Pierre-Alexandre Monsigny

Pierre-Alexandre Monsigny
Portrait de Robert Lefèvre en 1813.

Naissance
Fauquembergues
Décès (à 87 ans)
Paris 5e
Activité principale Compositeur
Style
Opéra
Distinctions honorifiques Chevalier de la Légion d'honneur
Académie des beaux-arts

Pierre-Alexandre Monsigny né le à Fauquembergues et mort le à Paris 5e, est un compositeur français.

Par sa musique pleine d'esprit, de fraîcheur et de charme parfois naïf, il parvient à structurer ce qui n'était qu'un compromis entre la comédie et l'opéra. Il se révèle alors comme le principal précurseur, avec André Grétry et François-André Philidor, d'un genre nouveau : l'opéra-comique.

Il ouvre ainsi la voie à Boïeldieu, Auber, Gounod, Bizet, Massenet… à tous ceux qui, par leur talent de compositeur, sont parvenus à illustrer avec succès ce genre bien français.

Membre de l'Académie des beaux-arts (), son nom figure avec son buste sur la façade est de l'Opéra Garnier à Paris.

Biographie

Monsigny est né quatre mois avant l'union légitimée de ses parents, Marie-Antoinette Dufresne et Nicolas Monsigny[1], d’une famille installée en Artois au XVIe siècle[a].

Frappé de son intelligence précoce, son père, qui lui avait acheté un petit violon à la foire de Fauquembergues[3], l’envoie au collège des Jésuites de Saint-Omer où il découvre, outre l'enseignement rigoureux habituel, les rudiments du solfège, aidé en cela par un don évident remarqué par le patron de son père, un riche bourgeois cultivé qui lui fait partager les leçons de musique données à ses enfants par le carillonneur de l'abbaye Saint-Bertin. Il se perfectionne dans ce qui deviendra son art : la musique devient une idée fixe qui n'est peut-être pas du gout de son père, qui mourra en 1748, le laissant, à dix-neuf ans, chef d'une famille nombreuse comprenant sa mère, sa sœur et quatre jeunes frères, qui n’avait plus à compter que sur lui et n'avait que lui pour soutien. Porté par un attrait invincible vers l'étude de la musique, il répète sans cesse : « Si j'allais à Paris, j'y ferais fortune. »

En octobre 1749, sur les conseils de sa famille et de ses amis, il monte à Paris, avec pour tout bagage quelques écus en poche, son violon, et une lettre de recommandation pour M. Couette d'Aubonne, financier, rue du Harlay. Entré chez M. de Saint-Julien, dans les bureaux de la comptabilité du Clergé de France, il gagne alors suffisamment d'argent pour subvenir aux besoins de ses proches. La capitale lui offre, de srcroit, la possibilité de stimuler davantage sa passion pour la musique. Au cours de l'année , à l'issue d'une représentation de La serva padrona de Pergolèse à l'Opéra, il ne contient pas son enthousiasme. Cet ouvrage décide de sa vocation. Audacieux, il veut tenter un changement profond dans l'art musical de son époque. Il devient l'élève de Gianotti, contrebassiste à l'Opéra et au Concert spirituel, auteur de sonates, de duos et même d'un Guide de composition[4]. Cinq mois de leçons suffisent pour que ses dispositions lui permettent de mettre cet enseignement en application.

Quoique peu occupé par ses travaux financiers, il compose en secret, sur un livret de La Ribadière, son premier opéra-comique, dans le dessein de s’exercer à trouver les moyens d’introduire plus de chant dans la musique, plus d’expression dans le chant[2]:40. Présenté au théâtre de la Foire Saint-Germain, le , Les Aveux indiscrets remporte un accueil chaleureux, ce qui l'encourage à en composer un second, en deux actes, sur un texte de Pierre-René Lemonnier. Le Maître en droit connait, l'année suivante, les mêmes ovations, le à la Foire Saint-Germain[2]:43.

À la suite du succès du Cadi dupé, le librettiste à la mode, Michel-Jean Sedaine, lui propose sa collaboration. Leur production commune se révèle des plus heureuses : On ne s'avise jamais de tout, Le Roi et le fermier, Rose et Colas remportent tous trois un grand succès. On ne s'avise jamais de tout figurera à la représentation inaugurale de la nouvelle troupe de la Comédie-Italienne agrandie issue de la réunion de l'Opéra-Comique de la Foire Saint-Laurent et du Théâtre-Italien[5], à l’Hôtel de Bourgogne, le 3 février 1762[6], à la suite de quoi Monsigny travaillera désormais pour ce théâtre[7].

