François Soubrié

François Soubrié
Photographie policière de François Soubrié par Alphonse Bertillon (fichier anthropométrique des anarchistes, 1894).
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Idéologie

François Soubrié, né le à Livinhac-le-Haut et mort à une date inconnue, est un mineur socialiste puis anarchiste français. Il est connu pour son rôle central lors de la grève des mineurs de Decazeville, pendant laquelle il est l'un des représentants des mineurs et est très apprécié des habitants de la région - plus tard, il se rapproche de l'anarchisme et rejoint le mouvement anarchiste en France. Il est l'un des accusés du Procès des Trente et est acquitté comme la plupart des prévenus.

Né dans une famille de cultivateurs, Soubrié commence par travailler comme mineur à Decazeville et lors de la grève importante qui touche la mine en 1886, il est élu délégué puis vice-président des délégués des mineurs de la mine. En janvier 1886, les mineurs défenestrent un des patrons de l'entreprise, Jules Watrin - un acte que Soubrié défend et dont il menace les autres représentants qui trahiraient la cause des mineurs, ce qui mène à son arrestation pendant la grève et à sa condamnation à quatre mois de prison ferme pour cette déclaration. Arrêté, l'armée doit être déployée à Decazeville pour qu'il puisse être transféré à son procès et de larges foules se pressent sur son passage pour le saluer. En prison, il refuse de se présenter comme candidat aux élections législatives du département de la Seine, comprenant Paris, mais est tout de même placé sur les bulletins de vote - il arrive troisième de l'élection. Après sa libération, il revient dans l'Aveyron et est accueilli par les mineurs et la population des villes où il entre, comme Viviers, aux chants de La Marseillaise. Il s'engage ensuite dans le militantisme anarchiste, rejoint Paris pour y trouver un emploi après son renvoi - est accueilli par le compagnon Auguste Lucas, qui l'héberge, lui donne de l'argent et lui trouve un emploi. Il assiste ensuite aux réunions du Cercle international anarchiste à Paris. En 1894, il est ciblé par les autorités françaises, qui le mettent en procès lors du procès des Trente et l'accusent d'association de malfaiteurs - il est acquitté et poursuit son militantisme. Soubrié est noté comme anarchiste au moins jusqu'en 1896.

Sa photographie policière fait partie des collections du Metropolitan Museum of Art (MET).

Biographie

François Auguste Soubrié naît le à Livinhac-le-Haut, dans le département de l'Aveyron[1],[2]. Sa mère, Eugénie Labro, est sans emploi et son père cultive ses terres. Soubrié commence à travailler comme mineur à Decazeville[1],[2].

Grève des mineurs de Decazeville et emprisonnement

Là, il devient délégué puis vice président des délégués de sa mine pendant la grève importante se déroulant dans celle-ci en 1886[1],[2]. En janvier 1886, Jules Watrin (1836?-1886), sous-directeur des Houillères et Fonderies d’Aveyron à Decazeville, est défenestré pendant la grève[1],[2]. Son sort donne lieu à un néologisme, la « watrinade », signifiant « assassinat d’un contremaitre ou d’un directeur d’usine, d’un patron d’atelier, d’un chef de fabrique »[3]. En mars, alors que la grève est toujours en cours, il déclare que si, soit l'un des autres délégués, soit quelqu'un trahissait les mineurs, il serait « watrinisé ». Cette déclaration lui vaut une arrestation le même jour, les autorités l'accusant d'avoir parlé de tous les traîtres sans spécifier - ce qui permettrait de le condamner[1],[2]. Il est défendu par Émile Basly et Zéphirin Camelinat, deux députés socialistes qui assistent au discours et soutiennent qu'il a visé les autres délégués, ce qui n'est pas criminalisé par la loi[1],[2].

Les autorités françaises décident de le transférer hors de Decazeville et déploient l'armée pour éviter que la population ne se révolte - une compagnie de ligne prend place dans la gare tandis que les rues de la ville sont patrouillées par des dragons[1],[2]. Une foule nombreuse se presse sur son trajet pendant son transfert - avant son départ en train, il se tourne vers son épouse, Camelinat, Basly et Antoine Duc Quercy, rédacteur en chef du Cri du Peuple et leur crie : « Adieu, citoyens »[1],[2] !

Lors de son procès à Villefranche de Rouergue, il déclare en premier lieu ne pas regretter la mort de Watrin avant de revenir sur ses propos pendant le procès ; Basly et Camelinat témoignent pour le sauver. Il est condamné à quatre mois de prison ferme pour la phrase qu'il a prononcée[1],[2].

