Pensées philosophiques

Pensées philosophiques

Édition princeps

Auteur Denis Diderot
Pays France
Genre Essai
Éditeur s.n. (en fait Laurent Durand)
Lieu de parution La Haye (en fait Paris)
Date de parution 1746
Chronologie

Le livre Pensées philosophiques est un recueil de réflexions et brefs essais que Denis Diderot publia en 1746 ; c'est sa première œuvre personnelle, mais publiée anonymement et clandestinement. Diderot l'aurait composée sur les instances de sa maîtresse Mme de Puisieux. En 1762, lors d'une nouvelle édition, il y fera une addition dont l'esprit est beaucoup plus radical.

Analyse

Par son titre, cet ouvrage évoque à la fois les Pensées de Pascal et les Lettres philosophiques de Voltaire, deux œuvres antithétiques.

L'ouvrage compte 62 réflexions où l'auteur fait dialoguer tour à tour le déiste, l'athée et le sceptique. Au début, Diderot prend la défense des passions alors que l'esprit janséniste ne cessait pas d'en montrer les dangers et invitait à mortifier la chair. L'athée conteste l'existence de Dieu car celle-ci est incompatible avec l'existence du mal et il propose une explication purement matérialiste de la formation du monde en invoquant notamment le calcul des probabilités. Le sceptique fait une critique méthodique des manifestations hystériques des convulsionnaires qui avaient justement été très actifs dans son quartier[1]. Loin du dogmatisme, « Diderot livre une réflexion en cours d'élaboration, où les questions importent plus que les réponsesz[2]. »

Édition et réception

L'ouvrage est publié en juin 1746 avec une adresse fictive (La Haye). C'est en fait l'éditeur parisien Laurent Durand, alors établi rue Saint-Jacques, qui l'édite clandestinement.

La page de titre porte en épigraphe l'inscription latine « Piscis hic non est omnium » : Ce poisson-là n’est pas pour tout le monde. Cette expression est empruntée au Pygmalion (1741) d'André-François Boureau-Deslandes, qui l'a lui-même forgée d'après un passage des Saturnales de Macrobe (3, 16, 4). Diderot la reprendra dans une lettre à Sophie Volland du . Cette phrase montre que l’auteur a bien conscience d’y tenir des propos qui vont déranger la vision établie de la religion. L’ouvrage est d’ailleurs publié anonymement, soi-disant à La Haye.

Ce livre connut un succès retentissant et il est condamné dès le par un arrêt du parlement de Paris à « être lacéré et brûlé comme scandaleux, contraire à la religion et aux bonnes mœurs et présentant aux esprits inquiets et téméraires le venin des opinions les plus criminelles et les plus absurdes dont la dépravation de la raison humaine soit capable[3]. »

Notes

  1. Curran 2019, p. 69.
  2. Trousson 2005, p. 90.
  3. Trousson 2005, p. 91.

Bibliographie

Éditions du texte

Études

  • Douglas G. Creighton, « A Genevan Reaction to Diderot’s Pensées philosophiques: Jacques-Francois de Luc », City and Society in the 18th Century, Toronto, Hakkert, 1973, p. 259-80.
  • (en) Lester G. Crocker, « Pensée XIX of Diderot », Modern Language Notes, Nov 1952, n° 67 (7), p. 433-39.
  • (en) Andrew S. Curran, Diderot and the art of thinking freely, New York, Other Press,
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  • R. Morin, Les Pensées philosophiques de Diderot, devant leurs principaux contradicteurs au XVIIIe siècle, Paris, Belles Lettres, 1975.
  • Roland Mortier, « À propos de la source de l’Addition aux Pensées philosophiques de Diderot », Revue d’Histoire Littéraire de la France, 1967, n° 67, p. 609-612.
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  • Robert Niklaus, « Les Pensées philosophiques de Diderot et les Pensées de Pascal », Diderot Studies, 1981, n° 20, p. 201-217.
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  • Raymond Trousson, « Michel-Ange Marin et les Pensées philosophiques », Recherches sur Diderot et sur l’Encyclopédie, 1992 Oct, n° 13, p. 47-55.
  • Raymond Trousson, Denis Diderot ou le vrai Prométhée, Paris, Tallandier,
  • Jerome Vercruysse, « Recherches bibliographiques sur les Pensées philosophiques de Diderot », Dix-Huitième Siècle, 1972, n° 4, p. 374-78.

Liens externes

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