Florent Carton dit Dancourt

Florent Carton dit Dancourt
Détail du tableau par Robert Gabriel Gence en 1704.
Fonction
Sociétaire de la Comédie-Française
à partir de
Biographie
Naissance
Décès
Nom de naissance
Florent Carton
Pseudonyme
Dancourt
Domicile
Activités
Conjoint
Enfants

Florent Carton, sieur d'Ancourt, dit Dancourt, est un acteur et auteur dramatique français né à Fontainebleau, le et mort au château de Courcelles-le-Roy à Beaulieu-sur-Loire, le .

Biographie

Issu d'une famille noble, fils de Florent Carton, écuyer, et de Louise de Londé — par laquelle il descend des Budé — qui l'élève, Dancourt fait ses études à Paris dans le Collège des Jésuites. Le père La Rue, qui est son maître, veut en vain l'engager dans la Société de Jésus. Il étudie le droit, se fait recevoir avocat à l'âge de 17 ans et exerce quelque temps au Parlement de Paris.

Il quitte la profession d'avocat à 18 ans pour épouser à Paris le — après avoir enlevé sa promise âgée de 16 ans —[1] Thérèse Le Noir de La Thorillière, fille du comédien La Thorillière. Trois mois après ce scandale, François Le Noir de La Thorillière meurt de chagrin le [1].

Malgré les résistances de sa famille, il entre avec sa jeune épouse, en 1685, dans la troupe de la Comédie-Française, dont il devient sociétaire jusqu'à sa retraite le . La facilité avec laquelle il s’exprime le fait choisir pour orateur de la troupe dans les circonstances d’apparat. Sa physionomie est expressive, son jeu plein de verve ; il joue fort bien le haut comique et excelle dans l'interprétation du Misanthrope.

L’année même où il entre au théâtre comme acteur, Dancourt fait jouer sa première comédie, Le Notaire obligeant ou les Fonds perdus. Elle réussit et, dès lors, l'auteur produit avec une fécondité extrême, entre 1683 et l'année de sa mort, plus de 80 comédies. Il collabore notamment avec Marc-Antoine Charpentier pour son Dialogue d'Angélique et Médor d'après Orlando furioso dit L'Arioste, donné le au théâtre de Guénégaud et où est fondée, le , la troupe de la Comédie-Française. Le succès, malgré la bienveillance du public à son égard, est loin d'être toujours le même, et dont la plus célèbre est Le Chevalier à la mode, en cinq actes, en prose en 1687.

La plupart de ses œuvres sont jouées tout au long du XVIIIe siècle. Celles qui ont le plus de succès sont : Le Notaire obligeant, Les Bourgeoises de qualité, Les Vendanges de Suresnes, Les Vacances, Le Mari retrouvé, Les Trois Cousines[2], Le Galant Jardinier, La Maison de campagne, La Foire de Bezons.

Dancourt exploitant habilement à la scène les aventures piquantes de l'époque, la chronique scandaleuse de la ville et de la cour, plus d'un spectateur peut craindre de se reconnaître sur la scène. Cette préoccupation n'est probablement pas étrangère à la fâcheuse aventure qui lui arrive un jour quand le marquis de Sablé est à moitié ivre à la représentation de L'Opéra de village jouée en 1691. Comme on chantait : « En parterre il bout’ra nos prés ; Choux et poireaux seront sablés », le marquis s'imagine que Dancourt veut l'offenser et il se lève pour aller le souffleter.

Suivant Voltaire, « ce que Regnard était à l'égard de Molière dans la haute comédie, le comédien Dancourt l’était dans la farce »[3]. La plupart de ses pièces sont en prose. Le dialogue en est très vif et très enjoué mais l'auteur s'écarte souvent de l'objet de son œuvre, pour montrer de l'esprit et courir après un bon mot. Charles Palissot de Montenoy dit : « par le caractère de vérité qu'il a su donner à ses personnages, Dancourt peut être regardé en quelque sorte comme le Téniers de la comédie »[note 1].

