Mont Singer
| Mont Singer | |
| Vue du versant est en hiver depuis la municipalité de Potton. | |
| Géographie | |
|---|---|
| Altitude | 811 m[1] |
| Massif | Monts Sutton (montagnes Vertes, Appalaches) |
| Coordonnées | 45° 08′ 00″ nord, 72° 27′ 24″ ouest[1] |
| Administration | |
| Pays | Canada |
| Province | Québec |
| Région | Estrie |
Le mont Singer est un sommet des monts Sutton culminant à 811 m d'altitude. Il est situé au Québec, dans la région administrative de l’Estrie, plus précisément dans la municipalité de Potton[2]. Certaines zones situées dans la partie inférieure des pentes sont localisées dans la municipalité de Bolton-Ouest et sur le territoire de la ville de Sutton. De plus, de petites portions de la montagne se trouvent également dans la municipalité de Bolton-Est et sur le territoire de la ville de Lac-Brome.
Toponymie
Le nom est associé à la « Singer Sewing Machine Company », une société qui a exploité cette forêt pour produire des meubles destinés à accueillir les machines à coudre entre 1918 et 1940[2].
Géographie
Situation, topographie
S'élevant entre 809 m[3] et 812 m[4] d'altitude, ce mont se situe au sud-est du hameau d’East Hill[2], au nord-est du mont Écho et au sud-ouest de la passe de Bolton.
La montagne abrite plusieurs petits étangs, mares temporaires et autres milieux humides. Parmi les plus vastes, on trouve l'étang Fullerton, situé sur le versant est, où le ruisseau Ruiter prend sa source, ainsi que l'Étang-aux-Herbages, traversé par le ruisseau Singer, sur le versant sud[5]. Sur le flanc nord de la montagne, le ruisseau North Branch prend naissance[6], tandis que le ruisseau West Field longe le nord-est du mont Singer.
Le ruisseau Jackson, quant à lui, prend sa source sur le mont Écho et sur le versant sud-ouest du mont Singer[7].
Faune et flore
La réserve écologique de la Mine-aux-Pipistrelles, lieu important d’hibernation de la chauve-souris, se trouve sur la montagne dans le secteur de la passe de Bolton[8].
Histoire
Au début des années 1900, des compagnies commerciales, comme la « Missisquoi Lumber Company », possédaient les lots de forêt sur la montagne. Ces lots ont ensuite été détenus par la « Singer Manufacturing Company »[9].
La majorité de la récolte de bois par la « Singer Manufacturing Company » a eu lieu, entre 1918 et 1926. Un village de bûcherons nommé Singerville se trouvait alors près du ruisseau Ruiter[10].
Dans la deuxième moitié du XIXe siècle, une petite communauté, nommée la « Lost Nation », était établie au bas des pentes du mont Singer, dans une partie de ce qui est aujourd’hui la municipalité de Bolton-Ouest. Des scieries de la compagnie Singer étaient aussi présentes dans ce secteur[11].
En 1954[12], les lots de forêt sur la montagne furent vendus par la « Singer Manufacturing Company » à la compagnie « Canada Paper »[13] (propriété de la « Howard Smith Paper Mills Ltd. »)[14] et les lots ont ensuite appartenu à la « Dominion Tar and Chemical »[13],[15] qui devint la Domtar en 1965[14].
Centrale hydroélectrique
En 1976, un projet de centrale hydroélectrique à l’étang Fullerton, jouxtant le mont Singer, a été présenté à la population de Potton. La centrale à réserve pompée aurait eu deux réservoirs. Le réservoir supérieur à l’emplacement de l’étang Fullerton aurait inondé une superficie de 2,2 km2, l’élévation normale du plan d’eau aurait été établie à 460 mètres et la hauteur maximum de la digue aurait été de 50 mètres. Elle se serait appuyée aux extrémités sur les montagnes environnantes, dont le mont Singer[16].
