Tarot Sola-Busca
Le tarot Sola-Busca est le plus ancien exemplaire d'un jeu de tarot complet, dont on possède encore toutes les cartes. Comportant 78 cartes (56 cartes réparties en quatre enseignes et 22 atouts), il date de la fin du XVe siècle.
Caractéristiques
Le tarot Sola-Busca est un ensemble complet de 78 cartes, constitué des cartes habituelles du tarot :
- 21 atouts
- Le Mat
- 13 cartes regroupées en quatre enseignes (bâtons, deniers, épées et coupes) : as à dix, valet, cavalier, dame et Roi.
Si la structure des cartes reprend la composition standard du jeu de tarot, les illustrations et les noms des atouts divergent de l'iconographie standard, un trait qu'on retrouve par exemple au XIXe siècle dans les tarots aux enseignes françaises de type Industrie und Glück ou tarot nouveau. À la différence de tarots antérieurs, comme le tarot Visconti-Sforza, toutes les cartes sont numérotées : les atouts en chiffres romains, les autres cartes en chiffres arabes[1]. Les atouts et plusieurs figures portent un nom ; certains sont identifiables à une personnalité historique ou liée à la mythologie gréco-romaine ; beaucoup sont inconnus[2]. En 2012, Laura Paola Gnaccolini émet l'hypothèse que plusieurs cartes sont liées à une tradition hermético-alchimique : le roi d'épée, intitulé Alecxandro M., serait ainsi identifiable à Alexandre le Grand, qui selon une légende médiévale aurait été initié à l'alchimie par son tuteur, Aristote[3]. Le cavalier d'épée, Amone, ferait référence à Zeus Amon, déclaré père mythique d'Alexandre à l'oasis de Siwa ; la reine d'épée, Olimpia, serait Olympias, mère d'Alexandre ; le cavalier de coupe, Natanabo, serait le pharaon égyptien Nectanébo II[3].
Historique
Attribution
Les cartes sont créées et gravées à la fin du XVe siècle par un artiste dont on ne connaît pas l'identité avec certitude ; les cartes ont été attribuées à Nicola di Maestro Antonio d'Ancona, peintre italien actif de 1472 à 1510[3],[2], mais cette identification reste incertaine[1],[4].
Le tarot Sola-Busca est le plus ancien exemplaire complet connu de jeu de tarot. Il s'agit également du plus ancien jeu où toutes les cartes, même les simples enseignes, sont illustrées[5],[6] ; c'est également le plus vieux jeu où les illustrations des atouts dévient de l'iconographie classique du jeu de tarot. Les cartes sont notables non seulement par leur âge, mais aussi par la qualité du dessin, caractérisé par des figures expressives, ainsi que par des contours et des nuances précises[7].
Exemplaires
On connait un unique exemplaire complet du tarot Sola-Busca, peint à la main, conservé à la pinacothèque de Brera à Milan. Il provient de la famille Busca-Serbelloni (it). Au début du XIXe siècle, le jeu est la propriété de la marquise de Busca (née duchesse Serbelloni)[5]. En 1948, il est possédé par la famille Sola-Busca, qui lui donne son nom[5]. En 2009, il est acheté pour 800 000 € par le ministère de la Culture italien et confié à la pinacothèque de Brera[5],[8].
Il existe également 35 cartes individuelles, non peintes. L'Albertina de Vienne en possède 23, dont 20 atouts (ne manquent que le premier et le dernier atout)[9] ; ces atouts appartenaient au comte Moritz von Fries, tandis que les trois autres cartes proviennent de la Bibliothèque impériale autrichienne[10]. Le British Museum en possède quatre, achetées à William et George Smith en 1845[1]. Quatre autres sont dans la collection du Petit Palais à Paris[11]. Les quatre dernières sont conservées à Hambourg[1].
Recherche
En 1938, Arthur Mayger Hind décrit le tarot Sola-Busca dans Early Italian Engravings ; il émet l'hypothèse que les cartes ont été gravées vers 1490 et peintes en 1491. Il propose également qu'elles sont la création Mattia Serrati da Cosandola, un miniaturiste basé à Ferrare (le centre de la production de cartes de tarot à l'époque) pour un client vénitien[12].
En 1987, dans le cadre du catalogue de l'exposition de tarots au château d'Este à Ferrare, l'historien italien Giordano Berti (it) rédige un résumé des recherches effectuées jusqu'à cette date par différents chercheurs[13].
En 1995, la chercheure italienne Sofia Di Vincenzo, dans Antichi Tarocchi illuminati. L'alchimia nei Tarocchi Sola-Busca, soutient que l'iconographie du tarot Sola-Busca fait référence aux thèmes alchimiques de la Renaissance[14].
En 2012, la pinacothèque de Brera organise l'exposition Il Segreto dei Segreti - I Tarocchi Sola Busca e la cultura ermetico-alchemica. Le catalogue identifie un possible auteur (Nicola di Maestro Antonio d'Ancona), un possible inspirateur (l'hermétiste Ludovico Lazzarelli), une année et un lieu de création (Venise en 1491)[3].
