Mouvement des non-alignés

Mouvement des non-alignés
Pays appartenant au mouvement des non-alignés :
  • États membres
  • États observateurs
  • États non membres
Situation
Création (Belgrade), mais aussi (Panchsheel), (Bandung), (Brioni) et (Alger)
Siège Localisation du dernier sommet : Porlamar (depuis 2016) ; New York (G24 ou G77 et Chine à l'ONU) ; G15[pas clair]
Organisation
Membres 120 États plus 17 observateurs
Secrétaire général Yoweri Museveni

Site web Nam-CSSTC

Le mouvement des non-alignés (ou plus rarement mouvement des pays non alignés)[1] est une organisation internationale regroupant 120 États en 2012[2], qui se définissent comme n'étant alignés ni avec ni contre aucune grande puissance mondiale (17 États et 9 organisations internationales y ont en plus le statut d'observateur). En effet ce mouvement, né durant la guerre froide, visait à regrouper les États qui ne se considéraient comme alignés ni sur le bloc de l'Est ni sur le bloc de l'Ouest.

Le but de l'organisation défini dans la « déclaration de La Havane » de 1979 est d'assurer « l'indépendance nationale, la souveraineté, l'intégrité territoriale et la sécurité des pays non alignés dans leur lutte contre l'impérialisme, le colonialisme, le néocolonialisme, la ségrégation, le racisme, et toute forme d'agression étrangère, d'occupation, de domination, d'interférence ou d'hégémonie de la part de grandes puissances ou de blocs politiques » et de promouvoir la solidarité entre les peuples du tiers monde. L'organisation, dont le siège est à Lusaka en Zambie[3], regroupe près des deux tiers des membres des Nations unies et 55 % de la population mondiale.

Le mouvement des non-alignés comprend plusieurs membres assez importants à l'échelle mondiale, comme l'Indonésie, l'Inde, l'Afrique du Sud, l'Iran, ainsi qu'autrefois la Yougoslavie. Le Brésil n'a jamais été un membre officiel du mouvement, mais il partage plusieurs de ses vues et envoie régulièrement des observateurs à ses sommets. La république populaire de Chine fait également partie des pays observateurs[2].

Origines

La déclaration de Brioni du , proposée par Gamal Abdel Nasser, Josip Broz Tito, Soekarno et Jawaharlal Nehru, marque l'origine du mouvement, qui vise alors, dans le contexte de la guerre froide, à se protéger de l'influence des États-Unis et de l'URSS qui cherchaient à rallier le monde à leur cause (idée de bipolarisation : les deux grands qui gouvernent le monde).

Le terme de « non-alignement » a été inventé par le Premier ministre indien Nehru lors d'un discours en 1954 dans la ville indienne de Colombo. Dans ce discours, Nehru a décrit les cinq piliers à utiliser pour les relations sino-indiennes, qui ont été pour la première fois mises en avant par le Premier ministre chinois Zhou Enlai. Appelés Panchsheel (les « cinq principes »), ces principes servent plus tard de base au mouvement des non-alignés.

On peut considérer que la conférence de Bandung, tenue en 1955 dans la ville indonésienne de Bandung dans l'Ouest de l'île de Java, qui avait réuni une trentaine de pays d'Afrique et d'Asie, est une étape importante vers la constitution du mouvement des non-alignés.

Industrialisation

Le "Mouvement des non-alignés" a aussi pour objectif de promouvoir une industrialisation moins dépendante des technologies et des stratégies du Bloc de l'Est, ce dernier s'opposant à plusieurs grands projets industriels de pays qui vont à ce sujet s'opposer à Moscou.

La Roumanie est l'un des premiers à se lancer dans cette voie dès 1958, de manière symbolique et très suivie par les milieux industriels, par le biais d'un projet de site sidérurgique géant, le combinat de Galati, qui sera ensuite érigé à partir du début des années 1960 avec des techniciens et de la technologie étrangère, avec en particulier un laminoir automatisé par le Français Jeumont-Schneider[4]. Le site emploiera la décennie suivante, avec ses hauts fourneaux, 40000 personnes, et facilitant l'approvisionnement du Chantier naval de Galați mais allant à l'encontre des souhaits de l'Union soviétique, où Nikita Khrouchtchev, soutenu par la Tchécoslovaquie et l'Allemagne de l'Est, plus industrialisées, souhaitait que la partie sud du Comecon privilégie des économies plus agraires. La réticence des Soviétiques contribua à l'ouverture de la Roumanie vers l'Occident[5]. Les Roumains tiennent à ce projet précis, fidèle au programme d'industrialisation du pays formulé en 1948[6], alors que Khrouchtchev veut plus de production agricole, dans un pays qui a de grandes cultures céréalières depuis le XIXe siècle[6].

