Robert Aylé
| Nom de naissance | Robert Constant Aylé |
|---|---|
| Naissance |
17e arrondissement de Paris |
| Décès |
(à 44 ans) Forteresse du Mont-Valérien, Suresnes |
| Nationalité | française |
| Pays de résidence | France |
| Profession |
Directeur d'une entreprise de gardiennage |
| Autres activités | |
| Ascendants |
Frédéric Henri Aylé Marthe Thérèse Brulfert |
| Conjoint |
Robert Aylé, né le à Paris, était un directeur d'une entreprise de gardiennage d'usines et un résistant de la Seconde Guerre mondiale membre du Réseau Comète qui permit à des centaines de pilotes alliés de rallier l'Angleterre via la France et l'Espagne. Arrêté en , il est condamné à mort et fusillé au Fort du Mont-Valérien, le .
Éléments biographiques
Henri Frédéric Aylé et Marthe Thérèse Brulfert, les parents de Robert Aylé, se marient à Paris en . Ils ont deux enfants, Jacques, qui naît en 1896, et Robert, le . La famille est installée au no 95 de la Rue de Courcelles. Le couple se sépare en 1904. Robert Aylé épouse, le , à Paris, Germaine Leca. Robert dirige une entreprise de gardiennage d'usines. Le couple s'établit au no 37 de la Rue de Babylone qui lui vaudra plus tard son nom de guerre, « Baby »[1].
Seconde Guerre mondiale
Lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate, en , les époux Aylé souhaitent rallier Londres mais les affaires de Robert les retiennent à Paris. Le couple entend lutter activement contre l'occupant. Début 1941, ils sont en contact avec le Père Riquet qui leur présente Robert Guédon, ex-officier d'active, qui monte un réseau de résistance qui intègrera le Réseau Hector. À la fin de l'année, Robert Guédon, établit son poste de commandement dans les appartements des Aylé. Mais en , le réseau connait une vague d'arrestations et Robert Guédon quitte Paris pour retourner en Zone libre[2]. Les époux Aylé participent alors à la diffusion de la presse clandestine de février à mars 1942 en distribuant Défense de la France que Robert Aylé soutient financièrement.
Robert Aylé était un boute-en-train, facétieux et drôle, il avait ainsi un petit jeu, certes dangereux, celui de dérober l'arme de poing des officiers allemands dans les transports en commun, il en avait ainsi une petite collection[3].
Entrée dans le réseau Comète
En , Andrée De Jongh « Dédée », crée avec Arnold Deppé, une filière d'exfiltration d'aviateurs alliés tombés sur le territoire belge, le réseau Comète. Cette dernière dirige le réseau depuis le Sud de la France et Paris tandis que son père, Frédéric De Jongh, « Paul », coordonne le secteur belge depuis Bruxelles. En avril 1942, ce dernier est « brûlé » et sommé de quitter Bruxelles s'il veut échapper à une arrestation. Il cède les commandes à Henri Michelli et, à la demande de sa fille, se rend à Paris pour coordonner ce secteur. Il arrive à Paris le échappant ainsi a la vague d'arrestations du lors de laquelle, Henri Michelli qui venait de reprendre la coordination de Bruxelles et Charles Morelle sont arrêtés[4].
Arrivé à Paris, Frédéric De Jongh ne tarde pas à rencontrer le Père Riquet qui lui présente Robert Aylé et Aimable Fouquerel qui deviendront ses adjoints[5]. Les époux Aylé organisent ainsi un maillage de safe houses à Paris et contribuent également à la mise sur pied d'un réseau de collecte des aviateurs tombés sur le territoire français. Le père Riquet s'occupant du recrutement, ce qu'il fait principalement, grâce à son activité d'aumonier des services de santé catholiques, dans le secteur médical. À cette époque, sous la direction de Frédéric De Jongh, Robert Aylé supervise les agents français tandis que Frédéric De Jongh assure la coordination entre Bruxelles et le Sud. Quant à Andrée De Jongh, elle assure la jonction entre Paris et l'Espagne via le MI9 et l'ambassade britannique de Bilbao[6].
