < 0,1 % 2
As 7 0,1 % 1
Indéterminées quelques exemplaires Inconnue

Les 7 499 monnaies couvrent les règnes d’environ quarante empereurs, de l'époque julio-claudienne à la crise du troisième siècle. Deux règnes se détachent nettement par leur abondance; celui de Sévère Alexandre (1 276 monnaies) et celui de Gordien III (1 428 monnaies). À l'opposé, plusieurs empereurs ne sont représentés que par une seule pièce, comme Auguste, Galba ou Pertinax[3],[4].

Composition du trésor : empereurs représentés, période de règne, type de monnaie et quantité
Empereur / Impératrice Règne Nombre de monnaies Observations
Auguste −27 av. J.-C. – 14 ap. J.-C. 1 as
Galba 68–69 1
Vespasien 69–79 1
Titus 79–81 4
Domitien 81–96 9
Nerva 96–98 4
Trajan 98–117 61
Hadrien 117–138 265 dont 3 as
Sabine vers 117–136 16 Épouse d’Hadrien
Aelius César 136–138 7 César désigné, fils adoptif d'Hadrien
Antonin le Pieux 138–161 346 dont 1 dupondius
Faustine Ire † vers 140 124 Épouse d’Antonin
Marc Aurèle 161–180 374 dont 2 as et 1 dupondius
Faustine II † 175 185 Épouse de Marc Aurèle
Lucius Aurelius Verus 161–169 31 dont 1 as
Lucilla † vers 182 103 Épouse de Lucius Aurelius Verus
Commode 180–192 256
Bruttia Crispina répudiée 188 37 Épouse de Commode
Pertinax 193 1
Didius Julianus 193 1
Manlia Scantilla 193 1 Épouse de Didius Julianus
Didia Clara 193 1 Fille de Didius Julianus
Clodius Albinus 195–197 1 César puis usurpateur
Septime Sévère 193–211 1
Julia Domna † 217 1 Épouse de Septime Sévère
Caracalla 198–217 1 + 1 provincial (Apollonie d’Illyrie)
Geta 209–211 1
Macrin 217–218 2
Diaduménien 218 1 César
Héliogabale 218–222 1
Julia Soaemias † 222 1 Mère de Héliogabale
Julia Paula 219–220 1 Première épouse de Héliogabale
Julia Aquilia Severa 220–222 1 Épouse de Héliogabale
Julia Maesa † 224 1 Grand-mère de Héliogabale
Sévère Alexandre 222–235 1
Orbiane 225–227 1 Épouse de Sévère Alexandre
Julia Mamaea † 235 1 Mère de Sévère Alexandre
Maximin Ier le Thrace 235–238 1
Maximus César 236–238 1 Fils de Maximin Ier le Thrace
Caecilia Paulina † avant 235 5 Épouse de Maximin Ier le Thrace
Gordien Ier 238 5
Gordien II 238 4
Maxime Pupien 238 29
Balbin 238 20
Gordien III 238–244 1 428
Philippe l’Arabe 244–249 714
Philippe II 247–249 149 Fils de Philippe l'Arabe
Marcia Otacilia Severa vers 244–249 160 Épouse de Philippe l'Arabe
Trajan Dèce 249–251 211
Herennia Etruscilla vers 249–251 72 Épouse de Trajan Dèce
Herennius Etruscus 251 23
Hostilien 251 38
Trébonien Galle 251–253 189
Volusien 251–253 141 Fils de Trébonien Galle
Émilien 253 7
Valérien 253–260 63
Mariniane † vers 253 346 Épouse de Valérien
Gallien 253–268 455
Salonine † 268 54 Épouse de Gallien
Inconnus / illisibles 2 Monnaies totalement indéterminables
Revers incertains 873 Voir tableau ci-dessous
Monnayage provincial 2 Caracalla (Apollonie d'Illyrie)
Total général 7 499 Dont 7 486 sesterces, 2 dupondius, 7 as, 2 illisibles et 2 provinciales

Cette concentration sur certains règnes indique probablement des phases de thésaurisation correspondant à des périodes d'instabilité ou de transition politique. Les monnaies plus anciennes ont souvent été conservées en moindre quantité ou éliminées de la circulation par l'usure[4].

L'état de conservation des pièces est très variable. Environ 873 monnaies (soit un peu plus de 10 %) sont jugées illisibles ou difficilement interprétables, en raison de l'usure ou de la corrosion. Toutefois, les monnaies du IIIe siècle sont remarquablement bien conservées, ce qui suggère qu'elles ont moins circulé et ont été enterrées plus tôt après leur émission, donc exposées moins longtemps aux dégradations mécaniques ou climatiques[4].

Détail des 873 revers incertains (attribués à des empereurs mais types mal définis)
Empereur / Impératrice Règne Nombre de monnaies
Hadrien 117–138 259
Marc Aurèle 161–180 167
Antonin le Pieux 138–161 157
Commode 180–192 124
Trajan 98–117 59
Faustine l'Ancienne † vers 140 34
Lucille † vers 182 15
Sabine vers 117–136 10
Faustine la Jeune † 175 10
Domitien 81–96 8
Bruttia Crispina répudiée 188 6
Julia Domna † 217 5
Septime Sévère 193–211 5
Titus 79–81 4
Lucius Aurelius Verus 161–169 4
Galba 68–69 1
Vespasien 69–79 1
Nerva 96–98 1
Total 873

Interprétation historique

La composition du trésor, sa concentration sur certains empereurs et l'excellent état de conservation d'une partie des monnaies suggèrent une thésaurisation volontaire, peut-être en réponse à des incertitudes politiques ou économiques. Le dépôt pourrait être lié à un conflit, à une fuite ou à une tentative de protection de capitaux par un particulier, un commerçant ou un officier romain.

Sa découverte à l'antique Calama[5], ville prospère de la province d'Afrique romaine atteste de l'importance de cette cité dans les réseaux économiques de la région.

Références

  1. Raymond Bogaert, « Robert Turcan, Le Trésor de Guelma : Étude historique et monétaire », L'antiquité classique, Tome 35, fasc. 1,‎ , p. 372-375 (lire en ligne, consulté le )
  2. « Quelle est la monnaie romaine ? », sur bnumis.com (consulté le )
  3. Bastien Pierre, « Robert Turcan, Le trésor de Guelma : Étude historique et monétaire », Revue numismatique, 6e série - Tome 8,‎ , p. 330-333 (lire en ligne, consulté le )
  4. Robert Turcan, Le trésor de Guelma : étude historique et monétaire, Paris, Arts et métiers graphiques, (lire en ligne)
  5. G. Souville, « Calama (Kalama) », Encyclopédie berbère, N°11,‎ , p. 1707-1709 (lire en ligne, consulté le )

Voir aussi

Articles connexes

Lien externe

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