Dancourt a créé le genre villageois. Il sait retracer avec une grande fidélité, la malice et la naïveté des paysans. Il a pareillement peint d'une manière vraie les chevaliers d'industrie et les femmes d'intrigue. Son chef-d'œuvre est Le Chevalier à la mode, comédie en cinq actes, en prose, écrite en collaboration avec Sainctyon (ou Saint-Yon) (1687). Les autres pièces de Dancourt les mieux réussies sont Le Mari retrouvé (1698), Les Bourgeoises de qualité (1700), Les Trois cousines (1700) et Le Galant jardinier (1704).

On cite encore : La Désolation des Joueuses (1687), Les Vendanges de Suresnes (1694), Le Divertissement de Sceaux (1705), Le Diable boiteux (1707), La Comédie des comédiens (1710), etc.

La Folle enchère en 1690 lui a été attribuée. Elle est jouée sous son nom et il en perçoit les droits, puis elle est reproduite dans ses Œuvres Complètes éditées en 1760. Néanmoins, elle est l'œuvre de Madame Ulrich dont il est l'amant[4].

L'édition la plus complète des Œuvres de Dancourt est celle de 1760 en douze volumes (in-12). Ses Œuvres choisies sont publiées en 1810 en cinq volumes (in-18).

Retraité, il s'enferme dans un château qu'il possède dans l'Orléanais, où il achève sa vie dans les pratiques de la dévotion, traduisant les Psaumes en vers, et composant une tragédie sacrée. Florent Dancourt meurt le en son domaine de Courcelles-le-Roy[5].

Ses deux filles, Marie-Anne-Armande, dite Manon, et Marie-Anne-Michelle, dite Mimi, sont aussi comédiennes au même théâtre. Sa petite fille Thérèse Boutinon des Hayes tient un important salon à Paris. Son beau-frère, Pierre Le Noir (1659-1731), est sociétaire de la Comédie-Française en reprenant le nom de scène de son père, La Thorillière.

Œuvre

Jugé par certains comme un auteur de « troisième ordre », Dancourt n’en est pas moins, selon d’autres, le père du vaudeville moderne : ses comédies de mœurs sont légères et alertes, peu morales sans jamais être indécentes, pleines de verve et de naturel. Dancourt rend avec réalisme la société de son temps et met en scène les travers de l’homme, caricaturant les bourgeois vaniteux et ridicules, les ingénues fort peu innocentes, les magistrats véreux. Son univers est proche d’un Molière, même si les personnages sont différents, son langage est celui d’un Lesage en moins cru, ses soubrettes annoncent Marivaux.

Cet auteur prolifique touche aux genres les plus variés, puisqu'on trouve dans son œuvre des intermèdes, des parodies d'opéras, des divertissements de cour, des fantaisies mythologiques, des comédies en cinq actes et surtout de courtes pièces en prose, les « dancourades », écrites en langage parlé. Leur nouveauté pique la curiosité du public, car elles font allusion à l'actualité ou à la mode. La satire des mœurs y est en général superficielle, car la comédie se fait plus amorale : Dancourt montre sans condamner, si bien que sa lucidité a pu passer pour du cynisme. L’intrigue, on ne peut plus simple, est prétexte à une revue de personnages ridicules, souvent pittoresques et individualisés dans leur appartenance sociale (notaires, procureurs, commerçants, financiers, militaires, chevaliers d'industrie).

Ces courtes œuvres prennent parfois de grandes libertés avec la convention théâtrale en montrant leur invraisemblance même ; dans Les Vendanges de Suresnes (1659), les paysans et les vendanges disparaissent derrière les danses, les déguisements et les mascarades, comme si la comédie abandonnait son souci mimétique pour jouer un peu avec lui-même et rechercher d'autres façons de séduire le public en dévoilant les ficelles de ses mécanismes.