La puissance aurait varié entre 500 et 2 000 MW, la construction aurait coûté de 300 à 400 millions et environ 30 familles auraient été déplacées[17]. Il y eut une forte opposition citoyenne au plan de développement d’Hydro-Québec et l’Association de préservation de l’étang de Fullerton fut créée[18],[19]. En 1978, le projet fut suspendu[20] et finalement, en 1980, Hydro-Québec annonçait qu'il était reporté indéfiniment[21].
Coupes forestières par la Domtar
En 1979, la compagnie Domtar réalisa d’importantes coupes à blanc sur le mont Singer. Elle construisit aussi des chemins d’accès pour de futures exploitations forestières[22]. L'abattage des arbres souleva l’indignation des résidents de la région et un groupe de citoyens se forma pour alerter l’opinion publique[23]. À la suite des pressions de la population, Domtar renonça aux coupes à blanc et privilégia pour l’ensemble des monts Sutton la coupe par bandes[24].
En 1980, une réunion de l’Association pour la protection des monts Sutton fut à l’origine d’une enquête du ministère de l’Environnement. Le directeur général des services de protection de l’environnement dans les Cantons-de-l’Est et le sous-ministre de l’Environnement du Québec étaient d’ailleurs présents à cette réunion[25].
L’analyse du ministère de l’Environnement conclut que Domtar respectait les lois de l’époque. À la suite de la première enquête, une seconde fut conduite par la commission de protection du territoire agricole pour déterminer si une coupe avait été réalisée dans une érablière protégée par la loi[26].
L’Association pour la protection des monts Sutton fut aussi à l’origine d’une pétition contre la coupe à blanc[27]. Environ 1 000 personnes l’auraient signée[28].
Après une réunion avec le ministère de l’Environnement, une étude d’impact sur les futures exploitations forestières dans les monts Sutton fut commandée par la Domtar[29]. L'étude a coûté 100 000 $. Elle recommandait[30] :
- l'intensification de l'évaluation des impacts des opérations forestières sur la qualité de l’eau ;
- un plus grand contrôle sur la construction des chemins forestiers et sur l'utilisation de la machinerie ;
- une attention particulière en ce qui concerne la localisation et l’orientation des bandes de forêts coupées ;
- la tenue annuelle d’une réunion d’information publicisée pour les citoyens.
Durant une réunion d’information ouverte au public, au printemps 1981[31], le directeur général de la division des produits forestiers de la société Domtar a avancé certaines mesures pour la protection de l’environnement. Il a révélé que les fossés qui seraient creusés à intervalles réguliers seraient déviés vers la forêt, qu’aucun chemin forestier ne serait construit à moins de 60 mètres d’un cours d’eau, qu’aucune coupe ne serait effectuée dans les 60 mètres des étangs Cliff et Fullerton, que des rideaux d’arbres seraient maintenus le long des ruisseaux importants, et qu'une couche de végétation serait maintenue aux endroits où il y avait peu de sols meubles et le long des routes. Le directeur a également affirmé que les ruisseaux intermittents ne serviraient pas comme sentier de débusquage et que le reboisement de l'aire où ils avaient fait les coupes à blanc serait poursuivi[32].
À l’été 1981, les opposants à l’exploitation forestière ont accusé la compagnie de ne pas respecter les promesses et les recommandations du rapport d’impact qu’elle avait commandé. L’idée de faire un parc a émergé des discussions[33].
À l’automne 1981, le ministre de l’Environnement, Marcel Léger, a convenu lors d’une rencontre avec des membres de l’Association pour la protection des monts Sutton que des inspecteurs seraient envoyés pour vérifier le respect des recommandations de l’étude d’impact[34].
En 1982, Domtar a pris la décision de ne pas faire de nouvelles coupes majeures pour l’année en cours[35].
En 1992, des récoltes sélectives ont été faites dans les bandes d’arbres laissées par les coupes précédentes dans le secteur de l’étang Fulleton[36].
