État comprimé

En physique quantique, un état comprimé, parfois appelé état compressé ou état squeezé (de l'anglais squeezed state) désigne un type particulier d'état quantique décrit par deux observables non-commutantes avec un spectre continu. Par exemple, la position et la quantité de mouvement d'une particule forme un tel couple d'observables. Selon le principe d'incertitude, l'incertitude sur la mesure de ces deux quantités et liée par l'équation

En d'autres termes, plus l'incertitude sur l'une des quantités est faible, plus l'incertitude sur l'autre sera élevée. Un cas simple d'états obéissants à ce principe apparaît naturellement dans l'étude de l'oscillateur harmonique quantique : ce sont les états cohérents (ainsi que l'état fondamental). Ceux-ci ne sont cependant pas des états comprimés : l'incertitude sur et est identique.

Le terme d'état comprimé désigne les états où l'incertitude sur l'une des quantités (ou une combinaison de celles-ci) est plus faible que dans l'état fondamental. La dénomination vient de l'idée que si l'on peut représenter l'incertitude de l'état fondamental par un cercle (signifiant qu'elle est identique dans toutes les directions), celle de l'état comprimé "compresse" ce cercle en une ellipse, donnant une direction privilégiée où l'incertitude est plus faible[1].

Les premiers états comprimés de la lumière ont été produits durant les années 1980[2],[3]. À cette époque, une compression d'un facteur 2 (3 dB) sur la variance a été obtenu. En 2017, des facteurs de plus de 10 (10 dB) ont été obtenus[4],[5],[6].

Expériences

Les premières démonstrations d'états quantiques sont celles d'états comprimés de la lumière. Ceux-ci sont obtenus en utilisant des lasers et des milieux optiques non-linéaires (par exemple un oscillateur paramétrique optique).

Applications

Les états comprimés de la lumière peuvent être utilisés pour améliorer la précision de certaines mesures. Par exemple, de la lumière comprimée en phase permet d'améliorer la mesure de phase dans un interféromètre ; ce phénomène est notamment utilisé pour la détection d'ondes gravitationnelles[7],[8]. À l'inverse, une lumière comprimée en amplitude permet d'améliorer la mesure de signaux spectroscopiques très faibles[9].

Des états comprimés des atomes sont utilisés pour améliorer la précision des horloges atomiques[10],[11]. En effet, la précision de celles-ci est souvent limitée par le bruit quantique[12].

Les états comprimés interviennent également dans la formulation mathématique de différents effets de la théorie quantique des champs, comme l'effet Unruh ou le rayonnement de Hawking[13].

Notes et références

  1. (en) D. F. Walls, « Squeezed states of light », Nature, vol. 306, no 5939,‎ , p. 141–146 (ISSN 1476-4687, DOI 10.1038/306141a0, lire en ligne, consulté le )
  2. R. E. Slusher, L. W. Hollberg, B. Yurke et J. C. Mertz, « Observation of Squeezed States Generated by Four-Wave Mixing in an Optical Cavity », Physical Review Letters, vol. 55, no 22,‎ , p. 2409–2412 (DOI 10.1103/PhysRevLett.55.2409, lire en ligne, consulté le )
  3. Ling-An Wu, H. J. Kimble, J. L. Hall et Huifa Wu, « Generation of Squeezed States by Parametric Down Conversion », Physical Review Letters, vol. 57, no 20,‎ , p. 2520–2523 (DOI 10.1103/PhysRevLett.57.2520, lire en ligne, consulté le )
  4. Henning Vahlbruch, Moritz Mehmet, Simon Chelkowski et Boris Hage, « Observation of Squeezed Light with 10-dB Quantum-Noise Reduction », Physical Review Letters, vol. 100, no 3,‎ , p. 033602 (DOI 10.1103/PhysRevLett.100.033602, lire en ligne, consulté le )
  5. Henning Vahlbruch, Moritz Mehmet, Karsten Danzmann et Roman Schnabel, « Detection of 15 dB Squeezed States of Light and their Application for the Absolute Calibration of Photoelectric Quantum Efficiency », Physical Review Letters, vol. 117, no 11,‎ , p. 110801 (DOI 10.1103/PhysRevLett.117.110801, lire en ligne, consulté le )
  6. Roman Schnabel, « Squeezed states of light and their applications in laser interferometers », Physics Reports, squeezed states of light and their applications in laser interferometers, vol. 684,‎ , p. 1–51 (ISSN 0370-1573, DOI 10.1016/j.physrep.2017.04.001, lire en ligne, consulté le )
  7. Carlton M. Caves, « Quantum-mechanical noise in an interferometer », Physical Review D, vol. 23, no 8,‎ , p. 1693–1708 (DOI 10.1103/PhysRevD.23.1693, lire en ligne, consulté le )
  8. Virgo Collaboration, F. Acernese, M. Agathos et L. Aiello, « Increasing the Astrophysical Reach of the Advanced Virgo Detector via the Application of Squeezed Vacuum States of Light », Physical Review Letters, vol. 123, no 23,‎ , p. 231108 (DOI 10.1103/PhysRevLett.123.231108, lire en ligne, consulté le )
  9. E. S. Polzik, J. Carri et H. J. Kimble, « Spectroscopy with squeezed light », Physical Review Letters, vol. 68, no 20,‎ , p. 3020–3023 (DOI 10.1103/PhysRevLett.68.3020, lire en ligne, consulté le )
  10. Ian D. Leroux, Monika H. Schleier-Smith et Vladan Vuletić, « Orientation-Dependent Entanglement Lifetime in a Squeezed Atomic Clock », Physical Review Letters, vol. 104, no 25,‎ , p. 250801 (DOI 10.1103/PhysRevLett.104.250801, lire en ligne, consulté le )
  11. Anne Louchet-Chauvet, Jürgen Appel, Jelmer J Renema, Daniel Oblak, Niels Kjaergaard et Eugene S Polzik, « Entanglement-assisted atomic clock beyond the projection noise limit », New Journal of Physics, vol. 12, no 6,‎ , p. 065032 (ISSN 1367-2630, DOI 10.1088/1367-2630/12/6/065032, lire en ligne, consulté le )
  12. Masahiro Kitagawa et Masahito Ueda, « Squeezed spin states », Physical Review A, vol. 47, no 6,‎ , p. 5138–5143 (DOI 10.1103/PhysRevA.47.5138, lire en ligne, consulté le )
  13. L. P. Grishchuk et Y. V. Sidorov, « Squeezed quantum states of relic gravitons and primordial density fluctuations », Physical Review D, vol. 42, no 10,‎ , p. 3413–3421 (DOI 10.1103/PhysRevD.42.3413, lire en ligne, consulté le )
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