Héraldique, distinctions, décorations et hommages

Florent Carton dit Dancourt possédait un blason[6]. En 1868, les édiles parisiens décident de donner le nom de rue Dancourt à la rue du Théâtre dans le 18e arrondissement[7]. De cette rue, est née au XXe siècle la villa Dancourt, voie privée jouxtant la rue Dancourt[8].

Il existe aussi une rue Florent-Dancourt à Suresnes (Hauts-de-Seine), la commune souhaitant rendre hommage à l'auteur de la pièce Les Vendanges de Suresnes.

De même, une rue Dancourt se trouve à Fontainebleau, sa ville natale.

Bibliographie

  • Henri de Jouvencel (dans La Revue hebdomadaire no  43 de Fernand Laudet), Gentilshommes et comédiens : les Dancourt, t. 10, Paris, Éditions de la Librairie Plon, (1re éd. 1909), 40 p. (lire en ligne), « Les Dancourt »
  • Gustave Vapereau, Dictionnaire universel des littératures, Paris, Hachette, 1876, p. 572
  • André Blanc, F.-C. Dancourt (1661-1725). La Comédie-Française à l'heure du Soleil couchant, Tübingen, Gunter Narr Verlag, 1984.
  • Dancourt, La Maison de campagne (1688) ; La Foire Saint-Germain (1696) ; Les Eaux de Bourbon (1696). Comédies, texte établi, présenté et annoté par André Blanc, Paris, Nizet, Société des textes français modernes, 1985.
  • Dancourt, La Fête de village (1700) ; Le Vert-Galant (1714) ; Le Prix de l'arquebuse (1717). Comédies II, texte établi, présenté et annoté par André Blanc, Paris, Société des Textes Français Modernes (S.T.F.M.), 1989 (diffusion : Nizet).
  • Dancourt et Sainctyon, Le Chevalier à la mode (1687) ; Dancourt, La Désolation des joueuses (1687) ; L'Été des coquettes (1690) ; Les Vendanges de Suresnes (1695) ; Les Curieux de Compiègne (1698) ; Les Trois cousines (1700) ; Les Agioteurs (1710), éd. André Blanc, dans Théâtre du XVIIe siècle, textes choisis, établis, présentés et annotés par Jacques Truchet et André Blanc, Paris, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1992.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Notices et ressources

Notes et références

Notes

  1. La citation de « Téniers de la comédie » par Charles Palissot de Montenoy, est en rapport avec la pièce du même nom, Téniers, comédie en un acte et en prose, mêlée de vaudevilles, des auteurs Jean-Nicolas Bouilly et Marie Joseph Pain. Leur personnage principal est Dominique Téniers et la pièce est représentée pour la première fois le 26 vendémiaire an IX.

Références

  1. Henri de Jouvencel (dans La Revue hebdomadaire no  43 de Fernand Laudet), Gentilshommes et comédiens : les Dancourt, t. 10, Paris, Éditions de la Librairie Plon, (1re éd. 1909), 40 p. (lire en ligne), « Les Dancourt », p. 483.
  2. Un tableau de Watteau vers 1712 intitulé Acteurs de la Comédie-Française représente les acteurs des Trois Cousines.
  3. Le Siècle de Louis XIV.
  4. Aurore Évain, Théâtre de femmes de l'Ancien Régime, tome 3, p. 191, Publications de l'Université de Saint-Étienne.
  5. Archives départementales du Loiret, baptêmes, mariages, sépultures à Beaulieu-sur-Loire, registres paroissiaux (1722-1732), cote document 3-NUM-29/2 : acte de décès de Florent Carton-Dancourt. Visionneuse d'images numériques, vues 44 et 45 sur 116.
  6. « Dancourt (rue) », sur le blog personnel d'Arnaud Bunel (consulté le ).
  7. « rue Dancourt », sur le site de la mairie de Paris (consulté le ).
  8. « villa Dancourt », sur le site de la mairie de Paris (consulté le ).
  • Portail du théâtre
  • Portail du Grand Siècle
  • Portail du XVIIIe siècle