Benjamin Rabier

Benjamin Rabier
Naissance
Décès
Sépulture
Nom de naissance
Benjamin Amand Rabier
Nationalité
Activités
Distinctions
Œuvres principales
Signature de Rabier en couverture d’Oscar, roi du désert (1928).

Benjamin Rabier, né le à Napoléon-Vendée et mort le à Faverolles, est un auteur pour la jeunesse, dramaturge, animateur, illustrateur et auteur de bande dessinée français.

Il s’est rendu célèbre grâce aux dessins de la marque « La vache qui rit » et du personnage du canard Gédéon[1].

Biographie

Bien qu'il ait montré très tôt des dispositions pour le dessin — il obtient à quinze ans le prix du dessin de la Ville de Paris —, Benjamin Rabier doit interrompre ses études pour travailler. Il alterne différents métiers. Libéré de ses obligations militaires en , il entre au Bon Marché à Paris comme comptable. Grâce à l’appui de Caran d'Ache qu’il a rencontré l’année précédente, plusieurs revues françaises commencent à publier ses dessins dès 1889 (La Chronique amusante, Gil Blas Illustré), mais aussi au Royaume-Uni et aux États-Unis où il a plus de succès. Il est finalement publié régulièrement dans Le Rire et Le Pêle-Mêle — dont il fait les unes —, ce qui lui permet de sortir ses premiers albums, notamment Tintin-Lutin, titre et personnage à houppette et pantalon de golfeur[2], dont Hergé s’inspira quelques années plus tard[3].

Au début du XXe siècle, Benjamin Rabier s’impose comme un auteur à succès, comme en témoignent ses publications dans l'Assiette au Beurre ou le Chat noir. Parallèlement à ses travaux destinés aux adultes, il se lance dans le dessin pour enfants en intégrant dès 1903 l'équipe de La Jeunesse illustrée, premier illustré moderne pour les enfants français[4]. Il y livre jusqu'en 1919 des histoires courtes mettant en scène animaux ou enfants farceurs qui s'égaient dans la bonne humeur. Il y tient avec Georges Omry le rôle de dessinateur principal. Le premier numéro spécial, celui de l'été 1903, lui est entièrement confié. C'est le seul dessinateur du journal à dévier du gaufrier strict des images d'Épinal, se permettant de jouer sur le format des vignettes ou de réduire les textes jusqu'à s'en passer. En 1907-1908, il publie un journal, Histoire comique et naturelle des animaux (1907-1908)[5].

Il écrit aussi de nombreuses pièces de théâtre (comme Ma veuve s’amuse en collaboration avec José de Bérys). Malgré ces succès, il travaille, tout au long de ces années, comme employé, la nuit, au service des Perceptions municipales des Halles de Paris, et garde jusqu’en 1910 cet emploi, ne prenant sa retraite qu'à cause du surmenage[6].

Face à l’effondrement de l’édition enfantine provoqué par la Première Guerre mondiale, Rabier se lance, à partir de 1916, dans la réalisation de dessin animé. L’idée de porter les personnages de Rabier à l’écran revient à une petite maison de production : le Film national, Rabier est enchanté par cette opportunité mais il ignore tout de la technique cinématographique, de la configuration commerciale du milieu et des capacités financières des intervenants. Il décide de faire appel à son ami Émile Cohl, dont il apprécie l'animation de la bande dessinée des Pieds Nickelés qu'il a réalisé la même année[7]. Ce dernier informe Rabier de la modeste envergure du Film national et de la marginalité de sa diffusion[7].

Rabier prend alors contact avec le producteur René Navarre, qui vient de fonder sa propre marque de films, et avec qui il conclut un contrat. Il en informe Cohl dans sa correspondance : "Le contrat est signé. Mais pour des raisons que m’a données Navarre et que je vous expliquerai, votre passage sur le film [votre présence au générique ?] est impossible mais vous aurez en revanche toute satisfaction. Vous ne resterez pas dans l’ombre. Une part vous est réservée dans la publicité. Je vous donnerai des assurances qui vous satisferont. Et quelque chose de mieux."