À l’été 1998, une coupe de récupération de 80 ou 84 hectares fut effectuée par la Domtar. La compagnie soutenait que le verglas massif de janvier 1998 avait causé des dommages irréparables à la forêt. La coalition des Amis des bassins versants était opposée à ces coupes à blanc. Selon la coalition, les coupes engendraient de l’érosion. En 1999, la municipalité de Potton n’a pas renouvelé les permis d’exploitation de la compagnie[37],[38]. Une pétition de 12 000 signatures s’opposant aux coupes a été déposée à l’Assemblée nationale la même année[39].
En 2004, les terrains englobant la montagne furent vendus par la Domtar à l’organisme Conservation de la nature Canada, devenant le plus grand site naturel privé protégé dans l'est du Canada[40].
En 2009, le gouvernement du Québec a accordé au territoire le statut de réserve naturelle en milieu privé. Elle prendra le nom de la Réserve naturelle des Montagnes-Vertes (RNMV)[41].
Activités
Le sentier de longue randonnée des sentiers de l’Estrie traverse le mont Singer[42]. Deux campings rustiques, les campings de Westfield et du mont Singer[43], sont situés le long du sentier sur la montagne, offrant des aires de repos aux randonneurs.
Un autre réseau de sentiers de randonnée, de raquette et de ski de fond, long de 20,5 km[44], est géré et entretenu par l’organisme Corridor Appalachien[45].
Notes et références
- Commission de toponymie, « Mont Singer », Banque de noms de lieux du Québec (consulté le )
- Commission de toponymie, « Mont Singer », Banque de noms de lieux du Québec (consulté le 10 août 2025)
- ↑ Direction générale de l’information géographique, Ministère des Ressources naturelles et de la Faune « BOLTON-OUEST, 31H01-200-0201, (45° 07' 59", -72° 27' 23") », 1/20000, 2003, dans Données Québec, Cartes topographiques à l'échelle de 1/20 000, Répertoire complet (format PDF) (consulté le 10 août 2025)
- ↑ Ressources naturelles Canada, Gouvernement du Canada, « Mont Singer, Potton », sur Atlas du Canada Toporama, (consulté le 10 août 2025)
- ↑ Julien Poisson et Louise Gratton, « Plan directeur 2014-2019 pour la Réserve naturelle des Montagnes-Vertes », Conservation de la nature, août 2014, p.8 et 14 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ « L’ÉTONNANT RUISSEAU NORTH BRANCH (première) » (consulté le )
- ↑ Isabel Authier, « Gros plan sur le ruisseau de Jackson [VIDÉO] », sur La Voix de l'Est, (consulté le )
- ↑ Commission de toponymie, « Réserve écologique de la Mine-aux-Pipistrelle », Banque de noms de lieux du Québec (consulté le 10 août 2025)
- ↑ (en) Sandra Jewett et al. « Early history of logging in Potton » Association du patrimoine de Potton, Histoire Potton History, vol.7, no 1, printemps 2020, p.38 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ « Singer, Ruisseau · Toponymie | Canton de Potton | Place Names · Association du patrimoine de Potton », sur patrimoinepotton.org (consulté le )
- ↑ (en) Matthew Elder, traduction Guy Côté, « Lost Nation: de malédiction à paradis des bûcherons », sur tempolacbrome.ca, 1er décembre 2024 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ (en) James Duff « Domtar announces Sutton cutting, Selective means careful », The Record, 25 mai 1981, p.3 (consulté le 10 août 2025)
- (en) Sandra Jewett et al. « Early history of logging in Potton », Association du patrimoine de Potton, Histoire Potton History, vol.7, no 1, printemps 2020, p.43 (consulté le 10 août 2025)
- Andréanne Duchemin et Providence Cloutier, « De la forêt au papier : un héritage de plus de 175 ans pour Domtar », Société d’histoire forestière du Québec (SHFQ), Histoires forestières du Québec, Vol.16, no 1, printemps-été 2024, p.21-22 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ « La grande histoire du papier à Windsor », La Tribune, cahier 5, « Festival du papier de Windsor », 16 juin 2004, p.E2 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ JdB « Le projet Fullerton, vue par l’Hydro-Québec », La Voix de l’Est, 28 mars 1977, p.2 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ Gilles Dallaire « $400 millions dans la région? », La Tribune, 3 décembre 1976, p.1 