À l'été 1942, le réseau Comète dispose d'une « grande et laide villa » à Saint-Maur-des-Fossés en banlieue parisienne que louent Elvire Morelle et son frère Charlie. Là, à l'abri des hauts murs d'enceinte, les aviateurs alliés peuvent profiter du jardin. Elvire tient la maison et son frère est guide international et amène les candidats à l'exfiltration depuis Bruxelles. Mais cette safe house est trop excentrée et les étrangers sont trop vite repérés dans cette banlieue paisible. Frédéric De Jongh charge alors Robert Aylé d'installer un QG à Paris. Elvire Morelle s'installe alors au quatrième étage du no 10 de la rue Oudinot. Aimable Fouquerel, l'ami et le protégé de Robert Aylé, habite au cinquième et Lucienne Laurentie, la femme d'Henri Laurentie qui a rejoint De Gaulle à Londres, au second[7],[8].
En , le réseau est infiltré par deux pseudos-aviateurs américains hébergés à Bruxelles chez les Maréchal. Toute la famille est arrêtée ainsi qu'Elvire Morelle qui, faute d'avoir pu être prévenue, se rend chez eux pour y prendre en charge les aviateurs. Elle est accueillie par la Geheime Feldpolizei de la Luftwaffe en charge de la lutte contre les réseaux d'évasion[9],[10].
Frédéric De Jongh occupe alors le quatrième étage du no 10 de la rue Oudinot. Il faut reconstruire la ligne qui s'établissait à ce moment comme suit : Bruxelles - Paris - Bordeaux - Bayonne - Saint-Jean-de-Luz - Pyrénées[7].
Arrestation d'Andrée De Jongh
En , la situation de Frédéric De Jongh à Paris inquiète beaucoup sa fille, Andrée De Jongh. Suzanne, sa sœur, a déjà été arrêtée et l'étau allemand semble se resserrer autour de son père. Il consent à rallier Londres. Mi-janvier, Andrée est à Paris ainsi que son bras droit, Jean-François Nothomb, « Franco ». Frédéric De Jongh confie le secteur de Paris à « Franco » et à Robert Aylé avant de se mettre en route pour le Sud avec sa fille et trois aviateurs alliés. Arrivés chez Elvire De Greef, à Anglet, les conditions climatiques sont telles que Frédéric De Jongh se laisse convaincre de rester à Anglet pour tenter un prochain passage sous une météo plus clémente. Andrée De Jongh poursuit seule avec les aviateurs mais ils sont contraints de passer la nuit à Bidegain Berri, la ferme de Frantxia Haltzuet à Urrugne. Trahis par un valet de ferme voisin, ils sont tous arrêtés le lendemain[11].
Le Père Riquet entend le message suivant à la BBC : « N'approchez pas Paul et Dédé, ils ont la peste à la maison » et prévient aussitôt les Aylé[12].
Frédéric De Jongh et d'autres membres du réseau échafaudent un plan pour la faire évader mais la veille de sa mise en œuvre, Andrée De Jongh est transférée dans une autre prison puis au centre pénitentiaire de Fresnes. Frederic De Jongh rentre à Paris pour se rapprocher de sa fille et relancer le réseau, plus déterminé que jamais.
La ligne doit à nouveau être remise sur pied, dans cette attente, et en raison du fait que trop d'aviateurs sont hébergés à Paris, il convient de trouver des filières de délestage. Robert Aylé est en contact avec de nombreux autres réseaux de résistance[13] ainsi, Frédéric De Jongh avait déjà pu venir en aide à Georges Broussine y compris financièrement. Ce dernier dirigeait le Réseau Bourgogne qui prit en charge à cette époque, 16 aviateurs. Le réseau Brandy via Monique Spiquel[Notes 1] en prit vingt autres[14].
Jean-François Nothomb, « Franco », l'adjoint de « Dédée », reprend ses fonctions et se rend fréquemment à Paris pour assurer la jonction avec Frédéric De Jongh et les agents sur place. À partir d'avril 1943, les Allemands intensifient les contrôles dans le Sud, obligeant la ligne à quitter le réseau ferroviaire à Biarritz et d'accomplir les 50-60 derniers kilomètres en vélo. Les époux Aylé s'occupent de réaliser les faux-papiers pour les candidats à l'exfiltration. Robert Aylé assure alors pleinement la supervision du secteur « Paris-Nord-Bretagne » tandis que le secteur sud est coordonné depuis juin 1941 par Elvire De Greef[15].