Le , à l'Académie royale de Musique son ballet héroïque en trois actes Aline, reine de Golconde ne suscite qu'un accueil réservé. La critique se montre plus froide encore, deux années plus tard, lors de sa création de L'Île sonnante. La musique conserve sa grâce habituelle de la « patte » élégante et légère de Monsigny, mais le livret de Charles Collé se révèle inadapté et justifie du passage éphémère de l'œuvre à l'affiche de la Comédie-Italienne[2]:117.

En 1768, il acquiert la charge de maître d'hôtel au service du duc d'Orléans. Sedaine lui soumet alors le livret du Déserteur sur lequel il compose la partition qui a fait sa gloire[2]:117, mais Le Faucon, créé en est maal reçu à la cour puis à Paris, essentiellement à cause du livret de Sedaine[2]:117, et, le , La Belle Arsène après des critiques mitigées, a conservé pendant longtemps, avec sa place importante au répertoire, toute la faveur et la sympathie du public, qui ne se lassait pas de l’entendre et de l’applaudir[2]:174.

Monsigny composait péniblement. Ayant mis trois ans avant de faire paraitre le Faucon, la belle Arsène n’a été donnée qu’en 1775, mais suivie de près par te Rendez-vous bien employé (1776). En 1777, parait un nouveau chef-d’œuvre : Félix ou l’enfant trouvé, comédie en trois actes, mêlée d’ariettes, représentée le , devant la cour, à Fontainebleau, et le 24 aux Italiens. Après le succès de Félix, Monsigny, âgé de quarante-huit ans et dans toute la force de son talent, cesse toute composition. L’auteur de la Biographie universelle des musiciens, François-Joseph Fétis, qui a connu Monsigny, lui ayant demandé, en 1810, c’est-à-dire 33 ans après la représentation de Félix, pour quelle raison il avait cessé de composer, en a reçu cette réponse : « Depuis le jour où j’ai achevé la partition de Félix, la musique a été comme morte pour moi : il ne m’est plus resté une idée[7]:60. »

Privé, depuis 1785, par la mort du duc d’Orléans, de sa charge de maitre d’hôtel, Monsigny était devenu, depuis cette date, administrateur des biens de la famille d’Orléans et inspecteur des canaux, ce qui lui avait permis de conserver son logement au Palais-Royal pour lui et pour sa famille. À la Révolution, obligé de quiller ses appartements, il perd toutes ses ressources, sa place dans la maison d’Orléans, et même une pension de 2 000 livres, qui lui avait été faite par Louis XV et continuée par Louis XVI. Retiré, avec sa femme, Amélie de Villemagne, épousée, le , dans une modeste maison au 162 rue du Faubourg-Saint-Martin, il vivait petitement au milieu des siens et venait encore de temps en temps à la Comédie-Italienne. Apprenant l'état de pauvreté du compositeur, les sociétaires de l'Opéra-Comique prouvent leur reconnaissance à l'égard d'un des fondateurs de leur théâtre, en lui versant une rente de 2 400 livres, en lui faisant signer un contrat par lequel il leur cédait ses droits d’auteur sur tous ses ouvrages[7]:62.

La tourmente révolutionnaire apaisée, on lui rend sa pension et on lui confie une des cinq places d’inspecteur de l'enseignement au Conservatoire de Musique de Paris, aux appointements de 6 000 franscs mais, malgré les efforts de Sarrette, le directeur du Conservatoire, il s’est démis de ces dernières fonctions, prétextant qu’il n’était pas assez savant pour remplir un tel emploi et qu’il faisait tort à la science et à l’établissement[7]:62. En 1804, il est fait chevalier de la Légion d'honneur, Napoléon triple sa pension en apprenant qu’il est encore vivant, après avoir entendu le Déserteur[7]:62, et il succède en à Grétry à l'Académie des beaux-arts. Une cécité totale afflige ses dernières années.