Alors qu'il est en prison, de nombreux socialistes franciliens souhaitent présenter sa candidature aux élections législatives dans le département de la Seine, qui comprend Paris. Il refuse catégoriquement cette proposition, et écrit qu'il ne souhaite pas provoquer de rupture au sein du mouvement socialiste en se présentant contre Ernest Roche[1],[2]. Il invite les autres socialistes à retirer sa candidature et à voter pour Roche. Il écrit entre autres[1],[2] :

Je déclare formellement et en toute liberté d’appréciation que je n’accepte pas de candidature dans le département de la Seine. Je proteste contre l’abus fait de mon nom.

Ses demandes ne sont pas suivies, étant donné qu'il est tout de même présenté comme candidat à son insu - mais il perd les élections et arrive en troisième position[1],[2].

Lorsqu'il sort de prison et rentre chez lui, il est attendu à la gare de Viviers par de nombreux mineurs[1],[2]. Il est accueilli par la population de la ville avec beaucoup de marques de respect et les habitants chantent La Marseillaise en son honneur quand il entre dans la ville[1],[2].

Militantisme anarchiste

En octobre 1886, Soubrié est arrêté par deux gendarmes au Gua en train de vendre des exemplaires du journal anarchiste Le Révolté, entre autres. Transporté à Aubin et libéré, il reprend sa vente sans faire attention aux policiers - qui déclarent ne pas l'avoir enchaîné car ils auraient manqué de menottes mais auraient du le faire autrement pour l'empêcher de poursuivre[1],[2].

Il est renvoyé de son emploi de mineur quelques jours plus tard et décide de rejoindre Paris avec sa famille pour y trouver un travail. Il est alors en lien avec le compagnon anarchiste Auguste Lucas ; qui lui donne de quoi manger, de l'argent et lui trouve un travail[1],[2]. Il rejoint pendant cette période le mouvement anarchiste à Paris et se rend aux réunions du Cercle international anarchiste fondé par Alexandre Tennevin[1],[2].

Deux ans plus tard, Lucas est mis en cause pour avoir fait feu sur un convoi composé d'une alliance de blanquistes et boulangistes venant apporter une gerbe de fleurs devant le Mur des Fédérés, principal lieu de mémoire de la Commune de Paris[1],[2]. Le conflit réside autour de la gerbe de fleurs de L'Intransigeant, journal blanquiste qui évolue progressivement vers l'antisémitisme et l'extrême droite dès cette période. Lucas blesse deux boulangistes et Soubrié témoigne à son procès pour le défendre, en déclarant[1],[2] !

J’ai vu Lucas après la scène du 27. Il m’a raconté que la vue de la couronne de L’Intransigeant l’avait indigné. Il a ajouté qu’il avait tiré au hasard et qu’il était peiné d’avoir blessé des personnes. « Ce n’est pas un homme que j’ai voulu tuer », m’a-t-il dit, « c’est un parti ! le parti boulangiste ! »

Soubrié déclare l'avoir hebergé un temps après cette affaire car Lucas serait une personne qui serait très bonne envers les autres camarades et parce que celui-ci l'a lui-même hebergé et aidé quand il en a eu besoin[1],[2].

Dans les années suivantes, il est toujours remarqué comme anarchiste par les autorités. Pendant la répression de début 1894, il est perquisitionné et la police découvre chez lui un carnet comportant des notes sur de nombreuses réunions du Cercle international anarchiste - dont une deux ans plus tôt, en 1892, où un orateur aurait tenu des propos supposément illégaux[1],[2].

L'anarchiste est alors mis en procès pendant le procès des Trente, un procès politique mélangeant des figures de l'anarchisme en France avec des illégalistes[4], destiné à faire condamner les accusés anarchistes comme faisant partie d'un complot ou d'une conspiration commune[4]. Comme la presque totalité des accusés, il est acquitté par le jury[1],[2].

Deux ans plus tard, il est toujours remarqué comme anarchiste mais aurait arrêté de fréquenter les autres membres du mouvement[1],[2].

Postérité

Photographie policière

Sa photographie policière fait partie des collections du Metropolitan Museum of Art (MET)[5].

Références

  1. Guillaume Davranche et Dominique Petit, « SOUBRIÉ François, Auguste [Dictionnaire des anarchistes] – Maitron » (consulté le )
  2. « SOUBRIE, François, Auguste », sur Dictionnaire international des militants anarchistes (consulté le )
  3. « Watrinade :: Argot français de 1808 à 1907 », sur www.argoji.net (consulté le )
  4. Bach Jensen 2015, p. 350.
  5. Alphonse Bertillon, Soubrié. François. 39 ans, né à Livignac-le-Haut (Aveyron). Brûleur de café. Anarchiste. 14/3/94., (lire en ligne)

Bibliographie

  • (en) Richard Bach Jensen, The Battle against Anarchist Terrorism: An International History, 1878-1934, Cambridge, Cambridge University Press (CUP), (ISBN 978-1-107-03405-1)
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