Lazare Meerson

Lazare Meerson
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(à 37 ans)
Londres
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Lazare Meerson (8 juillet 1897(ou 1900 selon les sources) à Varsovie – 28 juin 1938 à Londres) est un décorateur de cinéma franco-polonais. Figure emblématique du décor cinématographique en France durant l'entre-deux-guerres, il a contribué de manière décisive à l'esthétique moderniste du cinéma français et a joué un rôle clé dans l'émergence du réalisme poétique.

Biographie

Né à Varsovie, alors sous domination russe, Lazare Meerson étudie l'architecture avant de rejoindre l'Allemagne après la Révolution russe. Il suit des cours à Berlin, notamment en arts appliqués, et y obtient une première expérience dans le décor théâtral[2].

En 1924, il s'installe à Paris, où il intègre les la Société des Films Albatros, société fondée par des exilés russes autour de Joseph Ermolieff. Il est d'abord assistant décorateur aux côtés de Boris Bilinsky, Pierre Kéfer et Alberto Cavalcanti. Ce dernier, architecte de formation, exercera une influence déterminante sur sa sensibilité esthétique. Il travaille notamment sur les maquettes de L'Affiche (Epstein), Feu Mathias Pascal (L'Herbier), Le Double Amour (Epstein), avant de s'imposer comme décorateur principal. L’architecture moderne, l’art déco et la pensée fonctionnaliste vont devenir les pierres angulaires de sa création.

Carrière

Dès 1925, Meerson collabore avec Jacques Feyder sur Gribiche, Carmen et Les Nouveaux Messieurs, et avec René Clair sur La Proie du vent, Un chapeau de paille d’Italie et Les Deux Timides. Dans Gribiche, il conçoit l’intérieur moderniste de Mme Maranet, modèle d’intérieur art déco, sobre, fonctionnel et hygiéniste, opposé aux guinguettes populaires[3].

Avec l’arrivée du son, Meerson devient chef décorateur aux studios Tobis d’Épinay. Il y conçoit les décors de plus de quarante films entre 1930 et 1936. Il poursuit sa collaboration avec René Clair : Sous les toits de Paris (1930), Le Million (1931), À nous la liberté (1931), Quatorze Juillet (1932).

Il y impose une nouvelle façon de penser les studios : les décors sont à la fois stylisés et ancrés dans une forme de vérité poétique. Son travail sur À nous la liberté est exemplaire : il conçoit une usine entière, chaînes de production comprises, offrant un espace régulier, géométrique, qui intègre pleinement les mouvements de caméra et la chorégraphie des corps[4].

Il collabore aussi avec Claude Autant-Lara (Ciboulette, 1933), Maurice Tourneur (Justin de Marseille, 1934), Abel Gance (Poliche, 1934), Marc Allégret (Les Beaux Jours, 1935). En 1935, il conçoit l’un de ses chefs-d’œuvre : La Kermesse héroïque de Feyder, pour lequel il reconstitue une ville flamande du XVIe siècle en studio, inspirée des peintures de Bruegel et Frans Hals, combinant rigueur historique et liberté d’interprétation[4].

Contrairement à l’abondance ornementale prônée par des décorateurs comme Donatien, il fait le choix de la clarté formelle et de la lisibilité. Il joue avec les échelles, les coursives, les perspectives forcées. Le studio devient pour lui un laboratoire d’utopie architecturale[3].

En 1936, Meerson est appelé en Angleterre par Jacques Feyder et Alexander Korda[5]. Il travaille sur Le Chevalier sans armure (1937), Fire Over England (1937), et The Citadel (1938) de King Vidor. Séduit par les moyens colossaux des Denham Film Studios, il déchante pourtant devant leur organisation industrielle, plus rigide que celle qu’il appréciait en France.

Alors qu’il achève les décors de The Citadel, Meerson meurt brutalement d’une méningite, à 41 ans. Ses obsèques sont suivies par René Clair et Jacques Feyder.

Héritage

Lazare Meerson est considéré comme l'un des fondateurs de la modernité visuelle dans le cinéma français. Il a fortement influencé des décorateurs comme Jean d'Eaubonne, Alexandre Trauner ou Georges Wakhévitch, qui prolongeront son héritage dans le courant du réalisme poétique[6]. Au-delà du style, Meerson a modifié la conception même du décor de cinéma : il ne s’agit plus de reproduire, mais d’interpréter l’espace pour servir la narration. Sa pensée du décor comme espace de sens préfigure les approches scénographiques contemporaines.

Distinctions

Autres activités

Parallèlement à son travail pour le cinéma, Meerson réalise des fresques et décors peints, notamment pour le Casino de Monte-Carlo, ainsi que l’appartement de Jacques Feyder et Françoise Rosay[8].

Vie personnelle

Il était marié à Mary Meerson, d'origine russe, danseuse et modèle, qui deviendra plus tard la compagne de Henri Langlois, fondateur de la Cinémathèque française.

Filmographie

Notes et références

  1. « http://www.cineressources.net/repertoires/archives/fonds.php?id=meerson »
  2. François Albéra (préf. Dominique Païni), Albatros, des Russes à Paris 1919-1929, Paris ; Milan, Cinémathèque française ; Mazzotta, (lire en ligne)
  3. Jean-Pierre Berthomé, « Lazare Meerson, onze ans de complicité avec René Clair », 1895, revue d'histoire du cinéma, no 25,‎ , p. 63-77 (lire en ligne, consulté le )
  4. « Fiche biographique de Lazare Meerson », sur Encyclopédie du cinéma (consulté le )
  5. The Encyclopedia of British Film, London, Methuen, (lire en ligne), p. 446
  6. René Prédal, 50 ans de cinéma français (1945-1995), Nathan, , 100-101 p. (lire en ligne)
  7. « 5e cérémonie des Oscars (1933) », sur Academy of Motion Picture Arts and Sciences (consulté le )
  8. « Fiche biographique sur l’Encyclopédie du cinéma », sur Encyclopédie du cinéma (consulté le )

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes et sources

  • François Albéra (préf. Dominique Païni), Albatros, des Russes à Paris 1919-1929, Paris ; Milan, Cinémathèque française ; Mazzotta, (lire en ligne)
  • René Prédal, 50 ans de cinéma français (1945-1995), Nathan, , 100-101 p. (lire en ligne)
  • « La Revue du cinéma », La Revue du cinéma, Gallimard,‎ (lire en ligne)
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