Navarre s’est engagé, pour un minimum de six films, à lui livrer si possible à raison d’un par mois, de façon à prévoir une diffusion mensuelle de la série et il est convenue de produire une série mettant vedette le chien Flambeau, Navarre insiste tout particulièrement pour que l'on voit Rabier en train de dessiner l’image du chien Flambeau au début de chaque film. Le cycle de production établi à un dessin animé par mois s’ouvre avec la réalisation de La journée de Flambeau et Flambeau au pays des surprises, suivis par Les Fiançailles de Flambeau et Les Aventures de Clémentine. Dès décembre 1916, les films sont présentés au distributeur, l’Agence générale cinématographique, où le directeur Paul Castor valide les deux derniers films mais demande une révision des deux premiers car il les trouve moins réussi. Rabier et Cohl se remettent donc au travail et ils apportent des révisions importantes aux deux premiers films.

Durant cette période, la série est officiellement lancé avec la sortie du film "Les Aventures de Clémentine" le 15 juin 1917. Le lendemain, Rabier fait part de son enthousiasme à Cohl et lui communique les idées qu'il a pour son héros : "Navarre me demande la Journée de Flambeau. Si vous êtes disposé en ce moment à revoir le travail de ce film, je ne demanderai pas mieux que de le mettre au point avec vous. Le film Clémentine qui vient de passer me fortifie dans l’idée que le public aime les choses un peu suivies. Je voudrais donc modifier la Journée de Flambeau dans ce sens. C’est-à-dire en faire par exemple un chien bon et secourable qui se met au service de son prochain. Il rend un service à un chat qui le lui rend en lui procurant une pâtée plantureuse (le chat et le linge qui sèche). Il rend encore service à une taupe et la taupe lui sauve la vie (le train). Bien entendu ces modifications qui suppriment des dessins en demandent en revanche de nouveaux ; aussi je m’arrangerai avec vous pour ce détail de rémunérations. Quant au prochain film nous en causerons en même temps. Car la bande que je prépare nécessite d’amples explications."

Cependant si la sortie de Clémentine ravissait Rabier, elle rendait Cohl furieux. Il s’était résigné à ne pas figurer au générique sur la promesse qu’une part lui serait faite dans la publicité de lancement de la série. Or il n’est pas cité une seule fois dans les communiqués ou annonces publicitaires. Émile Cohl se retire donc du projet et Rabier doit à continuer le projet tout seul, mais avec un calendrier de production beaucoup plus espacer : il ne présentera plus de nouveaux films avant le 25 avril 1919[7],[8].

Rabier était néanmoins navré de voir Cohl se retirer du projet, et il a tenté de le faire revenir sur sa décision dans une lettre du 10 octobre 1918 : "Si vous le vouliez, c’est avec vous que je pourrais tenter des choses intéressantes et innover. […] J’ai « inventé » un système de dessin animé qui permet de tourner aussi vite qu’une scène crabée (je viens de tourner en cinq minutes une scène de 20 mètres !). Mais pour continuer dans cette voie, pour tirer tout le parti utile de mon « invention », il me faudrait un homme intelligent comme collaborateur. C’est pourquoi je serais heureux de causer avec vous un matin quand il vous plaira. Cependant, avant de vous déranger, vous me permettrez de vous demander de venir avec l’idée que rien ne subsistera de nos conditions passées. Enfin, tout cela est peut-être superflu, venez et nous causerons."

Mais sa tentative s'est soldé par un échec car si Cohl appréciait Rabier mais il ne voulait plus avoir de rapports avec René Navarre. La série de Rabier continuera donc sans lui avec une diffusion irrégulière : trois épisodes sortiront en 1920 ; aucun en 1921 ; deux en 1922, dont la quatorzième et dernière bande en septembre : les Quatre Cents Coups de Flambeau[7].

