Comitat (Hongrie)

Comitat
Administration
Pays Hongrie
Type collectivité territoriale
Division supérieure région (regió)
Division inférieure districts (járás)
Nombre de subdivisions 19
Joupan (ispán)
Création
  • Xe siècle : comitat
  • 1950-2023 : département
  • depuis 2023 : retour au système comital
Localisation

Carte des comitats hongrois.

Le comitat (hongrois : vármegye, [ˈvaːrmɛɟɛ] ; latin : comitatus) est la subdivision politique intermédiaire entre l'État et les localités en Hongrie. De 1950 à 2022, la notion de département (en hongrois : megye, [ˈmɛɟɛ]) lui est privilégiée.

Au nombre de 19 aujourd'hui, mais de 64 jusqu'en 1918, on y ajoute traditionnellement Budapest, qui bénéficie cependant d'un statut particulier. Les comitats maillent le territoire hongrois de manière contigüe. En raison de la centralisation politico-administrative de la Hongrie, les compétences des collectivités comitales (vármegyei önkormányzat) restent très limitées. Celles-ci concernent les services qui s'appliquent sur l'ensemble du territoire comital, les établissements scolaires secondaires (collèges), les établissements médicaux spécialisés ainsi qu'un rôle de coordination de l'aménagement du territoire. De plus, elles ne s'appliquent pas aux villes de droit comital qui disposent de leur propre conseil comital (vármegyei közgyűlés) superposée au conseil local.

Le comitat correspond au niveau NUTS 3 de la nomenclature d'unités territoriales statistiques européenne[1].

Étymologie

Le nom « comitat » vient du latin comitatus et a la même étymologie que les mots comte et comté[2].

Histoire

Les origines du régime comital

Le prince Géza (972-997) et son fils, Étienne Ier (997-1035) convertissent la Hongrie au catholicisme et fonde le Royaume de Hongrie. Ce royaume est divisé en Comitats royaux au rôle flou et dont on ne connait pas le nombre avec précision (entre 25 et 70). En 1222, le roi André II promulgue une « bulle d'Or » par laquelle les comitats « royaux » deviennent comitats « des nobles » dirigés par la noblesse locale[3].

En 1785, l'empereur Joseph II d'Autriche décide d'un nouveau découpage du pays en 10 départements (Bezirke) dans la suite des réformes commencées sous le règne de sa mère Marie-Thérèse de Habsbourg[4] qui avait placé à la tête de chaque comitat un gouverneur de confiance. Cette nouvelle organisation du territoire n'a cependant été de courte durée, puisqu'on revient à un système de comitat en 1790 juste avant la mort du roi Habsbourg[5].

Le régime comital du royaume de Hongrie après le Compromis austro-hongrois

La réforme administrative de 1876 supprime les particularités locales héritées du féodalisme et établit 72 nouveaux comitats, avec des limites simplifiées pour rendre l'administration de l'État plus efficace dans les pays de la Couronne de Saint-Étienne issus du Compromis austro-hongrois de 1867, soit les deux royaumes associés de Hongrie (64 comitats) et de Croatie-Slavonie (8 comitats).