Trahison et arrestation
Au printemps 1943, Frédéric De Jongh habite désormais au no 28 de la rue Vaneau. En , Robert Aylé présente à Frédéric De Jongh un certain « Jean Masson ». Le , pressenti pour être guide international entre Bruxelles et Paris via Lille, Jean Masson doit prendre en charge son premier groupe à Bruxelles. Il ramène sept aviateurs à la Gare Montparnasse, acclamé de tous[16]. Quelques jours plus tard, Jean Masson recontacte Frédéric De Jongh à la rue Vaneau pour lui dire de se tenir prêt, avec toutes ses troupes pour le en raison du nombre important « de colis » qu'il aurait à livrer[17]. Frédéric De Jongh et Robert Aylé décident d'envoyer deux convoyeuses à Lille pour seconder « Jean Masson », Raymonde Coache et Madeleine Bouteloupt. À Lille, Jean Masson suggère que Raymonde Coache y reste pour accueillir le second groupe qui doit arriver en début d'après-midi. Elle est aussitôt arrêtée par la Gestapo dans le café où elle patiente. Il en va de même pour Madeleine Bouteloupt qui est appréhendée avant même que le train pour Paris ne quitte Lille [14].
À Paris, Frédéric De Jongh rejoint Robert Aylé et sa femme Germaine Aylé-Leca qui attendent déjà sur le quai. Ne se doutant de rien, ils doivent réceptionner les 6 nouveaux arrivants à la gare de Paris-Nord. Jean Masson saute sur le quai suivi de ses aviateurs qui ne peuvent cacher qu'ils sont anglais ou américains. Le groupe voit ensuite deux gendarmes sortir de la salle des pas perdus, bientôt rejoint par une dizaine d'autres qui affluent de toutes parts. Ils sont tous arrêtés et conduits au bureau de la police des chemins de fer. Des voitures de la Gestapo les attendent devant la gare, ils sont emmenés à la Rue des Saussaies, le siège de la Sipo –SD, à leur arrivée, Jean Masson, tout sourire et triomphant contemple le succès de sa traîtrise. Robert Aylé lui décoche un coup. Robert Aylé et Frédéric de Jongh avaient rendez-vous cet après-midi-là avec Georges Broussine, lorsque ce dernier téléphone à la rue Vaneau une demi-heure avant leur entrevue selon la procédure de sécurité établie, il est frappé d'entendre la voix gutturale aux accents germaniques à l'autre bout de la ligne et comprend aussitôt[18].
De nombreuses arrestations suivent dont celle d'Aimable Fouquerel. En tout, une trentaine d'arrestations sont opérées à Paris, d'autres suivront à Bruxelles[19].
Lorsque Jean-François Nothomb, « Franco », une petite semaine plus tard, remonte du Sud et se rend dans l'appartement qu'il partage avec Frédéric De Jongh à la rue Vaneau, il pense tout d'abord que Frédéric De Jongh est sorti d'autant plus que des faux papiers et un stylo sont sur la table mais son inquiétude augmente lorsqu'il constate une casserole avec de la nourriture avariée. Il rassemble alors les documents, tout l'argent qu'il peut trouver et prend la fuite et se rend chez Marcel Roger, « Max », un ami de Charles Morelle. Ensemble, ils se rendent chez les Aylé, au no 37 de la rue de Babylone, les scellés de la Gestapo sont déjà apposés. Il en est de même au no 10 de la Rue Oudinot, chez Aimable Fouquerel. Ils se représentent à la rue Vanneau mais les allemands y sont. La nuit suivante, Jean-François Nothomb parvient cependant à y retourner pour vider différentes caches de leur contenu et remet en place les scellés fraîchement apposés[20].