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ (en)Ursula Seebohm « Citizens Movement against the Fullerton Pond Project », Townships Sun, 1er décembre 1976, p.34-39 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ « Etang Fullerton : études suspendues », La Tribune, 15 avril 1978, p.16 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ Jacqueline de Bruycker « Fullerton : rien ne va plus », La Voix de l’Est, 17 avril 1978, p.2 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ JdB « Hydro-Québec remet indéfiniement le projet Fullerton », La Voix de l’Est, 14 août 1980, p.2 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ (en)James Duff « Knowlton in arms over clear-cutting », The Sherbrooke Record, 20 septembre 1979, p.1 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ Jacqueline de Bruycker « Coupe à blanc sur les monts Sutton », La Voix de l’Est, 19 septembre 1979, p.1 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ Gilles Dallaire « Domtar renonce à la coupe à blanc », La Tribune, Cahier 1, 10 mai 1980, p.A4 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ Robert Fontaine « La chasse à la Domtar est ouverte… », La Voix de l’Est, cahier 1, 16 août 1980, p.2 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ Robert Fontaine « Les coupes de bois scrutées », La Voix de l’Est, cahier1, 16 août 1980, p.1 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ (en) « Petition opposes Sutton range clear-cutting », The Record, 14 août 1980, p.4 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ (en) James Duff « Domtar announces Sutton cutting, Selective means careful », The Record, 25 mai 1981, p.1 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ (en) Judith Kellock-Heward « East Angus talks going smoothly », The Record, 20 octobre 1980, p.1 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ Jacqueline de Bruycker « Domtar envisage un programme de coupe davantage respectueux de l’environnement », La Voix de l’Est, 23 mai 1981, p.8 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ « Domtar, Réunion d’information », La Tribune, Cahier 3, Les petites annonces, 21 mai 1981, p.C6 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ « L’environnement sera protégé », La Tribune, cahier 1, 23 mai 1981, p.A5 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ (en) John Boudreau « Sutton Mountain Range », Townships Sun, juillet 1981, p.22 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ JdB « Léger se mettra le nez dans la coupe de bois », La Voix de l’Est, 29 octobre 1981, p.7 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ JdB « Pas de coupe d’arbres aux Monts Sutton », La Voix de l’Est, 21 juillet 1982, p.9 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ Jean-Pierre Bonhomme « Les coupes de Domtar incommodent résidents et estivants de l’Estrie », La Presse, 18 août 1992, p.A7 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ Hélène Buzzetti « Domtar ne peut continuer ses coupes à blanc à Sutton », Le Devoir, 27 juillet 1999, p.A2 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ PC « Le Canton de Potton refuse un permis de coupe à Domtar », La Tribune, cahier 1, 27 juillet 1999, p.A2 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ GF « La pétition déposée à Québec contient plus de 12 000 noms », La Tribune, cahier 1, 12 juin 1999, p.A7 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ Marie Tison « Domtar contribue à la création d’un site protégé », La Tribune, cahier 1, 7 août 2004, p.A11 (consulté le 10 août 2025)
- ↑ « La Réserve naturelle des Montagnes-Vertes », sur Réserve naturelle des Montagnes-Vertes (consulté le 10 août 2025)
- ↑ « Écho », sur www.lessentiersdelestrie.qc.ca (consulté le )
- ↑ « Réserver un camping », sur www.lessentiersdelestrie.qc.ca (consulté le )
- ↑ « Réserve naturelle des Montagnes-Vertes, secteur Singer - Mansonville (Canton de Potton) | Cantons-de-l'Est (Estrie) », sur Tourisme Cantons-de-l'Est (consulté le )
- ↑ « Les sentiers du mont Singer », sur Corridor Appalachien (consulté le )
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