Les 64 comitats du royaume de Hongrie

Nom du comitat Siège Pays actuel Sup.
(km²)
Pop.[6] Dens.
Abaúj-Torna Kassa / Košice Hongrie
Slovaquie
3 317 202 282 61
Alsó-Fehér Nagyenyed / Aiud Roumanie 3 646 221 618 61
Arad Arad / Arad Hongrie
Roumanie
6 048 414 388 69
Árva Alsókubin / Dolný Kubín Slovaquie 2 018 78 745 39
Bács-Bodrog Zombor / Sombor Hongrie
Serbie
11 079,4 812 385 73
Baranya Pécs Hongrie
Croatie
5 177 352 418 68,1
Bars Aranyosmarót / Zlaté Moravce Slovaquie 2 724 178 500 65,5
Békés Gyula Hongrie 3 670 298 710 81,4
Bereg Beregszász / Berehove Hongrie
Ukraine
3 786 236 611 62,5
Beszterce-Naszód Beszterce / Bistrița Roumanie
Bihar Nagyvárad / Oradea Hongrie
Roumanie
Borsod Miskolc Hongrie
Brassó Brassó / Brașov Roumanie
Csanád Makó Hongrie
Csík Csíkszereda / Miercurea-Ciuc Roumanie
Csongrád Szentes Hongrie
Esztergom Esztergom Hongrie
Slovaquie
Fejér Székesfehérvár Hongrie
Fogaras Fogaras / Făgăraș Roumanie
Gömör és Kis-Hont Rimaszombat / Rimavská Sobota Hongrie
Slovaquie
Győr Győr Hongrie
Hajdú Debrecen Hongrie
Háromszék Sepsiszentgyörgy / Sfântu Gheorghe Roumanie
Heves Eger Hongrie
Hont Ipolyság / Šahy Hongrie
Slovaquie
Hunyad Déva / Deva Roumanie 7 809 350 135 45
Jász-Nagykun-Szolnok Szolnok Hongrie
Kis-Küküllő Dicsőszentmárton / Târnăveni Roumanie 1 724 116 091 67
Kolozs Kolozsvár / Cluj Roumanie 5 006 286 687 57
Komárom Komárom / Komárno Hongrie
Slovaquie
Krassó-Szörény Lugos / Lugoj Roumanie
Liptó Liptószentmiklós / Liptovský Mikuláš Slovaquie
Máramaros Máramarossziget / Sighetu Marmației Roumanie
Ukraine
Maros-Torda Marosvásárhely / Târgu Mureș Roumanie
Moson Mosonmagyaróvár Hongrie
Autriche
Nagy-Küküllő Segesvár / Sighișoara Roumanie
Nógrád Balassagyarmat Hongrie
Slovaquie
Nyitra Nyitra / Nitra Slovaquie
Pest-Pilis-Solt-Kiskun Budapest Hongrie
Pozsony Pozsony / Bratislava Slovaquie
Sáros Eperjes / Prešov Slovaquie
Somogy Kaposvár Hongrie
Sopron Sopron Hongrie
Autriche
Szabolcs Nyíregyháza Hongrie
Slovaquie
Szatmár Nagykároly / Carei Hongrie
Roumanie
Szeben Nagyszeben / Sibiu Roumanie
Szepes Lőcse / Levoča Slovaquie
Pologne
3 668 172 867 47
Szilágy Zilah / Zalău Roumanie
Szolnok-Doboka Dés / Dej Roumanie
Temes Temesvár / Timișoara Serbie
Roumanie
Tolna Szekszárd Hongrie
Torda-Aranyos Torda / Turda Roumanie
Torontál Nagybecskerek / Zrenjanin Hongrie
Serbie
Trencsén Trencsén / Trenčín Slovaquie
Turóc Turócszentmárton / Martin Slovaquie 1 123 55 700 49,6
Udvarhely Székelyudvarhely / Odorheiu Secuiesc Roumanie
Ugocsa Nagyszőlős / Vynohradiv Ukraine
Ung Ungvár / Oujharad Hongrie
Ukraine
Slovaquie
3 230 161 989 50,2
Vas Szombathely Hongrie
Slovénie
Autriche
Veszprém Veszprém Hongrie
Zala Zalaegerszeg Hongrie
Croatie
Zemplén Sátoraljaújhely Hongrie
Slovaquie
Zólyom Besztercebánya / Banská Bystrica Slovaquie 2 634 133 700 51

Les 8 comitats du royaume de Croatie-Slavonie

Entre parenthèses, le siège du comitat :

Le régime comital du royaume de Hongrie après le traité de Trianon

Nom du comitat Siège Superficie
(km²)
Population Population
densité
Localités
Abaúj-Torna
Bács-Bodrog
Baranya
Bars és Hont
Békés
Bereg
Beszterce-Naszód
Bihar
Borsod
Csanád, Arad és Torontál
Csík
Csongrád
Esztergom
Fejér
Gömör és Kis-Hont
Győr, Moson és Pozsony
Hajdú
Háromszék
Heves
Jász-Nagykun-Szolnok
Kolozs
Komárom
Máramaros
Maros-Torda
Nógrád
Nyitra és Pozsony
Pest-Pilis-Solt-Kiskun
Somogy
Sopron
Szabolcs
Szatmár
Szilágy
Szolnok-Doboka
Tolna
Udvarhely
Ugocsa
Ung
Vas
Veszprém
Zala
Zemplén

Le régime comital hongrois depuis 1950

1950 : Réforme territoriale et adoption du modèle soviétique

En 1950, la Hongrie adopte une réforme administrative d'inspiration soviétique visant à rationaliser la structure territoriale du pays. Cette réorganisation, accompagnée d'une restructuration des districts, établit le système des conseils populaires et remplace les 25 comitats et 14 villes à statut municipal par 19 départements (megye) et la ville de Budapest. L'objectif est d'équilibrer la répartition de la population et des superficies, tout en instaurant un modèle de gouvernance centralisé.