Il crée de nombreuses affiches publicitaires, pour de multiples marques, par exemple, la lotion capillaire Pétrole Hahn[9].

Ses travaux lui valent de nombreux admirateurs, parmi lesquels Hergé, qui déclara : « J’ai été immédiatement conquis. Car ces dessins étaient très simples. Très simples, frais, robustes, joyeux, et d’une lisibilité parfaite. En quelques traits bien charpentés tout était dit : le décor était indiqué, les acteurs en place ; la comédie pouvait commencer[10]. » Le voyage que Robert Sexé fait à moto jusqu’à Moscou inspire Hergé, qui le prend pour modèle de Tintin. À la fin de sa vie, alors que Tintin commence à être diffusé, Rabier dessine une série nommée Onésime[11], qui a lui aussi la houppette bien marquée et le pantalon façon golf.

Figure majeure du dessin animalier

Il est considéré comme un des plus grands dessinateurs animaliers européens[12]. L’univers de Benjamin Rabier est parsemé d’animaux. En 1906, Benjamin Rabier publie chez Jules Tallandier une édition entièrement illustrée des Fables de La Fontaine. Il illustra aussi le Roman de Renart et les Histoires naturelles de Jules Renard. En 1921, Léon Bel s’inspira d’un dessin de Benjamin Rabier comme logo de sa marque La vache qui rit. Cette vache, qui décorait les camions de transport de viande fraîche pendant la Première Guerre mondiale, était surnommée la « Wachkyrie ». Mais son personnage de bande dessinée le plus célèbre reste Gédéon le canard, dont les histoires ont été publiées entre 1923 et 1939 en 16 albums. Il a aussi dessiné la célèbre baleine des Salins du Midi[13].

Postérité

Musée municipal de La Roche-sur-Yon

Le musée municipal de sa ville natale possède le plus important fonds public d'œuvres du célèbre dessinateur. Des expositions régulières permettent de montrer ces œuvres au grand public. En 2010, le musée s'est porté acquéreur de plusieurs œuvres de Benjamin Rabier, dont le célèbre dessin représentant le singe Tolby fumant un cigare.

Hôtel particulier parisien

En 1904-1905, Rabier fait construire au 3 rue Chasseloup-Laubat (15e arrondissement) un hôtel particulier par l’architecte Bruno Pellissier[14].

Expositions

Publications

Ouvrages

Série Gédéon

En 1923, il crée le célèbre canard Gédéon qui comptera en tout seize albums d’aventures de Gédéon, réédités dans les années 1990 par les éditions Hoëbeke ; une série animée a été réalisée en 1976.

  • Gédéon ()
  • Gédéon Sportman ()
  • Gédéon en Afrique ()
  • Placide et Gédéon ()
  • Gédéon mécano ()
  • Gédéon s'amuse ()
  • Gédéon comédien ()
  • Gédéon dans la forêt ()
  • Gédéon chef de brigands ()
  • Gédéon roi de Matapa ()
  • Gédéon traverse l'Atlantique ()
  • Gédéon se marie ()
  • Gédéon est un bon garçon ()
  • Gédéon Grand Manitou ()
  • Gédéon fait du ski ()
  • Les Dernières Aventures de Gédéon ()

Varia

Rééditions

  • Jean-Pierre Claris de Florian (préf. Stéphane Labbe, ill. Grandville), Fables, Paris, L'École des loisirs, coll. « Classiques », (1re éd. 2009), 236 p. (ISBN 978-2-211-09346-0)
    Illustration de couverture par Benjamin Rabier.
  • Fables de La Fontaine illustrées par Benjamin Rabier, 3 volumes, Paris, Tallandier, 1995.
  • Histoires de bêtes, par Benjamin Rabier, Houilles, Éditions Brittia, sd.
  • Tintin-Lutin, par Benjamin Rabier, Éditions De Varly, 2017.

Illustrations

  • Aquilino Ribeiro, O Romance da Raposa, illustrations de Benjamin Rabier, 1924.
  • Le Roman de la renarde, traduction française de Bernard Tissier et Diogo Quintela, Éditions Chandeigne, Collection « Série Illustrée », 2000.