Évolution

Alors que l'organisation avait à l'origine pour but d'être aussi solide et unie que l'Organisation du traité de l'Atlantique nord (OTAN) ou le Pacte de Varsovie, elle a dans les faits peu de cohésion, et plusieurs de ses membres ont été à un moment ou à un autre étroitement liés avec une grande puissance. Par exemple, Cuba était très proche de l'URSS lors de la guerre froide. L'Inde s'est aussi rapprochée de l'URSS durant quelques années pour combattre la Chine. Le mouvement a également fait face à des dissensions internes quand l'URSS a envahi l'Afghanistan en 1979 .

D'un côté les États clients de l'URSS approuvaient l'invasion de l'Afghanistan, et de l'autre, certains membres (surtout les États à majorité musulmane) la condamnaient.

Lors de la conférence d'Alger (5-), le mouvement lance un programme intitulé le « Nouvel ordre économique mondial » (NOEI), qui est adopté par consensus lors de l'Assemblée générale des Nations unies le [7],[8],[9]. Ce programme propose des mesures concernant les matières premières, le financement du développement, l'industrialisation, les transferts de technologie et le contrôle des firmes multinationales. Cette initiative sera mise en échec par le contexte de crise sévissant alors et l'opposition de fait des pays développés. Dans l'esprit du NOEI, se développe, à partir de 1973, la coopération arabo-africaine entre deux organisations internationales (l'OUA et la Ligue arabe) qui toutes deux souscrivent aux principes du non-alignement[10].

Créé dans le contexte de la guerre froide, le mouvement a dû trouver un nouveau souffle à son issue à la suite de l'effondrement de l'Union soviétique. De plus, les États issus de l'éclatement de la Yougoslavie (l'un des membres fondateurs) ont montré peu d'intérêt pour l'organisation depuis la dissolution du pays. Enfin en 2004, Malte et Chypre se sont retirés lors de leur entrée dans l'Union européenne. Néanmoins, l'organisation continue de jouer un rôle important. Elle a par exemple refusé de suivre les instances du consensus de Washington, lequel regroupe le Fonds monétaire international (FMI), l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et la Banque mondiale, considérant que ce serait nuisible aux intérêts de ses membres.

Loin de s'estomper, le legs de l'ère de la guerre froide se poursuit. De nouvelles tendances s'inspirent des acquis des luttes de décolonisation. Ainsi, le politologue Aziz Salmone Fall, dans le sillage de Ben Barka, avec son Groupe de recherche et d'initiative pour la libération de l'Afrique (GRILA) prône un renouveau de la Conférence tricontinentale, un développement autocentré aux fondements écosystémiques, et plaide pour un mondialisme polycentrique[11],ou plus exactement pour le multilatéralisme.

En 2009, bien que non-alignée, l'Inde fait partie des pays fondateurs du groupe des BRIC. Elle y est progressivement rejointe par d'autres pays non-alignés : en 2011 par l'Afrique du Sud au sein des BRICS, puis en 2024 par l'Iran, l'Égypte, l'Éthiopie et les Émirats arabes unis pour former les BRICS+, suivis en 2025 par l’Indonésie.

États membres

Observateurs

Conférences au sommet

Dates et lieux des conférences
No  Date Ville Pays
Ire  -  Belgrade Yougoslavie
IIe  -  Le Caire Égypte
IIIe  -  Lusaka Zambie
IVe  -  Alger Algérie
Ve  -  Colombo Sri Lanka
VIe  -  La Havane Cuba
VIIe  -  New Delhi Inde
VIIIe  -  Harare Zimbabwe
IXe  -  Belgrade Yougoslavie
Xe  -  Jakarta Indonésie
XIe  -  Carthagène des Indes Colombie
XIIe  -  Durban Afrique du Sud
XIIIe  -  Kuala Lumpur Malaisie
XIVe[13]  -  La Havane Cuba
XVe  -  Charm el-Cheikh Égypte
XVIe  -  Téhéran Iran
XVIIe  -  Porlamar Venezuela
XVIIIe  -  Bakou Azerbaïdjan
XIXe  -  Kampala Ouganda