Cette transformation repose sur plusieurs textes législatifs, dont la loi XX de 1949, qui établit les principes fondamentaux de l'organisation territoriale et confie au Conseil des ministres la gestion du découpage administratif, et la loi XXVI de 1949, qui entraîne l'intégration de 7 villes départementales et 16 grandes communes dans le Grand Budapest. Un décret gouvernemental (4.343/1949 du 14 décembre) définit la nouvelle nomenclature des départements et confie au ministre de l'Intérieur l'organisation détaillée de la transition, mise en œuvre par deux décrets ministériels (29 janvier et 12 mars 1950), entraînant une application en deux étapes. En parallèle, la loi I de 1950 sur les conseils locaux établit le cadre des nouveaux organes du pouvoir d'État et place le Conseil municipal de Budapest sur un pied d'égalité avec les conseils départementaux.

Toutefois, la réforme ne s'applique pas immédiatement partout. Dans les départements de Komárom et Nógrád, les nouvelles préfectures ne deviennent effectives qu'en 1952, entraînant le maintien temporaire des anciens chefs-lieux : Balassagyarmat reste la capitale de Nógrád jusqu'à son transfert à Salgótarján, tandis qu'Esztergom conserve ce rôle jusqu'à son remplacement par Tatabánya. Certains services de l'État, comme les tribunaux départementaux, conservent également leur siège historique pendant plusieurs décennies, le tribunal de Komárom n'étant déplacé d'Esztergom à Tatabánya que dans les années 1980, tandis que ceux de Békés et Nógrád restent encore aujourd'hui à Gyula et Balassagyarmat.

Évolutions et ajustements après 1950

Si la réforme de 1950 marque une rupture majeure, le découpage territorial reste largement inchangé pendant plus d'un demi-siècle, une stabilité inédite dans l'histoire administrative hongroise. Seuls quelques ajustements sont effectués : en 1962, le chef-lieu de Csongrád est transféré de Hódmezővásárhely à Szeged ; en 1956, Bakonycsernye passe de Veszprém à Fejér ; et en 1978, Keszthely et son district sont rattachés à Zala après leur séparation de Veszprém.

Des modifications interviennent également dans le statut des villes. En 1954, Debrecen, Miskolc, Pécs et Szeged sont érigées en villes à statut départemental, les plaçant hors de la juridiction de leur département, avant que cette disposition ne soit abrogée en 1971 et remplacée par un statut de « ville départementale » (megyei város), étendu à Győr. En 1989, Kecskemét, Nyíregyháza et Székesfehérvár obtiennent ce même statut, qui est toutefois supprimé en 1990.

1990 : Réorganisation territoriale dans la Hongrie post-communiste

La loi LXV de 1990 sur les collectivités locales transforme profondément l'administration hongroise. Elle vise à établir une démocratie locale en réduisant le pouvoir des départements, qui perdent leur capacité à lever des impôts et sont cantonnés à un rôle de coordination et de gestion de services publics. Cette transition entraîne un changement d'identité pour plusieurs départements : Győr-Sopron devient Győr-Moson-Sopron, Szolnok devient Jász-Nagykun-Szolnok, Komárom devient Komárom-Esztergom, et Szabolcs-Szatmár devient Szabolcs-Szatmár-Bereg.

Un nouveau statut de « ville à statut départemental » (megyei jogú város) est créé, offrant une large autonomie sans séparation administrative. Son adoption se fait progressivement : 20 villes obtiennent ce statut en 1990, suivies de 2 en 1994, 1 en 2006 et 2 en 2022. Aujourd'hui, toutes les capitales départementales (sauf Budapest) ainsi que sept autres grandes villes en bénéficient.

Après 1990, les modifications territoriales restent limitées. Le plus visible concerne Veszprém, qui perd 11 communes au profit de Győr-Moson-Sopron entre 1992 et 2002 (Csikvánd, Gyarmat, Szerecseny en 1992 ; Bakonypéterd et Lázi en 1999 ; Bakonygyirót, Bakonyszentlászló, Fenyőfő, Románd, Sikátor et Veszprémvarsány en 2002). D'autres ajustements ont lieu, notamment en 1996, avec le transfert de Dunafalva de Baranya à Bács-Kiskun, celui de Tiszaug de Jász-Nagykun-Szolnok à Bács-Kiskun en 1999, ainsi que le rattachement de Szárliget de Fejér à Komárom-Esztergom. En 2013, Balatonvilágos est transférée de Veszprém à Somogy.