À sa mort, dans sa maison d faubourg-Saint-Martin, Monsigny laisse le souvenir d'un homme modeste, courtois « aux manières simples et élégantes » plein d'une sensibilité qui transparaît tout au long de ses douze œuvres principales. Inhumé au cimetière du Père-Lachaise, ses ossements ont été exhumés en 1827[8].

Hommages

Le théâtre Monsigny de Boulogne-sur-Mer a été nommé d’après lui.

Jugements

« De tous les compositeurs de notre pays, il est peut-être le premier qui ait eu le don de l’émotion vraie, humaine, de l’expression communicative et du sentiment juste…[9] »

— Paul Dukas

Œuvres

Notes et références

Notes

  1. Un ancêtre, Marc di Mancini, aurait quitté la Sardaigne pour les Pays-Bas espagnols, à la suite d'un duel. Le nom s'est francisé en Monsigny sous Louis XIV. Leur notoriété et leur fortune déclinant peu à peu, bien avant la Révolution, ils abandonnent leur blason et leur particule[2].

Références

  1. Paule Druilhe, Monsigny : sa vie et son œuvre, Paris, Vieux Colombier, , 125 p. (OCLC 55582519, lire en ligne), p. 17.
  2. Arthur Pougin, Monsigny et son temps : l’Opéra-comique et la comédie-italienne, les auteurs, les compositeurs, les chanteurs, Paris, Fischbacher, , 254 p., illustr., portr., 2 pls. ; in-8º (OCLC 1464800, lire en ligne), p. 29-30.
  3. Henri Piers, « Monsigny », dans Biographie de la ville de Saint-Omer, Saint-Omer, J.-B. Lemaire, , viii-283 p., pl., portr. ; 21 cm (OCLC 664612412, lire en ligne), p. 141.
  4. Adolphe Boschot, « Monsigny », dans Chez les musiciens : du XVIIIe siècle à nos jours, Plon-Nourrit, , 285 p., in-16 (OCLC 4178284, lire en ligne), p. 36.
  5. Nicole Wild et David Charlton, Théâtre de l’Opéra-Comique Paris : répertoire 1762–1972, Sprimont, Mardaga, , 552 p. (lire en ligne), p. 165.
  6. (en) Clarence D. Brenner, The Theatre Italien : Its Repertory, 1716–1793, Berkeley, University of California Press, , vii-531 p., 24 cm (OCLC 2167834, lire en ligne), p. 256.
  7. A. Hannedouche, Les Musiciens et compositeurs français : précédés d’un Essai sur l’histoire de la musique en France avant le XVIIe siècle, Paris, Lecène, Oudin et Cie, , 238 p., in-8º (OCLC 21686604, lire en ligne), p. 59.
  8. « Tes tombes effacées », L'Homme libre,‎ , p. 3 (ISSN 2419-0241, lire en ligne sur Gallica, consulté le ).
  9. Paul Dukas, Les Écrits de Paul Dukas sur la musique, Paris, Société d’éditions Françaises et Internationales, coll. « Musique et musiciens », , 691 p., in-16 (OCLC 1387305, lire en ligne), p. 122.

Bibliographie

  • Theodore Baker et Nicolas Slonimsky (trad. Marie-Stella Pâris, préf. Nicolas Slonimsky), Dictionnaire biographique des musiciens [« Baker's Biographical Dictionary of Musicians »], t. 2 : H-O, Paris, Robert Laffont, coll. « Bouquins », (réimpr. 1905, 1919, 1940, 1958, 1978), 8e éd. (1re éd. 1900), 4 728 p. (ISBN 2-221-06787-8), p. 2 826
  • Joann Élart, Frédéric Guérin et Patrick Taïeb, « Fortune et prospérité de l’œuvre de Sedaine et Monsigny (1764-1862) : l’exemple de Rose et Colas », in Judith le Blanc, Raphaëlle Legrand et Marie-Cécile Schang-Norbelly (dir.), Une œuvre en dialogue : le théâtre de Michel-Jean Sedaine, Paris, Sorbonne Université Presses, collection « e-Theatrum Mundi », 2021, p. 273-310 [en ligne].
  • Joann Élart, « Monsigny des Romantiques », Dezède,‎ (ISSN 2269-9473, lire en ligne)
    Ce dossier propose de suivre entre 1853 et 1872 la production tardive de deux œuvres de Monsigny inscrites au patrimoine de l’Opéra-Comique, Rose et Colas et Le Déserteur.

Liens externes

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