Filmographie

Benjamin Rabier avec son ami et complice Émile Cohl a réalisé des films d’animation mettant en scène le chien Flambeau et l'oie Clémentine.

  • Les Aventures de Clémentine (15 juin 1917), court-métrage.
  • Les Fiançailles de Flambeau (Juin 1917)
  • La Journée de Flambeau (18 avril 1919)
  • Flambeau au pays des surprises (30 mai 1919)
  • Les amours d'un escargot (avril 1920)
  • J'ai perdu mon enfant (septembre 1920)
  • Coeur de grenouille (novembre 1920)
  • La queue en trompette (avril 1922)
  • Les 400 coups de Flambeau (septembre 1922)

Notes et références

  1. « Benjamin Rabier, dessinateur animalier », sur ensemblepourlesanimaux.org (consulté le ).
  2. Christophe Gervais, « C’est un Berrichon qui a inventé Tintin », La Nouvelle République,‎ (lire en ligne).
  3. M. Brunaud, « Tintin, héros berrichon », Le Petit Solognot, hiver 2012, p. 28-33.
  4. Pour ce qui concerne La Jeunesse illustrée : Nollet (1979).
  5. Numéros de Histoire comique et naturelle des animaux dans Gallica, la bibliothèque numérique de la BnF.
  6. Christophe Vital, Benjamin Rabier: 1864-1939 : Gédéon, La vache qui rit et Cie : [exposition ... présentée à l'Historial de la Vendée, 10 juillet au 18 octobre 2009, Vendée, Conseil général, , 311 p. (ISBN 978-2-75720-281-4, lire en ligne), p. 21.
  7. Francis Lacassin, « Quand la Vache qui rit devançait Félix le chat et Mickey la souris », 1895. Mille huit cent quatre-vingt-quinze. Revue de l'association française de recherche sur l'histoire du cinéma, no 53,‎ , p. 210–225 (ISSN 0769-0959, DOI 10.4000/1895.2483, lire en ligne, consulté le )
  8. « Chapitre Les dessins animés de Benjamin Rabier | Criminocorpus », sur criminocorpus.org (consulté le )
  9. « Saga Pétrole Hahn », sur prodimarques.com.
  10. Benoit Mouchart et François Rivière, Hergé, un portrait intime du père de Tintin, Paris, Robert Laffont, , 180 p. (ISBN 978-2-22112-824-4, lire en ligne), p. 25.
  11. Benjamin Rabier, Onésime, , 16 p., ill. en noir et en coul., couv. ill. en coul. ; 21 x 27 cm (lire en ligne sur Gallica).
  12. Michel Béra, Michel Denni et Philippe Mellot, BDM, trésors de la bande dessinée. 2009-2010 : catalogue encyclopédique, Paris, Éditions de l'amateur, coll. « Trésors de la bande dessinée, 2009-2010 », , 1295 p. (ISBN 978-2-85917-491-0, OCLC 286348986, lire en ligne), « Benjamin Rabier », p. 918-926.
  13. « Benjamin Rabier, l'homme qui fait rire les animaux », sur herodote.net, (consulté le ).
  14. « Pellissier, Bruno (1865-10-09 - ) : Archives nationales (France) », sur AGORHA Bases de données de l'Institut national d'histoire de l’art.

Bibliographie

Ouvrages

Articles

Document audiovisuel

  • Benjamin Rabier, l'homme qui fait rire les animaux, écrit et réalisé par Marc Faye, film documentaire de 53 minutes (DVD), 2012 (présentation sur le site novanima.free.fr).

Liens externes

  • Portail de l’animation
  • Portail du cinéma français
  • Portail de la réalisation audiovisuelle
  • Portail de la littérature d’enfance et de jeunesse
  • Portail de la bande dessinée franco-belge
  • Portail de l’humour
  • Portail de la Vendée