2023 : Retour au terme « comitat »

La 11e modification de la Loi fondamentale (Alaptörvény), entrée en vigueur le 1er janvier 2023, marque un retour symbolique à la terminologie historique. Le terme « département » (megye) est abandonné au profit du mot « comitat » (vármegye), restaurant ainsi une tradition millénaire dans l'administration hongroise. Cette modification introduit une nouvelle appellation pour les préfets, désormais désignés sous le titre historique d'« ispán » (en français joupan, équivalent médiéval du gouverneur de comitat sous la monarchie hongroise).

Selon ses détracteurs, cette réforme est avant tout symbolique et déconnectée des enjeux réels du pays, détournant l'attention des problèmes économiques et sociaux. Ils dénoncent également une volonté du gouvernement Orbán de renforcer une rhétorique nationaliste, en réintroduisant un terme associé à l'ancienne Hongrie royale et à l'aristocratie féodale, ce qui serait perçu comme anachronique dans un État moderne et membre de l'Union européenne. D'autres voix critiquent le coût administratif engendré par ce changement, notamment la mise à jour des documents officiels et des enseignes institutionnelles, jugée superflue en période de difficultés économiques.

Liste des comitats hongrois

Nom du comitat Siège Superficie
(km²)
Population[7] Population
densité
Localités
 Bács-Kiskun Kecskemét 8 445 511 419 60.6 120
 Baranya Pécs 4 430 368 135 83.1 301
 Békés Békéscsaba 5 631 347 058 61.6 75
 Borsod-Abaúj-Zemplén Miskolc 7 247 660 549 91.1 355
 Budapest Budapest 525 1 759 407 3 350.2 23
Csongrád-Csanád Szeged 4 263 404 459 94.9 60
Fejér Székesfehérvár 4 359 418 487 96.0 108
 Győr-Moson-Sopron Győr 4 208 455 217 111.3 182
 Hajdú-Bihar Debrecen 6 211 534 974 86.1 82
Heves Eger 3 637 299 219 82.3 119
Jász-Nagykun-Szolnok Szolnok 5 582 376 334 67.4 75
Komárom-Esztergom Tatabánya 2 265 297 914 131.5 76
Nógrád Salgótarján 2 546 193 946 76.2 129
 Pest Budapest 6 390 1 234 541 193.1 186
Somogy Kaposvár 6 036 309 115 51.2 244
Szabolcs-Szatmár-Bereg Nyíregyháza 5 936 563 075 94.9 228
Tolna Szekszárd 3 703 223 618 60.4 108
Vas Szombathely 3 336 253 689 76.0 216
Veszprém Veszprém 4 493 344 302 76.6 217
Zala Zalaegerszeg 3 784 275 027 72.7 257

Les villes de droit comital

Chaque chef-lieu de comitat est une ville de droit comital (megyei jogú város) et il s'y ajoute cinq autres villes de plus de 50 000 habitants :

Les collectivités des minorités à l'échelon comital

Il existe 13 minorités nationales, ethniques et religieuses reconnues officiellement par la loi en Hongrie. La loi de 1993 leur donne le droit de voter à l'échelle nationale ainsi qu'à l'échelon de chaque collectivité territoriale (comitats et localités) pour leurs propres représentants. Ces derniers forment des collectivités des minorités (kisebbségi önkormányzat) qui disposent de compétences particulières pour fixer le calendrier de leurs fêtes et célébrations, contribuer à la préservation de leurs traditions et participer à l'éducation publique. Ces collectivités particulières peuvent ainsi gérer des théâtres publics, des bibliothèques, des institutions scientifiques et artistiques, attribuer des bourses d'études et dispenser de services en direction de leur communauté (aides juridiques notamment).

Notes et références

Références

  1. « Statistical atlas », sur Eurostat (consulté le )
  2. Littré : "Comitat" renvoi à "Comté"
  3. Hajdù 2003, partie A. §6 et §7.
  4. « Hongrie - Du royaume de saint Etienne à la nation hongroise », sur Clio, (consulté le )
  5. Hajdù 2003, partie C. §16.
  6. Population de l'entité au début du XXe siècle
  7. Population en 2016

Voir aussi

Bibliographie

  • Zoltán Hajdú (trad. Simon Edelblutte), « Un millénaire d’administration régionale et locale en Hongrie », Revue géographique de l'Est, no 43,‎ (lire en ligne, consulté le )

Articles connexes

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