Naviforme

Un naviforme, anciennement dénommé naveta d'habitation, est un type d'habitat préhistorique des Îles Baléares daté l'Âge du bronze.

Étymologie

Les constructions « naviformes », appelées antérieurement « navettes d'habitat »[Note 1] ou « navetiformes », ne sont pas des navetes : la confusion avec les navetes a perduré jusqu'aux fouilles de Maria LLuïsa Serra dans les années 1960 démontrant qu'il s'agissait de maisons[1]. Pour éviter toute confusion, la dénomination antérieurement utilisée (« naveta de habitación ») est désormais abandonnée et a été remplacée par celle de naviforme. Les deux types d'édifice correspondent à des usages différents, une naveta a un usage uniquement funéraire alors qu'un naviforme désigne une maison, et à des époques différentes, les navetes datent de la période talayotique alors que les naviformes datent d'une période pré-talayotique désignée d'ailleurs sous le nom de Naviforme.

Architecture

Les naviformes sont de grands édifices de 16 à 25 m de longueur sur 5 à 7 m de largeur, leur hauteur atteignant environ 3 m sur les structures les mieux conservées (Can Roig Nou, Son Mercer de Baix)[2],[3]. Pour autant, ils ne peuvent pas être considérés comme des monuments mégalithiques car ils sont principalement construits avec des pierres de taille moyenne ou petite[4].

Les naviformes sont des édifices allongés, en forme de « U », avec une partie antérieure en forme d'abside pointue ou arrondie, construits sans fondations, directement sur le sol préalablement nivelé[5], en pierre sèche[2],[3]. La première rangée de pierres du mur extérieur est à moitié enterrée et montée en appareil cyclopéen avec de grands orthostates polygonaux, les rangées suivantes sont constituées de pierres de plus en plus petites[5]. Le mur intérieur est constitué de petites pierres plus finement travaillées[3]. Les murs extérieurs et intérieurs sont inclinés de manière que l'épaisseur de l'ensemble diminue avec la hauteur, mais à la base l'épaisseur des murs est de 2 à 3 m. Entre le mur extérieur et le mur intérieur l'espace qui demeure est comblé avec un remblai constitué de moellons de tailles variées[5]. L'ensemble de la structure est extrêmement résistant[2],[3],[5]. Les constructions étaient recouvertes avec un toit composé d'un assemblage de poutres en bois, de branches et d'une couche d'argile et de petites pierres[1],[5]. comme à Es Closos de Can Gayà[6].

La plupart des naviformes minorquins ne comportent qu'une pièce unique à la différence naviformes mallorquins[7]. Le sol des embrasures de portes et de la partie antérieure de la salle intérieure est parfois dallé. L’aménagement intérieur se limite le plus souvent à un foyer central de forme quadrangulaire, construit avec de petites dalles (Caparrot de Forma) ou délimité par des bancs de pierre de faible hauteur (Cala Morell) mais il peut aussi être complété selon les cas par des bases de colonnes, des contreforts, des appuis de fenêtres, des cloisons internes[5]. Les constructions naviformes sont le plus souvent individualisées (Alemany, Cala Blanca) ou disposées en petits groupes (Cala Morell, S'Hospitalet Vell, Es Closos de Can Gayà) parfois accolées les unes aux autres[3],[5].

Mobilier archéologique

281 structures de ce type sont recensées sur les îles de Minorque, Majorque et Formentera[8]mais seule une vingtaine ont été fouillées de manière rigoureuse et bien documentée[5].

La fonction domestique des constructions naviformes est déduite du matériel archéologique qui y a été découvert. La céramique recueillie correspond à des récipients nécessaires à la conservation, la cuisson et la consommation des aliments. Une conclusion similaire s'impose pour les objets osseux, lithiques ou métalliques découverts. L'espace intérieur est aménagé avec des foyers et des bancs[5]. Quelques édifices ont livré des ossements humains, correspondant à une ré-utilisation ultérieure opportuniste du bâtiment comme site funéraire et dans plusieurs cas, les constructions ont été adossées à des grottes artificielles utilisées à des fins funéraires[4].

Datation

Les naviformes furent utilisés principalement durant l'Âge du bronze mais leur occupation s'est parfois poursuivie durant l'Âge du fer. L'étude du naviforme n°1 d'Es Closos indique qu'il fut occupé de manière continue entre 600 et 900 ans[2] tout en bénéficiant de modifications dans son aménagement[3]. La construction d'un naviforme et son occupation par un groupe social devait constituer un élément central de la formation de ce groupe et de son identité en lien avec l'occupation d'un territoire donné tout en le reliant à ses ancêtres[2]. A contrario, l'abandon de ce type d'habitat correspond à l'apparition de communautés plus grandes où l'individu commence à se différencier de la communauté[2],[3].

Les naviformes ont donné leur nom à la période Naviforme (1600 - 1050 av. J.-C.)[1].

Notes et références

Notes

  1. Par opposition, on dénommait alors « navettes d'enterrement » les navetes.

Références

(es) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en espagnol intitulé « Naviforme » (voir la liste des auteurs).
  1. Sintes Olives 2015.
  2. Fornés Bisquerra et al. 2009.
  3. Javaloyas Molina et al. 2011.
  4. Costa 2008.
  5. Salvà Simonet et Hernández-Gasch 2009.
  6. Javaloyas, Joan Fornés et Salvà, « Breve aproximación al conocimiento del yacimiento de Closos de Can Gaia. », V. Guerrero (coord. i ed.) Prehistoria de las islas Baleares. Registro arqueológico y evolución social antes de la Edad del Hierro, BAR International Series 1690,‎ , p. 352-360
  7. Montserrat Anglada, « Dating prehistoric fortified coastals sities in the balearic islands », Radiocarbon,‎
  8. P. Sureda, « El poblado naviforme de Cap de Barberia II (Formentera, I. Balears). Nuevos datos sobre su cronologia y secuencia de ocupación », Trabajos de Prehistoria vol. 74,‎

Voir aussi

Bibliographie

  • Laurent-Jacques Costa, Mégalithismes insulaires en Méditerranée, Errance, coll. « Collection des hespérides », , 128 p. (ISBN 9782877723770), p. 86-88
  • (es) Joan Fornés Bisquerra, David Javaloyas Molina, Bartomeu Salvà Simonet, Caterina Belenguer Arias, Francesc Matas Gallardo, Gabriel Ángel Servera Vives et Llorenç Oliver Servera, « Más que una casa. Los navetiformes de la Edad del bronce balear », dans Maria Carme Belarte, L’espai domèstic i l’organització de la societat a la protohistòria de la Mediterrània occidental (Ier millenni aC) : actes de la IV Reunió internacional d'Arqueologia de Calafell (Calafell-Tarragona, 6 al 9 de març de 2007), Barcelona, Universitat de Barcelona, (ISBN 978-84-936769-1-9, [1]), p. 323–330
  • (ca) David Javaloyas Molina, Joan Fornés Bisquerra, Bartomeu Salvà Simonet, Llorenç Oliver Servera et Gabriel Servera Vives, « Concepcions espacials a l'edat del bronze. Els navetiformes : entre l'espai public i el privat », dans III Jornades d'Arquelogia de les Illes Balears, Maó, Conseil Insular de Menorca, coll. « Llibres del Patrimoni Históric i Cultural », , 280 p. (ISBN 9788493707385, lire en ligne), p. 23-34
  • Elena Sintes Olives, Guide Minorque talayotique : La Préhistoire de l' île, Sant Lluis, Triangle, , 319 p. (ISBN 9788484786405), p. 63-64

Articles connexes

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