À partir de ce moment, Robert Aylé partage la destinée de Frédéric De Jongh et d'Aimable Fouquerel. Ils connaissent la torture, mais ne parlent pas, ce qui fera dire à Georges Broussine après guerre que si son réseau ne fut pas démantelé à cette époque, il le doit à leur courage. En revanche, Jacques Desoubrie dispose de beaucoup d'informations concernant le secteur Nord du réseau Brandy qui connait également de nombreuses arrestations[21]. Les trois hommes sont incarcérés à la prison de Fresnes. Le , ils sont jugés par le tribunal militaire allemand du Gross-Paris et sont condamnés à mort pour intelligence avec l'ennemi. Le , ils sont conduits à la Forteresse du Mont-Valérien. Frédéric De Jongh demande et obtient que les trois condamnés puissent passer leurs dernières heures ensemble. Ils rédigent leurs lettres d'adieu à la même table et sont fusillés à l'aube[22]. Robert Aylé est inhumé dans le carré militaire du Cimetière parisien d'Ivry[1].
Son épouse est déportée mais elle survit à la guerre et est libérée ou parvient à s'évader en [1].
Leur délateur, Jacques Desoubrie, condamné à mort pour intelligence avec l'ennemi, est exécuté au fort de Montrouge à Arcueil le .
Galerie des différents lieux
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Entrée de l'habitation des époux Aylé...
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... au 37 de la rue de Babylone.
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Entrée de l'habitation de Frédéric De Jongh et de Jean-François Nothomb...
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... au 28 de la rue Vaneau.
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Entrée de l'habitation de Lucienne Laurentie, Elvire Morelle, Frédéric De Jongh et d'Aimable Fouquerel, cet immeuble servait de safe house...
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... au 10 de la rue Oudinot.
Reconnaissances
| Principales adresses du réseau Comète à Paris d'avril 1942 à juin 1943. |
- une rue porte son nom à Asnières-sur-Seine où il a résidé et à Hénin-Beaumont[1].
- Reconnu Mort pour la France le [1].
- Agent P1 en mai 1942 et P2 en janvier 1943. Homologué Capitaine des FFC[1].
Décorations
Médaille de la Résistance française ;
Chevalier de la légion d'honneur.
Notes et références
Notes
- ↑ Monique Spiquel née Patenotte, épouse de Camille Spiquel.
Références
- Le Maitron 2013, p. 1.
- ↑ Perroy-Aylé 1945, p. 1.
- ↑ Perroy-Aylé 1945, p. 12.
- ↑ Ottis 2001, p. 128.
- ↑ Perroy-Aylé 1945, p. 2.
- ↑ Perroy-Aylé 1945, p. 3.
- Perroy-Aylé 1945, p. 4.
- ↑ Neave 2016, p. 54-56.
- ↑ Neave 2016, p. 77-79.
- ↑ Ottis 2001, p. 133.
- ↑ Ottis 2001, p. 135-137.
- ↑ Perroy-Riquet 1946, p. 8.
- ↑ Ottis 2001, p. 209.
- Ottis 2001, p. 138.
- ↑ Perroy-Aylé 1945, p. 5-6.
- ↑ Neave 2016, p. 133.
- ↑ Neave 2016, p. 134.
- ↑ Neave 2016, p. 136-139.
- ↑ Ottis 2001, p. 141.
- ↑ Neave 2016, p. 139-141.
- ↑ Ottis 2001, p. 140.
- ↑ Neave 2016, p. 174.
Articles connexes
Bibliographie
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
- (en) Airey Neave, Little Cyclone: The Girl Who Started The Comet Line, Biteback Publishing, (1re éd. 1954) (ISBN 978-1-84954-960-8, lire en ligne).
- (en) Sherri Greene Ottis, Silent Heroes: Downed Airmen and the French Underground, University Press of Kentucky, (ISBN 978-0-8131-2186-4, lire en ligne).
- Aurélie Pol-Loison, Jean-Pierre Besse et Annie Pennetier, « AYLÉ Robert, Constant », Le Maitron, (lire en ligne, consulté le )
- Édouard Perroy et Germaine Aylé-Leca, « Témoignage de Germaine Aylé, recueilli par Édouard Perroy », Archives du Comité d'histoire de la Deuxième Guerre mondiale, inédit, (lire en ligne, consulté le )
- Édouard Perroy et Michel Riquet, « Témoignage du R.P. Michel Riquet, recueilli par Édouard Perroy », Archives du Comité d'histoire de la Deuxième Guerre mondiale, inédit, (lire en ligne, consulté le )
Liens externes
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