Influence ultérieure
Les similarités entre les arcanes mineurs (en) du tarot Waite-Smith, publié en 1909, et les cartes du tarot Sola-Busca ont conduit certains à supposer que l'illustratrice Pamela Colman-Smith s'en est inspiré[6]. En 1907, la famille Busca-Serbelloni fait don au British Museum de photographies en noir et blanc des 78 cartes en sa possession[15] ; il est possible que Smith les ait aperçues lors d'une exposition.
Galerie
Atouts
-
0 – Mato
-
I – Panfilio
-
II – Postumio
-
III – Lenpio
-
IIII – Mario
-
V – Catulo
-
VI – Sesto
-
VII – Deo Tauro
-
VIII – Nerone
-
VIIII – Falco
-
X – Venturio
-
XI – Tulio
-
XII – Carbone
-
XIII – Catone
-
XIIII – Bocho
-
XV – Metelo
-
XVI – Olivo
-
XVII – Ipeo
-
XVIII – Lentulo
-
XVIIII – Sabino
-
XX – Nenbroto
-
XXI – Nabuchodenasor
-
As de bâton
-
Deux de bâton
-
Trois de bâton
-
Quatre de bâton
-
Cinq de bâton
-
Six de bâton
-
Sept de bâton
-
Huit de bâton
-
Neuf de bâton
-
Dix de bâton
-
Valet de bâton
-
Cavalier de bâton
-
Dame de bâton
-
Roi de bâton
-
As de coupe
-
Deux de coupe
-
Trois de coupe
-
Quatre de coupe
-
Cinq de coupe
-
Six de coupe
-
Sept de coupe
-
Huit de coupe
-
Neuf de coupe
-
Dix de coupe
-
Valet de coupe
-
Cavalier de coupe
-
Dame de coupe
-
Roi de coupe
-
As de denier
-
Deux de denier
-
Trois de denier
-
Quatre de denier
-
Cinq de denier
-
Six de denier
-
Sept de denier
-
Huit de denier
-
Neuf de denier
-
Dix de denier
-
Valet de denier
-
Cavalier de denier
-
Dame de denier
-
Roi de denier
-
As d'épée
-
Deux d'épée
-
Trois d'épée
-
Quatre d'épée
-
Cinq d'épée
-
Six d'épée
-
Sept d'épée
-
Huit d'épée
-
Neuf d'épée
-
Dix d'épée
-
Valet d'épée
-
Cavalier d'épée
-
Dame d'épée
-
Roi d'épée
Bibliographie
- Thierry Depaulis, « Les tarots Sola-Busca à la Brera », Nouvelles de l'estampe, no 242, , p. 48-50 (DOI 10.4000/estampe.915)
- (it) Laura Paola Gnaccolilini (éditrice), Il segreto dei segreti : I tarocchi Sola Busca e la cultura ermetico-alchemica tra Marche e Veneto alla fine del Quattrocento, Milan, Skira, (ISBN 978-88-572-1764-2)
- (en) Stuart Kaplan, Encyclopedia of Tarot, vol. 3, U.S. Games Systems, (ISBN 0880791225)
Références
- (en) « Print », British Museum (consulté le )
- Depaulis 2013
- Gnaccolilini 2012
- ↑ (en) Francesca Bezzone, « Mystery and history of art merge together in the Sola Busca tarots », L'Italo-Americano, (consulté le )
- (en) Giordano Berti, « History of Sola-Busca Tarot », Sola-Busca Tarot Mayer 1998, (consulté le )
- Kaplan 1990, p. 30
- ↑ (en) Mark J. Zucker, « The Master of the 'Sola-Busca Tarocchi' and the Rediscovery of Some Ferrarese Engravings of the Fifteenth Century », Artibus et Historiae, vol. 18, no 35, , p. 181–194 (DOI 10.2307/1483546)
- ↑ (it) Pierluigi Panza, « I tarocchi per rilanciare Brera » [archive du ], Corriere della Sera,
- ↑ Kaplan 1990, p. 297
- ↑ (en) William Hughes Willshire, A Descriptive Catalogue of Playing and Other Cards in the British Museum, Chiswick Press, , p. 77–78
- ↑ « Recherche dans les collections - Nicola di Maestro Antonio d'Ancona », Paris Musées (consulté le )
- ↑ (en) Arthur Hind, Early Italian Engravings, , p. 241-247, 370-393
- ↑ (it) Giordano Berti, Le Carte di Corte. Gioco e Magia alla Corte degli Estensi, Bologne, Nuova Alfa Editoriale, (ISBN 88-7779-016-4), p. 88-91
- ↑ (it) Sofia Di Vincenzo, Antichi Tarocchi illuminati. L'alchimia nei Tarocchi Sola-Busca, Turin, Lo scarabeo,
- ↑ (en) Giordano Berti, « Sola-Busca & Waite-Smith Tarot », Sola-Busca Tarot Mayer 1998, (consulté le )
- Portail des jeux