Secrétaires généraux

Secrétariat général du mouvement des non-alignés
Nom Pays Début Fin Parti politique
Josip Broz Tito Yougoslavie 1961 1964 Ligue des communistes de Yougoslavie
Gamal Abdel Nasser République arabe unie 1964 1970 Union socialiste arabe (Égypte)
Kenneth Kaunda Zambie 1970 1973 Parti uni de l'indépendance nationale
Houari Boumédienne Algérie 1973 1976 Conseil de la Révolution
William Gopallawa Sri Lanka 1976 1978 Indépendant
Junius Richard Jayawardene 1978 1979 Parti national uni
Fidel Castro Cuba 1979 1983 Parti communiste de Cuba
Neelam Sanjiva Reddy Inde 1983 Janata Party
Giani Zail Singh 1983 1986 Congrès national indien
Robert Mugabe Zimbabwe 1986 1989 ZANU-PF
Janez Drnovšek Yougoslavie 1989 1990 Ligue des communistes de Yougoslavie
Borisav Jović 1990 1991 Parti socialiste de Serbie
Stipe Mesić 1991 Union démocratique croate
Branko Kostić 1991 1992 Parti démocratique des socialistes du Monténégro
Dobrica Ćosić 1992 Indépendant
Soeharto Indonésie 1992 1995 Golkar
Ernesto Samper Pizano Colombie 1995 1998 Parti libéral colombien
Andrés Pastrana Arango 1998 Parti conservateur colombien
Nelson Mandela Afrique du Sud 1998 1999 Congrès national africain
Thabo Mbeki 1999 2003 Congrès national africain
Mahathir Mohamad Malaisie 2003 Organisation nationale des Malais unis
Abdullah Ahmad Badawi 2003 2006 Organisation nationale des Malais unis
Fidel Castro Cuba 2006 2008 Parti communiste de Cuba
Raúl Castro 2008 2009 Parti communiste de Cuba
Hosni Moubarak Égypte Parti national démocratique (Égypte)
Mohamed Hussein Tantawi Indépendant
Mohamed Morsi Parti de la liberté et de la justice (Égypte)
Mahmoud Ahmadinejad Iran Société islamique des ingénieurs
Hassan Rohani Parti de la modération et du développement
Nicolás Maduro Venezuela Parti socialiste unifié du Venezuela
Ilham Aliyev Azerbaïdjan Parti du nouvel Azerbaïdjan
Yoweri Museveni Ouganda en cours Mouvement de résistance nationale

Notes et références

  1. en anglais NAM, Non-Aligned Movement ; en espagnol MNOAL, Movimiento de países No Alineados.
  2. (en) Liste des participants au 16e sommet à Téhéran en août 2012.
  3. « populationdata.net/cartes/mond… »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogle • Que faire ?).
  4. "Un test de la politique de Bucarest : le futur combinat de Galatz" Article par Philippe Ben le 4 août 1965 dans Le Monde [1].
  5. Dragoș Petrescu, "Conflicting Perceptions of (Western) Europe: The Case of Communist Romania, 1958-1989", in Europe in the Eastern Bloc: Imaginations and Discourses, José M. Faraldo, Paulina Gulińska-Jurgiel, Christian Domnitz (eds.), p.204. Böhlau Verlag, Cologne, 2008. (ISBN 978-3-412-20029-9).
  6. "Nicolae Ceausescu: Vérités et mensonges d'un roi communiste" par Catherine Durandin, en 1990.
  7. « Résolution 3201 (S-VI) », sur www.un.org, (consulté le ).
  8. « Résolution 3202 (S-VI) », sur www.un.org, (consulté le ).
  9. « Résolution 67/217 », sur www.un.org, (consulté le ).
  10. Boutros Boutros-Ghali, « Les relations entre la Ligue arabe et l'OUA », Annuaire français de droit international, vol. 23,‎ , p. 175-186 (DOI https://doi.org/10.3406/afdi.1977.2035, www.persee.fr/doc/afdi_0066-3085_1977_num_23_1_2035, consulté le ).
  11. Aziz Salmone Fall, « Les 50 ans de Bandoeng - le non alignement à l’ère du supraimpérialisme », (consulté le ).
  12. « China's foreign policy is rooted in non-alignment », sur china.org.cn (consulté le ).
  13. 14e conférence sommet du mouvement, La Havane 2006.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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